Un immeuble de bureaux aussi hi-tech qu’il est flambant neuf vient d’ouvrir ses portes en Suède. « Ouvrir ses portes » est à entendre de façons diverses. Le visiteur occasionnel y entre comme dans n’importe quelle société – en attendant qu’on lui ouvre ou en se manifestant à l’accueil. Mais les employés des sociétés qui y dont hébergées se sont vu proposer la possibilité de se faire « pucer » : il leur suffira de présenter leur main pour déverrouiller portes et photocopieuses. Pour cela, ils se font implanter une puce RFID (identification par radio-fréquence) sous la peau entre le pouce et l’index.
Bientôt – leur font miroiter les promoteurs du projet – ils pourront même payer leur petit noir à la « cafète » en montrant… patte blanche ? Voilà qui prouve en tout cas que les fonctions de la puce RFID sont évolutives. Programmables de l’extérieur. On sait seulement comment cela commence. Et ces Suédois vont devoir vivre avec.
La puce RFID choisie et désirée dans les entreprises
700 personnes qui travailleront à terme dans l’immeuble suédois Epicenter sont à terme concernées par le programme mis en place sur la base du volontariat. Le geste est simple, un peu plus douloureux qu’une piqûre. Mais la puce RFID, de la taille d’un grain de riz, est implantée théoriquement ad vitam. Comment ne pas penser au « signe de la Bête » ?
Big Brother à la fête
Comme il faut « aimer Big Brother » – ce sont les derniers mots de 1984 – le puçage est donc « choisi », accepté, recherché. Il a même bénéficié d’une mise en scène pour le rendre désirable : le directeur de l’ensemble de bureaux Epicenter s’est fait implanter une puce RFID sur scène, lors d’une cérémonie publique. Le reporter de la BBC qui assistait à la « fête » a accepté de se faire « pucer » lui aussi, histoire de pouvoir vraiment parler d’expérience.
Des bio-hackers suédois veulent alerter sur le puçage
Le plus paradoxal, c’est que l’opération de « puçage » a été confiée à un groupe de « bio-hackers » suédois : le Swedish Biohacking Group explique vouloir alerter les gens sur ce qui se passera lorsque des grosses entreprises et le « big government » (gouvernement global) viendront imposer la puce RFID à différentes fins : suivi fiscal, puce Google, puce Facebook… Il s’agit, a expliqué Hannes Sjoblad (sa carte de visite est sur sa propre puce et se lit d’un passage de Smartphone) de donner à chacun la connaissance de ce que peut faire la RFID, comment elle fonctionne. Il faut en « comprendre la technologie » afin de pouvoir la remettre en question, l’heure venue, assure-t-il.
De la puce RFID à l’homme augmenté
Dans le même temps, il pense que beaucoup de personnes peuvent être intéressées : « Nous interagissons avec la technologie en permanence. Aujourd’hui ça reste un peu désordre : il nous faut des codes PIN et des mots de passe. N’est-ce pas plus facile de simplement présenter sa main ? Ça, c’est vraiment intuitif. »
Le journaliste de la BBC n’a pas tort de noter que tout cela aboutit finalement à nous faire accepter le principe du « puçage » : « Sans doute des puces plus sophistiquées remplaceront-ils bientôt comme les “bandes fitness” ou les moyens de paiement, et nous nous habituerons à être “augmentés”. Toutes sortes de choses sont possibles – mais le point de savoir s’il va devenir culturellement acceptable d’implanter la technologie sous notre peau est une autre histoire. »