Conscient ou non, vous êtes coupable ! Le Kentucky Board of Nursing a décidé d’imposer à tous les infirmiers de l’Etat un cours sur les « préjugés implicites » concernant le « racisme structurel » dans les soins. Et malheur aux infirmiers qui ne s’y conforment pas : ils pourraient faire l’objet d’un acte disciplinaire.
Si chaque être humain doit considérer son homologue comme son semblable, tout également sujet de justice et de considération en tant que créé pareillement à l’image de Dieu, la perspective d’en faire un tel cheval de bataille révèle un combat bien plus pernicieux qui est celui du wokisme, issu en droite ligne du marxisme culturel. Il faut renverser les codes et générer une nouvelle forme de domination dont, in fine, les uns comme les autres seront les victimes.
Des « infirmiers universitaires ancrés dans l’idéologie woke »
Selon un rapport du Washington Examiner, la Kentucky Nurses Association a même donné une sorte d’ultimatum pour contraindre les infirmiers à terminer cette « formation continue obligatoire » contre le racisme avant le 1er juillet.
« Ils ont à peu près dit que nous étions tous coupables d’être racistes, que nous devions examiner la façon dont nous prenions soin des patients et changer nos comportements parce que nous prodiguions des soins de moindre qualité », a confié au journal une infirmière anesthésiste avec 40 années d’expérience… Et inutile de présumer de sa bonne volonté ! Conscient ou non, vous êtes coupable. C’est le premier enseignement de la formation : « les meilleures intentions ne résoudront pas les préjugés implicites dans les soins de santé ».
Parce que si le racisme manifeste est visé (lynchage, peinture de croix gammées, « harcèlement public des [personnes de couleur] ne parlant pas l’anglais »), le racisme caché est, presque encore plus, l’objet de toutes les attentions, car il peut aisément et même sans qu’on le veuille – puisqu’on nous dit qu’il peut être inconscient – concerner tout le monde.
Le racisme caché, c’est « le silence blanc », « la négation du racisme institutionnel », la « négation du privilège blanc », la « théorie du bootstrap » (le fait qu’on ne puisse progresser que par sa seule responsabilité), les « programmes scolaires euro-centriques », « la militarisation de la blancheur », l’obsession pour les POC (people of color), la « revendication du “racisme inversé” » (racisme anti-blanc)… Demander, par exemple, à une femme noire d’où elle vient, est du racisme caché.
« Reconnaître l’histoire du racisme dans les soins de santé »
Le cadre américain est, certes, encore différent de celui d’Europe – le racisme y a son histoire, prégnante. Et il est toujours foncièrement mauvais. Mais il est devenu un outil révolutionnaire et un fabuleux fourre-tout. « Afin de conduire à un changement significatif, toute exploration des préjugés implicites doit être située dans le cadre d’une conversation beaucoup plus large sur le racisme et les préjugés », dit la formation. Et de sortir une image du Ku Klux Klan brûlant une croix.
Quel impact quand on a travaillé, comme cette infirmière, quarante ans sur le terrain, à arpenter nuit et jour les chambres des malades ? Quel impact, quand votre hiérarchie vous informe que le plus important, l’essentiel de votre travail réside dans l’implicite de vos mots à l’égard de vos collègues ou de vos patients d’autres couleurs ?
Car il va sans dire que cette formation est à l’usage des « Blancs », pour les « Blancs ». Il faut déceler, quand ce n’est pas fabriquer le plus souvent, le sacro-saint « whitesplaining » : l’Urban Dictionnary nous explique que c’est l’explication paternaliste donnée par les Blancs à une personne de couleur, définissant ce qui devrait ou ne devrait pas être considéré comme raciste, tout en exhibant leur propre racisme inconsciemment. De quoi devenir fou, ou en tout cas muet.
« Parce que tu n’es pas d’accord avec le seul dogme, tu es fichu, tu n’as plus de valeur, tu n’en vaux plus la peine », a confié encore l’infirmière interviewée. On ne sait pas quelle sera la sanction pour ceux qui sont sortis de la salle avant la fin de la formation (et il y en a eu), donnée par des infirmiers universitaires qui n’ont pas foulé les couloirs des hôpitaux depuis des décennies, mais certains craignent le potentiel non renouvellement des licences de postes, bien que la Kentucky Nurses Association (KNA) ait nié toute menace sur ces dernières.
Des préjugés contre les POC (persons of color)
L’origine de ces engouements idéologiques ? Les émeutes de Black Lives Matter, en 2020, qui ont poussé l’American Nurses Association (ANA), l’Association américaine des infirmiers, à se réorienter violemment vers cette idéologie. Elle doit en donner aujourd’hui des gages, car – elle le rappelle elle-même – de 1916 à 1964, elle « a délibérément et systématiquement exclu les infirmières noires », parce que l’adhésion se faisait par le biais d’associations d’Etat et de district, dont certaines interdisaient les infirmières noires.
Les grands sondages sont passés par derrière, pour mettre en lumière les fautes des Blancs, et revernir couleur woke le blason hospitalier. L’enquête de la Fondation Robert Wood Johnson, parue en mai 2023, sur les expériences des infirmières et les perceptions de la discrimination, relève une culture avérée de la suprématie blanche dans les soins infirmiers.
Encore qu’il faille regarder de plus près les chiffres proposés. On y affirme que les infirmières noires sont presque deux fois plus susceptibles que les infirmières blanches de dire que leur école avait une culture de racisme et (ou) de discrimination et autant à déclarer avoir subi des micro-agressions de la part de leurs collègues. Mais quand on avise le prisme d’analyse du « racisme caché », ces chiffres sont déjà à relativiser. Et quand il s’agit des agressions des patients, les chiffres se rapprochent : 74 % des infirmières noires affirment en avoir subi, contre 59 % des infirmières blanches. C’est dire si les patients non blancs sont eux aussi capables de racisme, et qu’on ne peut l’ostraciser.
Mais de cela, il ne faut pas parler ou du moins, ce racisme-là est toujours défendable – quand ce n’est pas même de l’humour.