2 février : Saint Théophane Vénard

2 février Théophane Vénard
 

Il naquit le 21 novembre 1829 à Saint-Loup-sur-Thouet, au nord-ouest de Poitiers. Deuxième des quatre enfants d’un instituteur pieux, il fut baptisé Jean-Théophane. D’une grande foi dès sa petite enfance, il déclara à l’âge de neuf ans : « Et moi aussi, je veux aller au Tonkin ! Et moi aussi, je veux mourir martyr ! » Après la mort de sa mère en 1843, il noua une relation très profonde avec sa sœur aînée, Mélanie. A l’âge de 18 ans, il émit des doutes quant à sa vocation, mais entra cependant au petit séminaire, à Montmorillon. En 1848, il entra au grand séminaire à Poitiers : ses doutes avaient disparu.

Toujours désireux de devenir missionnaire, il intégra en 1851 le séminaire des Missions étrangères de Paris (MEP). Après le coup d’Etat de Louis-Napoléon Bonaparte, il écrivit à sa famille, inquiète : « S’il y avait du danger, il serait pour tout le monde, surtout pour les riches mauvais chrétiens ; car la classe ouvrière a été démoralisée par eux : elle ne croit plus à Dieu et elle veut jouir sur terre ; et, puisqu’elle ne possède rien, elle se révolte contre ceux qui possèdent. »

Ordonné prêtre le 5 juin 1852, il fut désigné à sa propre demande pour être missionnaire en Chine le 13 septembre suivant. Arrivé à Singapour après cinq mois de voyage, il débarqua ensuite à Hong Kong le 19 mars 1853. Son affectation en Chine fut toutefois suspendue en raison des persécutions ; bien qu’attristé, il mit cette période à profit pour apprendre, avec force difficultés, la langue chinoise. Il écrivit en effet : « Je serais tenté de croire que cette langue et ces caractères ont été inventés par le diable pour en rendre l’étude plus difficile pour les missionnaires ! »

Le 26 mai 1854, enfin, il put embarquer pour le Tonkin ; il ne cacha pas son bonheur de se rendre en cette terre de martyrs qu’il désirait depuis son enfance. Le jour même, un missionnaire des MEP, saint Jean-Louis Bonnard, était exécuté au Tonkin. Le 23 juin 1854, Théophane débarqua clandestinement, avant de rejoindre sa mission dans le Tonkin occidental, où il découvrit que les persécutions étaient plus ou moins suspendues, un prêtre ayant miraculeusement guéri le vice-roi. Il se montra très rapidement à l’aise avec la langue locale et fut bientôt très apprécié de la population.

En 1857, l’empereur, s’étonnant de la suspension de la persécution, envoya des émissaires sur toutes ses terres pour y débusquer les chrétiens. Plusieurs furent alors martyrisés. Théophane fut alors contraint de se cacher, avant d’être envoyé à Hoang-Nguyen, au sud d’Hanoï. Il y continua sa mission avec zèle mais toujours dans la clandestinité, jusqu’à sa dénonciation : il dut alors prendre une nouvelle fois la fuite, se déplaçant de village en village et se cachant constamment des autorités.

A cette époque, il écrivit dans une lettre : « Vous pourriez nous demander : comment ne devenez-vous pas fous ? Toujours enfermés dans l’étroitesse de quatre murs, sous un toit que vous touchez de la main, ayant pour commensaux les araignées, les rats et les crapauds, obligés de toujours parler à voix basse, assaillis chaque jour par de mauvaises nouvelles : prêtres pris, décapités, chrétientés détruites et dispersées au milieu des païens, beaucoup de chrétiens qui apostasient, et ceux qui demeurent fermes envoyés aux montagnes malsaines sur lesquelles ils périssent abandonnés, et cela sans que l’on puisse prévoir quelle en sera la fin, ou plutôt, ne la prévoyant que trop, j’avoue qu’il faut une grâce spéciale pour résister à la tentation du découragement et de la tristesse. »

Le 15 janvier 1860, il se consacra à la Vierge Marie, selon la prière de saint Louis-Marie Grignion de Montfort ; le 30 novembre de la même année, après avoir été dénoncé, il fut arrêté et enchaîné dans une cage. Il écrivit à sa famille cette belle lettre d’adieu : « Puisque la sentence se fait attendre, je veux vous adresser un nouvel adieu qui sera probablement le dernier. Les jours de ma prison s’écoulent paisiblement. Tous ceux qui m’entourent m’honorent, un bon nombre m’aiment. Depuis le grand mandarin jusqu’au dernier soldat, tous regrettent que la loi du royaume me condamne à mort. Je n’ai point eu à endurer de tortures, comme beaucoup de mes frères. Un léger coup de sabre séparera ma tête, comme une fleur printanière que le maître du jardin cueille pour son plaisir. Nous sommes tous des fleurs plantées sur cette terre que Dieu cueille en son temps, un peu plus tôt, un peu plus tard. Autre est la rose empourprée, autre le lys virginal, autre l’humble violette. Tâchons tous de plaire, selon le parfum ou l’éclat qui nous sont donnés, au souverain Seigneur et Maître. »

Théophane Vénard fut décapité à Hanoï le 2 février 1861 ; le bourreau, ivre, dut s’y reprendre à cinq fois avant de parvenir à séparer entièrement la tête du corps. Béatifié le 2 mai 1909, il fut canonisé par Jean-Paul II le 19 juin 1988, dans un groupe de 117 martyrs du Viêtnam.