Le congrès quinquennal du Parti communiste chinois (PCC) s’est ouvert mercredi pour une semaine avec un discours fleuve du président Xi Jinping. Enorme structure incluse dans la constitution, comptant 89 millions d’adhérents et doublant les institutions par son contrôle totalitaire, le PCC est de fait un parti unique bien que subsistent huit autres petits partis-prétextes tenus en laisse dans un « Front Uni ». Devant ce dix-neuvième congrès, Xi Jinping a présenté des plans s’étendant jusqu’en 2050, avec développement militaire massif, recherche de l’hégémonie économique et « victoire écrasante » sur la « corruption ». Ce dernier point, en langage sino-communiste, signifie l’interdiction de toute division à l’intérieur du parti, les accusations de corruption recouvrant souvent des règlements de comptes politiques.
Congrès du PCC : hégémonie de Xi Jinping à l’intérieur, hégémonie chinoise à l’extérieur
Hégémonie de Xi à l’intérieur, donc, et hégémonie chinoise à l’extérieur avec une domination industrielle appuyée par l’argent public et un réseau de communication dédié, les « nouvelles routes de la soie ». « Il est temps pour nous d’assumer le rôle central dans le monde et de mieux contribuer au destin de l’humanité », a résumé Xi Jingping, à la fois secrétaire général, président de la commission militaire centrale du PCC, président de la République. A l’intérieur, il a promis une évolution vers un pays « prospère, fort, démocratique, culturellement avancé, harmonieux et magnifique », à un horizon compris « entre 2035 et 2050 » – la prétention planificatrice du communisme restera toujours un sujet fascinant.
Ce congrès a été précédé d’une campagne destinée à préparer les esprits à l’instauration d’une « Pensée Xi Jinping » qui serait intégrée aux statuts du parti communiste, rejoignant ainsi les sacro-saintes références aux doctrines de Marx ou Mao. Cette « pensée », basée sur le rôle de la Chine dans le monde, permet de centraliser le pouvoir sur Xi et de lui offrir un statut d’exception. Xi est déjà l’un des dirigeants chinois les plus puissants de l’histoire moderne. Il viserait à obtenir le titre, qu’aucun président n’a porté depuis des décennies, de « directeur ».
La « Pensée Xi Jinping » met l’accent sur les « caractéristiques chinoises » de la « nouvelle ère »
Si dans sa dissertation Xi Jinping a évité d’aborder toute question de pouvoir, il a en revanche insisté sur la nécessité d’instaurer « une nouvelle ère » dans l’histoire du pays, au cours de laquelle les communistes, clergé d’un sécularisme forcené, promettraient aux Chinois « une société modérément prospère, dans le respect de tous et par la mobilisation des efforts de tous pour construire un grand pays socialiste moderne ». Une « Pensée Xi Jinpig » marquée par l’emphase mise sur les « caractéristiques chinoises », qui invoquent lourdement le sentiment national. Le mondialisme de Xi, à l’opposé de celui de Jean-Claude Juncker, est celui d’une domination et non d’une dissolution. Son exceptionnalisme chinois, relève Frances Martel sur Breitbart.news, justifierait aussi en interne « les arrestations massives de cadres « corrompus » et les invasions répétées de territoires voisins qui ont marqué son action récente ».
Le programme prométhéen de Xi Jinping est fascinant de précision dans sa datation. Dans une première étape, de 2020 à 2035, le parti va construire des fondations, grâce à la société « modérément prospère ». Dans une deuxième étape, de 2035 jusqu’au milieu du XXIe siècle, le PCC « travaillera pour transformer la Chine en un grand pays socialiste moderne, prospère, fort, démocratique, etc… ». Il y a du travail : Xi a relevé qu’aujourd’hui, dans un empire au taux de croissance qui reste considérable et qui affiche une balance commerciale obstinément excédentaire, « la principale contradiction est celle du développement déséquilibré et inadapté, et du besoin constamment croissant du peuple pour une vie meilleure ».
La Chine « ne cherchera jamais une quelconque l’hégémonie » mais veut écraser le séparatisme à Hong Kong ou Taïwan
Le discours de Xi Jinping était lui aussi truffé de contradictions, la principale concernant le statut international de l’empire. Son insistance sur le fait que « La Chine ne recherchera jamais une quelconque hégémonie ni ne s’engagera dans une quelconque expansion » est contredite par sa promesse d’utiliser un outil militaire totalement modernisé pour assurer sa prééminence dans la région et éradiquer les mouvements séparatistes dans des territoires tels que Hong Kong ou Taïwan. « Nous ne permettrons jamais à quiconque, à une quelconque organisation ou à un quelconque parti, à un moment quelconque ou quelle qu’en soit la forme, de séparer un morceau du territoire de la Chine », a prévenu Xi. « Aucun parti de Taïwan ne rencontrera de difficulté à mener des échanges avec le continent », a-t-il précisé. Concernant Hong Kong, le président-secrétaire général a affirmé que la Chine travaillera, sous le régime « un pays, deux systèmes », à tirer profit des bénéfices de son organisation capitaliste sans pour autant l’autoriser sur le continent.
L’agence Xinhua dénonce les républiques pluralistes « conflictuelles » pour appâter la gauche occidentale
Notons que le PCC sert de support de propagande pour appâter la gauche occidentale et la pousser à soutenir l’influence autocratique du communisme chinois sur les sociétés libres. Un article de l’agence Xinhua stipule ainsi que « La démocratie à la façon chinoise n’a jamais été en aussi bonne santé » et que « La Chine n’a absolument aucun besoin d’importer les systèmes politiques faillis d’autres pays ». Pour l’agence communiste d’Etat, les républiques pluralistes sont « conflictuelles » et l’Occident a été emporté dans « les crises et le chaos » en raison de sa soumission aux valeurs libérales classiques qui auraient « retardé l’économie et le progrès social, et ignoré les intérêts de la plupart des citoyens ». Les millions de consommateurs occidentaux qui financent l’industrie chinoise en subissant le quasi-monopole de ses produits, bradés grâce au moins-disant social, apprécieront.