DOCUMENTAIRE 12 jours ♥♥


 
12 jours est le dernier film-documentaire de Raymond Depardon. Ce réalisateur est connu pour avoir abordé des sujets tristes, sérieux, en accordant une très large place à la parole des protagonistes, souvent une humanité en souffrance. Il s’est déjà beaucoup intéressé aux situations de détresse, de pauvreté, de folie, ou de confrontation à l’institution judiciaire pour des accusés. Ce film rappelle un peu par son thème ses approches précédentes : des individus internés d’offices, pour dérangement mental manifeste, dangereux pour autrui comme eux-mêmes, du moins telles sont les attestations des médecins, doivent au bout de 12 jours être présentés à un juge. Ce dernier vérifie la légalité de la procédure, en particulier le respect des formes requises. N’étant pas médecin, il n’a absolument pas à se prononcer sur le fond médical des affaires. Les médecins se contrôlent entre eux par ailleurs.
 
Toutefois, le juge échange lors de l’audience, suivant une procédure stricte avec la personne internée d’office et son avocat. L’interné accepte ou non la décision d’internement d’office ; s’il refuse, il fait appel. Sauf erreur manifeste, cet appel changera peu de choses. Le juge peut se rendre compte à cette occasion, avec une sagesse humaine minimale, de l’état du malade. Les malades, qui ont accepté d’être filmés, livrent des témoignages bruts. Ils expriment une énorme souffrance humaine, et des types ou stades variables de maladies mentales. Certains sont capables de tenir des discours cohérents, ou à peu près, tandis que d’autres délirent manifestement. Du fait du tragique de la situation, le juge, comme dans la salle le spectateur, doit, par respect, se retenir de rire en quelques occasions. Le plus drôle, si l’on ose dire, s’avère en fait être un assassin parricide, dont la place est manifestement en asile psychiatrique strictement fermé, et non en prison.
 

12 jours, une vision émouvante et bien filmée d’une humanité souffrante

 
Le juge est parfois confronté aux contradictions de notre société, qui glisse sur une bien mauvaise pente. Ainsi, une personne en grande souffrance exige de sortir de l’hôpital psychiatrique afin de pouvoir se suicider tranquillement dehors. Les médecins s’opposent à une sortie face à un tel discours réitéré et un réel danger de passage à l’acte ; le juge valide donc l’opinion des médecins, tout en précisant à destination de la jeune femme suicidaire comme de son avocat qu’il n’est pas évident du tout qu’il serait du devoir du juge d’empêcher qui que ce soit de se suicider… Aux Pays-Bas, on pratique déjà sous le nom d’euthanasie l’assassinat des malades mentaux volontaires ; on y viendra prochainement en France, il y a tout lieu de le craindre.
 
12 jours intéresse vraiment par cette vision émouvante d’une humanité souffrante, bien filmée.
 

Hector JOVIEN

 
12 jours documentaire film