L’imam d’Al-Azhar, le roi d’Arabie Saoudite et Al-Sissi appellent à réformer l’islam

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Le discours de l’imam de l’université sunnite d’Al-Azhar, le cheikh Ahmed al-Tayeb, lors d’une conférence donnée à la Mecque dimanche dernier est l’un des textes les plus importants adressés au monde musulman aujourd’hui. Il a, comme nous l’avons évoqué hier, parlé d’un besoin urgent de réformer l’enseignement de l’islam dans les écoles et dans les universités pour corriger les interprétations extrémistes du Coran et de la Sunna.
 
Cette volonté de trouver une nouvelle manière d’interpréter le Coran et la Sunna avait déjà été exprimée auparavant par des enseignants musulmans, mais cette fois-ci, c’est une autorité sunnite incontestable qui l’affirme.
 
L’imam d’Al-Azhar veut désormais réformer l’islam à tous les niveaux de la société et commençant par la base, à travers l’éducation mais également dans le cadre des enseignements religieux.
 

Al-Tayeb appelle à cesser la guerre entre chiites et sunnites pour l’unité du monde musulman

 
C’est d’abord à la guerre entre sunnites et chiites que l’imam s’est attaqué, appelant les musulmans à cesser d’appeler « mécréant » un autre musulman : il a appelé à la fin de l’ « excommunication » des musulmans entre eux. Pour les sunnites, les chiites sont des mécréants. Il ne passe guère de mois au Pakistan sans qu’une bombe vise une mosquée chiite ; parfois c’est l’inverse, et un lieu sunnite est visé. Même chose en Irak, au Yémen, au Bahreïn ou parfois en Iran. Beaucoup de musulmans pensent que ceux qui ne partagent pas leur interprétation de l’islam doivent être éliminés. La situation est paradoxale : c’est une autorité sunnite qui condamne ces accusations et ces actes alors même que les sunnites sont plus prompts à attaquer les chiites que l’inverse.
 
Mais l’imam s’adressait aux intellectuels religieux sunnites et chiites pour qu’ils trouvent les valeurs communes capables d’unir le monde musulman.
 

Bannir les interprétations littérales des textes musulmans pour réformer l’islam

 
Le cheikh Ahmed al-Tayeb s’est ensuite attaqué aux interprétations littérales des textes musulmans, qu’il a accusé d’être sources de division au sein du monde musulman. Une première révolutionnaire.
 
Il s’est contenté d’évoquer des « groupes extrémistes » qui font de « mauvaises interprétations du Coran ou de la Sunna : difficile d’en dire plus devant des autorités qataries, saoudiennes ou malaysiennes qui en font exactement cette lecture… Mais le message est passé.
 
L’imam Tayeb n’a pas nommé l’Etat islamique mais « des groupes extrémistes », manière sans doute d’y inclure salafistes, Frères musulmans ou wahhabites.
 
Se visait-il aussi lui-même, puisqu’il avait appelé quelques jours plus tôt à « tuer, crucifier et couper les membres » des combattants de l’Etat Islamique, « conformément au Coran »…
 

L’imam d’al-Azhar insiste également sur l’ « image négative » de l’islam renvoyée dans le monde

 
Pour une fois, ce n’est pas l’« islamophobie occidentale » qui a été pointée du doigt, mais bien la responsabilité d’un grand nombre de musulmans dans cette image négative.
 
Cela n’a pas empêché l’imam d’al-Azhar de dénoncer ensuite « le colonialisme mondial allié au monde sioniste » comme responsable des tensions internes dans le monde musulman.
 
Selon lui, les Etats-Unis, Israël et les pays occidentaux se servent indéniablement des horreurs dont sont capables certains musulmans pour leurs intérêts mais cela n’enlève rien au caractère intrinsèquement violent de l’islam.
 
De son côté, le président égyptien Al-Sissi a ordonné des raids aériens contre l’Etat islamique après l’assassinat de 21 Coptes. Il aurait pu le faire à de multiples occasions ; il a choisi la mort de chrétiens pour affirmer qu’il défendrait tous les citoyens égyptiens.
 

L’égyptien Al-Sissi et le roi d’Arabie Saoudite Salman montrent des volontés de changement

 
C’est peut-être un premier pas vers une reconnaissance de l’égalité entre les citoyens musulmans et chrétiens en Egypte, qui est pour l’heure loin d’être effective.
 
Même le roi Salmane d’Arabie Saoudite a parlé en ce sens, dans une lettre lue lors de la conférence donnée à la Mecque : « Le terrorisme est un fléau, produit de l’idéologie extrémiste » a-t-il affirmé. Il y voit une menace pour le monde musulman et pour le monde entier.
 
Ce sont donc les principales autorités musulmanes de la région : religieuse pour Al-Azhar, politique pour le roi d’Arabie Saoudite et populaire pour Al-Sissi qui on exprimé une volonté de réformer l’islam. C’est bien une révolution qui est en marche.