TikTok, outil d’influence au service de la Chine communiste

TikTok influence Chine communiste
 

Du soupçon on passe de plus en plus à la certitude : en Chine, le pouvoir – ce qui équivaut à désigner le Parti communiste chinois (PCC) – utilise le réseau social TikTok au service de ses intérêts. Une nouvelle étude vient d’établir que l’algorithme de TikTok favorise les contenus favorables au Parti communiste chinois et supprime les contenus critiques à son égard. C’est ce qu’a rapporté mardi The Hill, citant une étude du Network Contagion Research Institute (NCRI) de l’université Rutgers, l’une des principales universités d’Etat des USA, sise dans le New Jersey.

L’étude, publiée sous le titre The CCP’s Digital Charm Offensive, affirme avoir trouvé des « preuves circonstancielles convaincantes et solides » selon lesquelles le contenu de TikTok est manipulé par le gouvernement chinois. Il ne s’agit pas de preuves définitives, tempère Christopher Wray, car de telles opérations seraient « difficiles à détecter ». Mais les indices indirects ne manquent pas.

 

Les contenus publics de TikTok révèlent un penchant pour la Chine communiste

C’est justement à travers les contenus publiés que l’on constate un penchant favorable vis-à-vis de la Chine et à son gouvernement. L’étude a permis d’établir qu’une grande partie du contenu pro-chinois provient d’entités liées à l’Etat, notamment des médias et des influenceurs, tels que des blogueurs touristiques qui parlent avec lyrisme de régions chinoises comme le Xinjiang, où le pouvoir communiste a emprisonné plus d’un million d’Ouïghours et d’autres minorités, principalement musulmanes.

« Cela suggère que le contenu de TikTok peut contribuer à la manipulation psychologique des utilisateurs, ce qui correspond à l’objectif stratégique du PCC de façonner des perceptions favorables parmi les jeunes publics », indique l’étude.

Une précédente analyse publiée par le NCRI en décembre dernier avait déjà examiné le volume de messages contenant certains hashtags – tels que « Ouïghour », « Xinjiang », « Tibet » et « Tiananmen » – sur TikTok, Instagram et YouTube. Ce rapport a révélé des anomalies dans le contenu de TikTok en fonction de son alignement sur les intérêts du gouvernement chinois, avec par exemple moins de références aux manifestations de Hong Kong et des Ouïghours contre le gouvernement chinois que sur Instagram.

 

TikTok, relais assumé de l’influence chinoise

La nouvelle étude sur « L’offensive de charme » opérée sur TikTok a créé 24 comptes visant à découvrir le parcours qu’un utilisateur américain de 16 ans serait amené à suivre en fonction des premières réponses apparaissant en réponse aux quatre mots-clefs cités ci-dessus et des vidéos proposées par l’algorithme du réseau social. Dans 61 à 93 % des cas, les résultats de recherche étaient focalisés soit sur un contenu flatteur pour le pouvoir chinois, soit de nature à détourner le regard en proposant du contenu sans rapport, tandis que les contenus critiques à l’égard du gouvernement communiste étaient peu proposés.

TikTok, qui vise avant tout un public jeune, compte plus d’un milliard et demi d’utilisateurs dans le monde dont l’approche de la réalité peut ainsi être déformée. Il faut préciser que le réseau social est de création chinoise : strictement interdit en Chine elle-même, il s’adresse délibérément à la jeunesse étrangère ; Clémentine Jallais rappelait il y a peu que TikTok est géré par la société ByteDance, qui est liée au complexe militaro-renseignement-industriel du Parti communiste chinois. Elle fait l’objet de pressions croissantes pour vendre ses actifs américains sous peine de se voir interdire définitivement l’accès aux internautes des Etats-Unis.

Un « soft-power » qui cherche à obtenir des résultats – un changement des mentalités – sans coup férir à travers un flux incessant de vidéos courtes et abêtissantes dont l’utilité en termes de propagande est affirmée par les stratèges chinois eux-mêmes.

Pour orienter la pensée… ou l’annihiler.

 

Anne Dolhein