Raul Castro reçu par le pape François : le président de Cuba reste communiste mais envisage de revenir à l’Eglise

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Le président de Cuba s’est entretenu pendant près d’une heure avec le pape François, dimanche, lors d’une visite historique au chef de l’Eglise catholique à Rome : c’était la première fois que le nouveau leader communiste de l’île des Caraïbes se rendait au Vatican. Raul Castro avait un premier objectif : remercier le Saint-Père d’avoir servi d’intermédiaire pour assouplir les relations bilatérales entre Cuba et les Etats-Unis. Une « normalisation » lourde de sens. Mais au-delà de la diplomatie, il s’agissait de donner un visage à un rapprochement du communiste Castro avec le Eglise catholique, où Castro envisage de « revenir », « priant » déjà.
 
Sans renoncer à ses choix politiques, cependant…
 
« Je suis communiste, du Parti communiste cubain », a précisé Raul Castro à la presse à l’occasion de cette réception historique par le pape François. C’est en restant dans la droite lignée de l’héritage de son frère Fidel, dans un pays où la persécution des opposants n’est pas terminée, que Raul envisage ce rapprochement avec l’Eglise.
 

Raul Castro le communiste prie et envisage de revenir à l’Eglise

 
Le communisme ne serait-il donc plus un système politique « intrinsèquement pervers » ? Peut-on envisager la Praxis sans l’athéisme ? Cela suffit-il à blanchir un système qui a tué des centaines de millions de personnes à travers le monde, et fait peser sa tyrannie sur Cuba pendant des décennies ? Quel crédit accorder à une idéologie qui tente d’enterrer la notion de vérité pour ériger le bien du Parti en valeur suprême ? La conversion peut-elle s’envisager sans rejet des erreurs antérieures ?
 
Raul Castro et le pape François se sont entretenus pendant près d’une heure : leur réunion a dépassé en durée celle de 52 minutes accordée au Barack Obama en 2014. Encore la rencontre avec le président des Etats-Unis s’est-elle tenue par le truchement d’un interprète. Raul et François ont devisé en espagnol, et en privé, faisant de la rencontre la plus longue accordée par le pape à un chef d’Etat, ses déjeuners avec la présidente argentine exceptés.
 
S’adressant à la presse à l’issue de cette audience, le président de Cuba a indiqué qu’il avait « remercié » le Saint-Père pour sa contribution au rapprochement entre Cuba et les Etats-Unis. Un peu plus tard, après sa réception par le Premier ministre italien, Raul Castro a de nouveau rencontré la presse aux côtés de Matteo Renzi. Il s’est alors étendu sur la « sagesse et la modestie », et « toutes les vertus » du pape François.
 

Le président de Cuba fait l’éloge du pape François

 
« Je lis tous ses discours », a-t-il assuré. « Si le pape continue à parler ainsi », a-t-il ajouté, il envisage de revenir lui-même à l’Eglise catholique – « et ce n’est pas une blague ». Il assistera à « toutes les messes » qui seront célébrées par le pape François lors de sa visite à Cuba, programmée pour le mois de septembre prochain.
 
Ce n’est pas la première fois qu’un pape rendra visite à l’île communiste, mais le contexte est différent : là où Jean-Paul II réclamait la liberté de pratique religieuse des catholiques cubains face à un pouvoir perçu comme persécuteur, François semble apporter son soutien à un pouvoir au-dessus de tout soupçon. Et que cela soit vrai ou faux, c’est l’image qui reste.
 
Raul Castro qui se dit toujours communiste envisage donc désormais de faire des pas supplémentaires vers l’Eglise catholique, en raison des discours de François. Estime-t-il donc que ce dernier est en train de faire changer le visage de l’Eglise, qu’il marque une rupture avec son enseignement ? Ce n’est pas pour autant que le président cubain a raison, mais la démarche pose des
questions : la religion catholique serait-elle en train de devenir « communisto-compatible » ?
 
Raul Castro a qualifié sa visite au chef de l’Eglise catholique comme « la visite la plus importante  » de sa vie – « vraiment ». Comme présent au Saint-Père, il avait apporté un tableau monumental de l’artiste cubain Alexis Layva Machado (« Kcho ») qui représente une grande croix faite de plusieurs barques devant laquelle prie un enfant. L’artiste a précisé que le tableau s’appelle « Miracle » et que la tragédie des milliers de personnes qui tentent de rallier l’Europe depuis l’Afrique l’avait inspiré.
 

Anne Dolhein