Vladimir Poutine attise la haine de l’Afrique contre l’Occident

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Il y a de la nostalgie (explicite) de l’époque soviétique dans les plus récents propos de Vladimir Poutine au sujet de l’Afrique et de l’Occident. Le président russe s’exprimait mardi par vidéo-conférence au Forum économique oriental de Vladivostok, en déclarant que l’Afrique n’oubliera jamais que les Européens mettaient les enfants africains « en cage ». L’Afrique se souviendra toujours de ce « chapitre noir » de l’oppression coloniale occidentale, insista-t-il, ajoutant que ce sont aujourd’hui les mêmes pays qui cherchent à réduire leurs anciennes possessions à une nouvelle servitude, rapporte rt.com en style indirect. C’est ainsi que Poutine attise la haine envers l’Occidental colonisateur.

Et c’est un processus fort intéressant, car son discours ressemble, point par point, à celui de l’idéologie woke de la rhétorique « Black Lives Matter » aux Etats-Unis, et plus largement en Occident. Lui qui pose la Russie en championne de la lutte contre le wokisme, le « racisme à l’envers » et de la « cancel culture » qui vise principalement l’histoire et la responsabilité de la colonisation de l’Amérique, encourage les pays africains à tenir le même type de raisonnements contre le « méchant » Occidental qui, par définition, n’a d’autre objectif que de piller le continent noir.

 

Pour Poutine, la Russie n’a-t-elle apporté que du bonheur en Afrique ?

Ce que la Russie n’a jamais fait, bien entendu ; à l’en croire, l’URSS, en libérant l’Afrique, n’y a apporté que du bonheur.

Rien que de très normal, finalement : les origines du wokisme comme de Black Lives Matter se situent clairement dans le camp communiste aux Etats-Unis. Le sentiment anticolonial nourri par la Russie en Afrique a visiblement les mêmes objectifs.

Faisant référence aux années du milieu du XXe siècle où la révolution communiste jouait sur la dialectique colonisateur-colonisé, oppresseur-oppressé, pour placer les pions de l’URSS en Afrique, Poutine a prédit que la Russie pourra sans trop de difficultés replacer ses relations avec l’Afrique à leur niveau de l’ère soviétique, époque où Moscou apportait au continent une « importante aide économique », assure encore Russia Today.

Les participants au Forum de Vladivostok ont encore pu voir Poutine assurer que Moscou ne s’était jamais posée en puissance colonisatrice en Afrique : « Notre coopération a toujours été fondée soit sur un terrain commun, soit sur le désir d’aider », a déclaré Poutine, en un hommage marqué à la politique soviétique.

Les pays africains ne se rappellent pas seulement l’aide soviétique de cette époque-là, mais aussi « la brutalité » de l’Occident. En 1957 encore, a déclaré le président russe, « des gens d’Afrique étaient emmenés en Europe dans des cages… On ne peut pas regarder ces images sans avoir les larmes aux yeux. Des enfants assis dans des cages, montrés à la vue de tous. Personne en Afrique ne l’oubliera jamais ».

 

Les « larmes » de Poutine accusent l’Occident et oublient la tyrannie soviétique

Des abus de ce type, il y en a eu. En 1958, peut-on cependant corriger grâce au « fact-checking » de snopes.com, peu suspect de complicité avec les colonisateurs, un « village congolais » avait été construit à la Foire internationale de Bruxelles (« Expo 58 »), peuplé de centaines d’« habitants » acheminés depuis l’Afrique pour montrer aux visiteurs comment vivaient les Noirs au Congo, montrant leurs techniques ancestrales d’agriculture et de ferronnerie, de tissage et de décoration. « Zoo humain » ? Non, répond Snopes : les Congolais venus en Belgique avaient choisi de venir de leur plein gré et n’étaient pas confinés au village. Voyant que certains visiteurs les considéraient comme des sortes de bêtes curieuses, la plupart ont décidé de repartir chez eux, et l’attraction a été fermée.

Mais pour ce qui est de comparer la curiosité dévoyée vis-à-vis de ces peuples aux manières de vivre si différentes avec la brutalité sans nom de tous les régimes communistes, à commencer par celui de l’URSS, Poutine ne s’y est pas hasardé. Le goulag, ce n’étaient pas quelques citoyens étrangers montrés aux foules, une foire aux monstres des temps où la « discrimination » n’était pas encore un gros mot : c’était la souffrance, la torture, la mort pour beaucoup, infligée à des millions de citoyens qui n’arrivaient pas à considérer la misère communiste comme une sorte de paradis. Et de ce « paradis », on ne s’échappait pas.

 

La haine contre l’Occident masque la barbarie communiste

Le sort des enfants en URSS sous Staline – pendant qu’on exhibait quelques centaines de Congolais à Bruxelles – transporte dans une autre dimension. Il y avait des enfants au goulag… Il y avait des barbelés et des cages… Une barbarie inimaginable avec ses raffinements de cruauté.

Et en Afrique ? En Afrique, s’il y a eu des crimes de la part des colonisateurs, et des abus spécifiques liés à la colonisation, il y a eu aussi le développement, l’éducation, la médecine, le dévouement des « French doctors » comme des religieux et des religieuses, la construction d’infrastructures, le cadeau d’une langue parlée et comprise dans le monde entier, l’apport du progrès technique, enfin et surtout la christianisation. Sans compter la fin de l’esclavage, dont les habitants de l’Afrique, blancs ou noirs, ont été les acteurs avant même l’arrivée des Occidentaux.

Lorsque les hommes de paille des Soviétiques et les tyranneaux communistes ont pris les commandes, après des révolutions attisées et armées par les Rouges, la misère a bien souvent pris le dessus. Les Africains l’auraient-ils oubliée, celle-là ?

Poutine a parlé plutôt de la volonté occidentale de « jouer aux patrons et d’imposer leurs politiques généralement néo-coloniales », en imposant notamment des prêts de « milliers de milliards de dollars ». Quand la Chine communiste accorde d’importants prêts, « achetant » des rails et des ports africains, cela interpelle moins Poutine…

 

Jeanne Smits