Bruxelles va aider les producteurs d’huile d’olive… tunisiens

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Le Parlement européen vient d’accepter de supprimer certaines taxes sur les importations d’huile d’olive tunisienne dans l’Union européenne, suivant en cela une proposition de la Commission européenne. Bruxelles, plutôt que d’aider une agriculture européenne à la peine, fait donc des efforts en faveur des producteurs tunisiens.
 
Malgré les protestations des pays producteurs européens, et notamment de l’Italie, l’augmentation des importations d’huile d’olive tunisienne, proposée par la Commission européenne pour soutenir l’économie du pays, a été largement acceptée par le Parlement européen, avec 500 voix pour, 107 contre et 107 abstentions. Les producteurs tunisiens pourront donc exporter à droit nul, c’est-à-dire sans taxe aucune, 35.000 tonnes d’huile supplémentaires en 2016 et en 2017.
 

L’Union européenne va aider les producteurs d’huile d’olive… tunisiens

 
On ne savait pas que Bruxelles avait pour tâche de s’occuper de soutenir l’économie de la Tunisie qui, à moins d’une information importante passée sous silence, ne semble pas être membre de l’Union européenne. En période normale, c’est-à-dire hors crise, on aurait pu admettre un coup de pouce avec un pays avec lequel nous avons des relations commerciales habituelles. Mais il se trouve que nous sommes en pleine crise économique, que l’agriculture européenne ne va pas fort, et que les producteurs d’huile ne font pas exception.
 
Nos parlementaires européens en sont d’ailleurs bien conscients qui, afin que cette décision ne fasse pas trop froncer les sourcils de nos propres producteurs, ont demandé une traçabilité claire du produit, et interdit de renouveler la mesure.
 
Evidemment, c’est un peu moins mal que ce qu’avait prévu la Commission européenne, qui semblait prête, pour sa part, à faire durer cette aide aux producteurs tunisiens aussi longtemps que nécessaire… Une période relativement longue en tout cas, puisque la proposition de la Commission n’est pas nouvelle. Elle date au moins de l’automne dernier.
 

Réactions vives contre Bruxelles

 
Malgré ces légères restrictions, nombre de députés européens, principalement italiens, ont estimé que cette décision pénaliserait les oléiculteurs de l’Union. Ainsi Paolo De Castro, coordinateur du S&D pour les questions d’agriculture, estime-t-il que la mesure est « inadaptée de par sa nature et son timing ».
 
Son collègue du PPE, Salvatore Cicu, déclare lui qu’il ne peut y avoir « d’adhésion à une décision qui va à l’encontre de nos entreprises », surtout à une période où nombre de régions italiennes connaissent des « conditions néfastes, comme les Pouilles, qui ont fait face à une épidémie de Xylella, la Sicile qui peine à commercialiser efficacement sa production, et la Sardaigne, dont les petits producteurs n’ont toujours pas un accès aisé au marché ».
 
Mara Bizzotto, député de la Ligue du Nord, est encore plus sévère, et dénonce carrément des « dispositions littéralement scandaleuses et qui auront des conséquences dévastatrices pour les producteurs italiens et pour tout le Made in Italy ».
 
Enfin Michela Giuffrida, du Partito democratico, a demandé « des contrôles stricts à la douane, une protection de nos produits et la réactivation rapide des taxes sur les importations de pays méditerranéens, qui nuisent à l’économie agricole du sud de l’Europe, et particulièrement de la Sicile ».
 

L’huile d’olive, le prix, et la qualité…

 
Ces mesures « n’aident pas les producteurs tunisiens, nuisent aux Italiens et augmentent le risque que les consommateurs soient exposés à la fraude », a déclaré de son côté Roberto Moncalvo, président de l’association des agriculteurs italiens Coldiretti, lors d’un rassemblement organisé en Sicile.
 
Les Italiens ne sont pas les seuls à manifester cette inquiétude, même si leurs représentants à Bruxelles ont été les plus présents sur ce dossier. Nombre de producteurs – de petits producteurs – français marquent aussi leur souci de voir déferler chez nous des quantités d’huile d’olive tunisienne qui arrosera la distribution française, sans qu’ils soient en mesure de lutter à ce niveau-là.
 
Reste la qualité de l’huile produit par ces producteurs. Les amateurs d’huile d’olive auront sans doute à cœur de ne pas l’oublier, et de ne pas se fier à la seule question du prix qui, en cette matière comme en beaucoup d’autres, est rarement un critère. Personnellement, j’ai un faible pour celle-ci
 

François le Luc