L’après-“Charlie” : restructurer l’islam ?

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Avec l’annonce de mesures sécuritaires accrues, et l’imposition d’un nouveau dogme républicain – « je suis Charlie » – l’« autre » retombée des attentats islamistes de la semaine est le renforcement d’une demande de révision de l’islam. Une restructuration qui le rendrait soluble dans la République, certes, mais aussi dans le relativisme mondial : il faut en passer par là pour « émasculé » l’islam qui pourrait alors être toléré dans le cadre de la spiritualité globale, panthéiste, écologiste professée sans trop de détour par les élites. Restructurer l’islam ? Il s’agit plutôt de le vider de sa substance.
 
Mais cette entreprise pose bien des questions, puisqu’elle repose non sur l’examen critique de l’islam – est-il vrai ou faux ? – mais sur une adaptation à la « modernité » qui prétend ne pas pouvoir connaître la vérité. Cette adaptation supposera nécessairement le rejet non seulement de la « jurisprudence » de l’islam, mais d’une relecture et d’une réinterprétation du Coran qui est interdite puisqu’il s’agit de la parole éternelle (quoique contradictoire) d’Allah. Au nom de qui ? De quoi ?
 

Restructurer l’islam face à l’horreur

 
Cette dernière question est sans doute la plus facile. Au nom de quoi ? D’une horreur largement partagée devant la boucherie de la semaine dernière, à Charlie, à Vincennes, contre des policiers français… Cette même horreur (à géométrie variable) qui accueille les récits d’autres horreurs commises au nom de l’islam, contre les chrétiens, contre d’autres musulmans… Notez cependant qu’une frange de l’islam les justifie et les applaudit. Mais comme nous sommes des êtres humains, que nous aimons nos pères, nos mères, nos enfants, nos proches, le sentiment de compassion tout naturel que suscitent ces informations omniprésentes actuellement modifient l’opinion au cœur même de l’islam. Le moment est donc propice. Les horreurs sanglantes et barbares en sont peut-être même la condition indispensable.
 
Qui ? Le mouvement est large, il passe par Tony Blair et autres Zapatero, n’y revenons pas. Aujourd’hui, la nouveauté est que des dignitaires de l’islam y souscrivent, osant l’impensable : prôner une restructuration qui est en théorie incompatible avec leur religion par nature totalitaire, puisqu’elle réglemente tout dans la vie privée et publique, et voue explicitement à la damnation tous ceux qui ne professent pas le dieu unique, Allah.
 
Après les déclarations du président égyptien Al-Sisi appelant l’islam à faire sa « révolution religieuse » évoquées ici sur reinformation.tv, et dans la suite de Charlie, des « clercs » musulmans de tout premier plan en Arabie Saoudite – l’alliée de l’« Occident » – ont condamné les attentats et récusé toute idée de justification des tueries de l’islam. Cela ne manque pas de sel de la part d’un islam wahhabite qui impose la charia avec la plus grande fidélité à ses préceptes violents et qui vendredi dernier, a exécuté la première de 20 séries de 50 coups de fouet contre un jeune homme pour avoir publiquement critiqué des clercs proches de la monarchie saoudienne : il passera 10 ans en prison.
 

Pressions sur l’islam de la « base »

 
Mais le musulman de base – qui peut être blessé comme les chrétiens le sont par le ton ordurier et la profanation de tout ce qu’il a de plus sacré dans les colonnes d’un journal comme Charlie ¬– s’interroge de plus en plus. Au Pakistan, l’homme de la rue condamne de plus en plus « l’extrémisme et le militantisme », souligne breitbart.com. C’est un pays où la loi contre le blasphème prévoit la peine capitale pour les « blasphémateurs » – telle la chrétienne Asia Bibi qui avait demandé à des compagnes de labeur musulmanes ce que Mahomet avait fait pour elles, par rapport à Jésus qui a donné sa vie pour ouvrir le ciel aux hommes.
 
Dès jeudi dernier, la chaîne panarabe al-Arabiya donnait la parole à un représentant de la prestigieuse université sunnite al-Azhar du Caire qui réclamait ouvertement une restructuration de l’islam : l’université, a-t-il déclaré, travaille à la modernisation du discours religieux, notamment en réinterprétant les textes à la lumière du contexte, en fonction du temps et du lieu. L’interprétation littérale ne sera plus de mise. C’est bien plus qu’une restructuration ; une révolution. C’est peu de dire qu’elle irrite certains, que ce soient les tenants de l’Etat islamique ou certains représentants des Frères musulmans en Egypte qui l’avouent ouvertement. Mais c’est une tendance, et une tendance approuvée par le concert des nations démocratiques qui se sont déjà chargées de réinterpréter l’islam en introduisant une coupure entre l’« islam radical » et l’islam tout court, nonobstant la réalité.
 

L’islam rénové s’exprime dans le New York Times

 
Une pleine page de publicité financée par le Gatestone Institute américain – think tank globaliste – a été publiée par le New York Times sous le titre : « Que peuvent faire les musulmans pour se réapproprier leur “belle religion” ? » Rappelant « les décapitations et la sauvagerie de l’Etat islamique, les mutilations génitales féminines, les crimes d’honneur, les enlèvements de jeunes filles par Boko Haralm, l’exécution d’innocents en Iran, le massacre de chrétiens en Egypte et en Afrique, de Yazidis et de Kurdes en Irak et en Syrie, l’antisémitisme qui s’étend et les autres crimes contre l’humanité commis par ceux qui se réclament de l’islam », le communiqué entend répondre à la question que beaucoup se posent : « L’islam est-il une religion de paix ? »
 
Le texte du communiqué a été écrit avant les attentats de Paris, ses rédacteurs et la presse internationale se félicitent de ce qu’il réponde aussi parfaitement à l’actualité…
 
Les signataires, universitaires et responsables de mouvements musulmans « pour la démocratie », tous installés dans des pays occidentaux (Etats-Unis, Canada, Angleterre, Danemark), s’affirment partisans d’un islam respectueux des « droits de l’homme », de l’« égalité de genre », de la « liberté de conscience ». Ils récusent l’installation d’un « Etat islamique », où que ce soit : « La théocratie, particulièrement l’islamisme, est un échec patent. » L’islamisme, déplorent-ils, « ne permet pas l’égalité de tous les êtres humains quelle que soit leur race ou leur religion, il faut donc le rejeter ». Ils réclament une « interprétation pluraliste de l’islam ».
 

L’islam soluble dans le relativisme à la “Charlie”

 
Voilà qui s’aligne sur tous les « dogmes » de l’idéologie maçonnique des droits de l’homme : ce texte est parfaitement compatible avec le relativisme qui est devenu l’aune et la mesure de tout, et qui de fait, interdit toute religion qui se prétend seule vraie.
 
C’est tout le problème. Le critère de la vérité a été délibérément écarté, pour céder la place à une praxis nouvelle, où le pluralisme rend obsolètes les principes d’identité (ce qui est, est, ce qui n’est pas n’est pas) et de non-contradiction : « Il est impossible qu’un même attribut appartienne et n’appartienne pas en même temps et sous le même rapport à une même chose », disait Aristote.
 
Or si la spiritualité globale peut s’accommoder d’expressions de foi différentes, c’est à condition de ne pas en faire le tri et d’accepter comme ayant égale valeur les affirmations que Dieu et Un et Trine, qu’il n’y a pas d’autre dieu qu’Allah, ou qu’il faut adorer l’oignon, à condition que tous soient d’accord sur les points relevés par les musulmans du New York Times et qu’en outre ils soient prêts à sacrifier à la nouvelle idole, la Terre-Mère, à travers les préceptes de l’écologie.
 

S’il n’y a pas de vérité islamique…

 
La vraie question, et la seule solution en vérité, est de se placer du point de vue de la vérité, de la critique par la raison mais de la raison entière qui ne refuse pas d’être illuminée par la Foi. Le discours de Ratisbonne est plus que jamais d’actualité : il s’agit de voir si l’islam porte en sa propre « doctrine » la violence qui s’exprime si manifestement aujourd’hui, et si à l’inverse des abus commis au nom du Christ correspondent à son enseignement.
 
On a beau proclamer partout la « liberté d’expression », cet examen-là est aujourd’hui impossible parce que la dictature du relativisme l’interdit.
 
Et cela mérite réflexion : si l’on peut exiger aujourd’hui que l’islam se vide de sa substance pour se conformer au relativisme, il n’y a pas de raison de ne pas en faire de même à l’égard du christianisme et surtout de la religion catholique.
 
Vous aurez noté que le processus est déjà largement en marche.