Couvrant les 7/10e du globe, les océans jouent un rôle majeur dans le climat – mais ne sont pas pour autant suffisamment prise en compte dans les modèles actuels de prédiction de « changement climatique », affirme une nouvelle étude publiée par Global Biogeochemical Cycles, une revue scientifique de l’American Geopphysical Union. En particulier, les processus biochimiques régissant l’absorption de dioxyde de carbone depuis l’atmosphère sont tellement complexes qu’ils ont été mal intégrés dans ses modèles. Et il apparaît que les océans assurent une bien plus grande stabilité par rapport au climat que ces modèles ne le faisaient penser.
Pour l’auteur de l’étude, Pearse Buchanan de l’Institude for Marine and Antarctic Studies de l’université de Tasmanie, il est clair que les équations jusqu’ici utilisées étaient par trop simplifiées et aboutissent donc à une mauvaise évaluation de l’absorption de CO2 par les océans. Ainsi les modèles océaniques ont présenté une image faussée de l’écosystème marin sans chercher à mieux comprendre son fonctionnement.
Pearse Buchanan l’affirme : les modèles climatiques utilisés méconnaissent la stabilité des processus océaniques
La nouvelle étude a eu recours à une nouvelle représentation dynamique qui a permis à l’équipe de chercheurs de constater que l’océan peut assimiler et stocker le carbone de manière stable quelle que soient les changements globaux enregistrés pour diverses propriétés physiques, tels la température, la salinité et les courants. La quantité de CO2 stockée dans l’océan se révèle deux fois moins sensible aux changements physiques qu’on ne le pensait jusqu’à présent sur la foi d’équation simplistes.
Il apparaît donc qu’une augmentation de la température, accompagnée d’une réorganisation des courants océaniques ont moins d’effet sur la capacité de l’écosystème marin à capter de dioxyde de carbone et à le maintenir en eaux profondes : les processus biologiques permettent à l’évidence un amortissement des phénomènes qui font que des propriétés physiques importantes sont moins sensibles aux changements globaux qu’on ne l’a affirmé jusqu’ici.
Pearse Buchanan explique : « En raison de son grand volume et de l’étendue de sa surface, les processus biogéochimiques de l’océan constituent le principal moyen de contrôle sur les niveaux de CO2 et d’autres gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Le phytoplancton marin absorbe le carbone de la même manière que les arbres sur la terre, et lorsqu’il meurt et tombe au fond de l’océan, le carbone qu’il contient est mis à l’abri pendant des milliers d’années. Ce processus est connu sous le nom de pompe biologique. Beaucoup de modèles plus anciens ne prennent en compte que de façon très limitée à la manière dont la pompe biologique peut-être affectée par les propriétés chimiques et physiques, qui elles-mêmes peuvent être affectées par le changement climatique. Mais la pompe biologique est en réalité le résultat de nombreux processus complexe, chacun ayant sa propre sensibilité aux conditions de l’environnement. »
L’océan fait le poids face au changement climatique : sa capacité à capter le CO2 sous-estimée par l’utilisation d’équations simplistes
De la manière dont le phytoplancton absorbe le CO2 et l’exporte vers les fonds océaniques dépend l’évolution du CO2 atmosphérique au cours des millénaires à venir, précise Buchanan. Ce sont donc les diverses sensibilités au processus physique en cours qui permettent de s’en faire une idée : « En améliorant la manière dont nous simulons la pompe biologique de l’océan, nous améliorons le modèle mais en même temps, nous révélons cette résilience inattendue, ou les changements d’échelle globale affectant les propriétés physiques de l’océan ont un moindre effet sur la pompe biologique. »
En somme, même si le climat se réchauffe – ce qui reste à prouver – et que sa stratification supérieure s’accentue, « l’océan va continuer de jouer fortement son rôle de collecteur de CO2 atmosphérique », selon Buchanan.