Alors que, face aux vagues de migrants qui continuent d’arriver, la Croatie vient, à son tour, de fermer certaines de ses frontières, certains politiques continuent de tenir un discours incohérent, sans efficacité, sans volonté politique. Celle-ci se manifeste plutôt, jour après jour, chez certains chrétiens qui n’ont pas oublié que, pour être du ciel, il faut aussi, pour un temps du moins, être de la terre.
François Hollande était jeudi soir dans le nord de l’Italie, à Modène, pour rencontrer le chef du gouvernement italien Matteo Renzi. Son propos – pour ne pas dire son leitmotiv : que l’Europe agisse… Le président de la République française a définitivement assimilé le fait que, politiquement, il n’est rien, et supplie donc le prochain sommet européen, qui doit se réunir mercredi, de prendre des décisions fortes, tout spécialement vis-à-vis de la Turquie, pour endiguer la crise migratoire en Europe, qui risquerait, sinon, de n’être plus maîtrisée.
Les politiques face aux migrants
Pour le chef de l’Etat, il s’agit de « travailler avec la Turquie » afin de « faire en sorte que ceux qui sont en Turquie puissent y rester, puissent y travailler et puissent avoir tous les moyens pour pouvoir attendre que la situation en Syrie trouve une issue ».
C’est un peu ce que le Royaume-Uni a fait avec la France pour empêcher que les migrants qui souhaitent quitter la « jungle » de Calais pour traverser la Manche le fassent effectivement…
Cela dit, Ankara n’est pas Paris, et il n’apparaît pas comme une évidence que le président Erdogan, qui a déjà bien assez de chats à fouetter en ce moment, apprécie d’ajouter ce problème à l’actuelle déshérence politique de son pays.
François Hollande semble, actualité oblige, évoluer sur ce dossier. Il propose également d’aider les pays d’origine des migrants, notamment en Afrique, dans leur développement afin de permettre aux migrants économiques d’avoir un avenir, même s’ils ne peuvent être accueillis en Europe.
La confusion des sentiments
De son côté, Mattéo Renzi a tenu à souligner que, si certains pays européens sont aujourd’hui membres de l’Union européenne, c’est aussi « parce quelqu’un a abattu des murs pour qu’ils puissent en être membres ».
Il y a donc encore du chemin. D’abord, parce que ce discours est inexact. D’après l’étude réalisée par l’hebdomadaire britannique The Economist, depuis la chute du mur de Berlin, 40 pays dans le monde ont construit des murs semblables, dont 30 depuis le 11 septembre 2001, et 15 au cours de l’année actuelle…
Peu importe ! Pour François Hollande, le moment est « historique » – ça faisait longtemps ! « Est-ce qu’elle va être capable de surmonter cette épreuve dans la solidarité (…) ou va-t-elle basculer dans l’égoïsme ? », s’est-il interrogé.
En clair, lorsque son discours commence, sous la pression des événements, à devenir politique, le chef de l’Etat revient bien vite à la confusion des sentiments.
Les chrétiens ont une réponse à donner
Il faut sans doute demander aux chrétiens de tenir un raisonnement qui, sans ignorer, comme l’a demandé le pape, la charité, soit plus politique. C’est la voie étroite indiquée, dans une tribune accordée au Point, deux frères, les P. Venard, l’un aumônier militaire, l’autre religieux dominicain.
Certes, l’accueil est une « nécessité morale », souligne-t-il. « Le chrétien occidental n’a pas le choix. Il doit prendre sa part pour le nécessaire accueil des réfugiés en Europe. » Ce qui ne signifie pas « accueillir tout le monde, n’importe où et surtout n’importe comment ». Et en les aidant aussi ensuite à rentrer chez eux.
Mais cela doit avoir, en outre, pour corollaire une politique étrangère réaliste. Rétablir la paix, notamment par un partage juste des richesses, mais « surtout pas en cherchant à exporter, à coup de bombes, des grands principes moralisateurs démocratiques occidentaux, mais en visant au moindre mal : un dictateur “laïque” vaut sans doute un peu mieux qu’une anarchie ou une tyrannie islamiste ».
La politique, explique les deux religieux, doit viser « le bien concret des peuples et non l’expansion de nos idéologies républicaines inadaptées à ces pays – si tant est qu’elles le soient même chez nous ! »
La critique envers nos « hommes politiques irresponsables et inconséquents » est sévère (mais juste). On doute pourtant que, emportés par le vent d’idées devenues folles, ils soient encore en mesure de l’entendre…