Il y a une ambiguïté dans l’intitulé de la réunion annuelle qui se déroule depuis six ans à Dubaï : en anglais, World Government Summit peut signifier aussi bien « Sommet mondial des gouvernements » (c’est la traduction officielle française) ou « Sommet du gouvernement mondial », ce qui renvoie au globalisme politique le plus outrancier. On aurait tort de rejeter d’emblée cette deuxième interprétation, vue la volonté affichée par les organisateurs d’établir là un carrefour de l’innovation, de la technologie, des meilleures pratiques pour le bonheur et le développement humains où chaque gouvernement peut venir faire part de ses expériences en vue de dessiner un avenir à tout le moins partagé. Ce n’est pas un hasard si le communiqué de clôture de l’édition 2018 fait état d’un « appel aux institutions de se réaligner sur le Nouvel Ordre Mondial » et si la dénonciation de la politique des Etats-Unis a servi de trame à bien des interventions.
Les changements actuels dans l’économie et les relations commerciales à l’heure du Bitcoin (présenté comme une chance) et de l’e-commerce servent de justificatif à cette réflexion commune au sommet et aux modifications qu’il veut préparer : c’est tout l’avantage de la « disruption », mot à la mode s’il en est.
Le Sommet mondial gouvernements de Dubai communique sur le Nouvel Ordre Mondial
Une « disruption » que les milliers de participants ont été invités à percevoir de manière positive. Il a été question d’intelligence artificielle, de transhumanisme, de l’avènement des cyborgs : une des conférences en marge des quelque 130 réunions officielles mettait en scène l’artiste Neil Harbisson, qui s’est fait implanter une antenne dans la tête et prétend non seulement « voir » les infrarouges et les ultraviolets mais qui va jusqu’à recevoir des conversations téléphoniques et autres informations satellitaires, voire des images extra-planétaires, directement dans son cerveau. Harbisson est le cofondateur de la Cyborg Foundation, étant lui-même le premier homme à avoir été officiellement reconnu par un gouvernement comme un cyborg.
Voilà pour le côté plus baroque. Mais cette réunion rassemble les grands noms des institutions internationales, du président de la Banque mondiale Jim Kim à la directrice de l’UNESCO Audrey Azoulay, sans oublier Christine Lagarde, les représentants des très grands médias, et l’ancien vice-ministre chinois des affaires étrangères, communiste avéré donc qui est aujourd’hui sous-secrétaire général de l’ONU, Liu-Zhenmin. Il est quant à lui le « M. Développement Durable » de toute cette affaire : le réchauffement climatique n’est jamais loin. Le « futuriste » Jacques Attali était là, bien sûr, mais aussi Edouard Philippe.
La forte présence médiatique n’a pas entraîné une couverture médiatique internationale correspondante, c’est le moins que l’on puisse dire.
Ce n’est plus un complot si cela se fait en plein jour !
Il faut aussi noter que cette réunion mondialiste, ouvertement, est marquée par la forte présence islamique, et ce d’autant que le Sommet mondial des gouvernements a été créé à l’initiative d’une « équipe d’experts » musulmans ; son dirigeant exécutif est Omar Sultan Al-Ulama et son président pour l’édition 2018 se nomme Mohammed Abdullah Al-Gergawi, actuel « ministre de l’Avenir » aux Emirats arabes unis… Les parterres grouillaient de gandourahs et de keffiehs.
Parmi les 280 intervenants, Klaus Schwab du Forum économique mondial a évoqué lors de la session d’ouverture l’importance capitale de l’» égalité de genre », à croire que c’est la réponse numéro un aux problèmes du monde. Mais parmi les thèmes récurrents il était aussi beaucoup question au long des trois jours de Sommet, du 11 au 13 février, de la nécessité de contrer la politique de l’» America First ». Et de mettre davantage d’étatisme là où il y a de la liberté. Robert DeNiro, en particulier, s’est employé à ridiculiser les Etats-Unis, qu’il a qualifiés de « pays arriéré, un lieu où la science régnait jadis et qui dernièrement a été remplacée par l’ignorance ».
Le Nouvel Ordre Mondial passe par les soins et l’éducation étatisés
Pour Al-Gergawi, il s’agit ainsi de « créer de nouveaux modèles de coopération internationale » en vue de « l’objectif commun » à atteindre. Cela passe notamment par l’étatisation de l’éducation et des soins. Le directeur de l’OMS, l’Ethiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus, a ainsi plaidé pour la « santé universelle », assurant que l’installation d’un système de soins gouvernemental « est de la responsabilité de chaque pays et de chaque gouvernement national ». Celui-là même qui voulait nommer le marxiste Robert Mugabe, rien moins, comme ambassadeur de bonne volonté de l’OMS (peut-être pour remercier la Chine d’avoir soutenu sa nomination), et qui a court-circuité les procédures normales pour mettre une Russe à la tête de la lutte contre la tuberculose alors que la Russie fait partie des nations où la lutte contre les maladies infectieuses brille plutôt par son inefficacité.
Le sheikh Abdullah bin Zayed, ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale des Emirats arabes unis, a pour sa part plaidé pour un droit de regard croissant de l’Etat sur l’éducation, prônant la mise en place de normes éducatives gouvernementales « dès la crèche et la maternelle ». Il faut « repenser l’éducation », a-t-il insisté, et ce de manière « inédite » pour mettre en place une « nouvelle stratégie nationale » permettant à un pays comme le sien de fixer les exigences et les objectifs à la fois dans les secteurs publics et privés, de manière à former les travailleurs de demain.
Le Sommet mondial des gouvernements à Dubai est aussi un sommet de la gouvernance globale
Alex Newman du New American commente : « A l’évidence, cela est dans la ligne de la rhétorique de l’idéologie animant les systèmes communistes d’éducation et d’endoctrinement du passé, que ce soit en Union soviétique et à Cuba ou en Chine et au Cambodge. Mais en réalité, l’idée saugrenue selon laquelle des planificateurs centraux seraient capables de prédire ce dont l’économie aura besoin dans 20 ans, et puissent façonner le “capital humain” (les enfants) à cette fin a été totalement discréditée. Hélas, les globalistes à travers le monde, à l’ONU et même au département de l’Education des Etats-Unis n’ont jamais capté cette petite mise à jour. » Mais il est vrai que près de 90 % de la force de travail des émirats est aujourd’hui employée par le gouvernement, comme l’a souligné le sheikh Zayed.
C’est dans ce genre de réunions que se façonne l’avenir. Et puisque personne n’en parle, il est urgent d’en parler !