La semaine dernière, la Chambre basse du Parlement des Pays-Bas a refusé de voter une motion présentant l’avortement comme un droit de l’homme, à graver dans le marbre de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et du Pacte international relatif aux droits civiques et politiques. Il s’agit d’une victoire remarquable des défenseurs de la vie dans un pays longtemps à la pointe de toutes les dispositions de la culture de mort. S’il est vrai qu’elle ne va pas réduire le nombre d’avortements aux Pays-Bas, du moins n’y va-t-on pas plus loin dans le mensonge.
Et comme le déclarait le cardinal Willem Eijk le 5 septembre dernier, l’adoption de la proposition aurait fragilisé le droit des médecins et des soignants d’opposer leur objection de conscience à toute participation à l’acte : « Dans la culture actuelle, l’accent est mis sur les droits subjectifs, à savoir le droit de faire quelque chose et de décider de manière autonome, en l’occurrence de faire tuer l’enfant à naître par l’avortement. Dans l’ordre de la création, les droits sont objectifs, des droits que le Créateur accorde à l’homme et qui doivent donc être respectés », écrivait-il dans sa déclaration au sujet de l’initiative.
C’est le Parti libéral D66 qui a présenté cette proposition à laquelle il a manqué huit voix pour être adoptée. Alors qu’elle bénéficiait du soutien du gouvernement, 68 voix de gauche comme de « droite » sont venues l’approuver : les GroenLinks-PVDA (L’Alliance des écologistes de gauche et des travaillistes), le VVD (libéral-conservateur), le parti socialiste SP, le Partij voor de Dieren (le parti des animaux) et les fédéralistes européens de Volt étaient tous favorables à cette sacralisation de l’« IVG », comparable à sa constitutionnalisation en France.
L’avortement n’est pas un droit de l’homme
Tous les autres partis ont voté contre : le PVV (parti de la liberté de Geert Wilders), les chrétiens démocrates de NSC, du CDA et de la ChristenUnie, le parti paysan BBB, DENK (le parti des « minorités ethniques »), les eurosceptiques du Forum pour la Démocratie, les protestants traditionnels du SGP et les conservateurs libéraux de droite JA21 issus d’une scission du Forum pour la Démocratie.
La proposition des deux députés D66 Sjoerdsma et Paulusma, se voulait, tout comme la constitutionnalisation française, une réponse à la décision de la Cour suprême américaine rendant aux Etats la souveraineté en la matière, et visait à promouvoir une reconnaissance mondiale du droit à l’avortement.
De fait, aux Pays-Bas, l’accès à l’avortement est de plus en plus facile. La période de réflexion de 5 jours a ainsi été abolie depuis le 1er janvier 2023 pour éviter de dépasser le délai de recours à l’avortement chimique plutôt qu’à l’avortement chirurgical. En faisant de l’IVG un « droit humain », les initiateurs de la proposition avaient le projet de faire des Pays-Bas le plus important défenseur des droits à l’avortement au niveau mondial, pour peser notamment sur l’ONU, dont le Comité des droits humains milite au demeurant en ce sens, quoique de manière non contraignante pour les Etats membres.
Le Parlement des Pays-Bas, mais aussi des tribunaux…
Cette victoire, qui ne témoigne sans doute que d’une infime résistance face à la liberté d’avorter aux Pays-Bas, vient néanmoins s’ajouter à une décision de justice qui, sans dénoncer l’interdiction faite par la municipalité de Heemstede au groupe catholique Donum Domini de manifester contre l’avortement à proximité immédiate des cliniques d’« IVG », a consacré il y a deux semaines le droit pour les manifestants de se tenir de l’autre côté de la rue près de l’avortoir de la ville et, surtout, de parler aux femmes qui s’y rendent pour les en dissuader. Celles-ci ont toujours la possibilité d’éviter de parler avec les manifestants, a jugé le tribunal de la Hollande du Nord.
Au mois d’août, le Conseil d’Etat néerlandais avait déjà décidé que le maire d’Utrecht avait méconnu le droit en contraignant des manifestants pro-vie qui avaient garé une ambulance portant une bannière avec les mots « l’avortement est un meurtre de bébé » sur une place de parking en face d’une clinique d’avortement à aller 70 mètres plus loin sur un emplacement de livraison.
Il ne suffit certes pas de proclamer la liberté pour tous pour arriver à une situation juste. Mais c’est un début.