Economie florissante : la Fed va-t-elle siffler la fin de la récréation aux Etats-Unis ?

Economie florissante Fed Etats Unis
 
La Réserve fédérale américaine multiplie ces dernières semaines les discours optimistes sur l’économie des Etats-Unis, boostée à l’évidence par le trumpisme flamboyant. La semaine dernière, le président de la Fed, Jerome Powell – un homme de l’établissement quoique nommé par Donald Trump – a évoqué une conjoncture « remarquablement positive », « extraordinaire » : les perspectives de l’économie des Etats-Unis sont selon lui « particulièrement bonnes ». Alors que les affaires sont florissantes, une question se pose désormais sans trop d’illusions quant à son issue à court terme : à quel moment la Fed va-t-elle siffler la fin de la récréation ?
 
Cela pourrait se faire très facilement par une augmentation des taux d’intérêt : c’est exactement ce que prévoient nombre d’investisseurs pour qui le flot de bonnes nouvelles aura une conséquence non plus « possible » mais « certaine » vu leur ampleur. Pour éviter la « surchauffe », comme ils disent, et surtout, pour contrer une accélération de l’inflation corollaire de la croissance (inflation qui ne pose que des problèmes mineurs tant qu’elle reste dans des limites raisonnables et ne se transforme pas en hyperinflation, phénomène totalement différent), la Réserve fédérale a pour habitude de peser sur l’économie en rendant l’argent plus difficile d’accès. Si les bourses américaines ont d’abord connu des hausses considérables la semaine dernière, il semble que les plus expérimentés de ses joueurs sont en train de quitter rapidement la partie ; dès vendredi soir, le Dow Jones Industrial Average perdait 500 points. Une panique que les perspectives d’intervention de la Réserve fédérale suffisent à expliquer.
 

La Réserve fédérale des Etats-Unis a remarqué la bonne santé de l’économie américaine

 
Le mardi précédent, Jerome Powell s’enthousiasmait : « L’économie est forte, le chômage atteint un plus bas sur près de cinq ans, et l’inflation se situe grosso modo à hauteur de notre objectif de 2 %. Les… annonces des prévisionnistes à la fois à l’intérieur et à l’extérieur de la Fed restent au beau fixe. »
 
Mercredi, on apprenait que 230.000 emplois non agricoles avaient été créés en septembre, selon une société de sous-traitance de paies ; de son côté, le Département de l’emploi constatait la création de 134.000 postes tout en révisant fortement à la hausse ses chiffres pour juillet et août. Les Etats-Unis bénéficient depuis le début de 2018 de 1,8 millions d’emplois nouveaux.
 
L’association nationale des manufacturiers américains annonçaient quant à elle vendredi que près de 93 % de ses 14.000 membres prévoient une expansion supplémentaire de leurs affaires, du jamais vu depuis 20 ans.
 
Il y avait de quoi pavoiser, et pourtant, le Dow Jones a connu la chute évoquée plus haut tandis que les taux d’intérêt sur les obligations du Trésor américain augmentaient un taux record depuis quatre ans. D’où vient cette panique ? On sait que les obligations d’Etat sont fortement liées aux hypothèques qui soutiennent le marché du logement, marché qui risque de se ralentir fortement en cas de hausse des intérêts, précisément. Car tout cela se produit alors que la valeur de l’immobilier de logement souffre lui d’une baisse telle qu’on n’en a pas connue depuis longtemps. Une hausse générale des taux d’intérêt ne saurait qu’augmenter les problèmes de ce marché déjà en difficulté.
 

Face à une économie florissante, la Fed a une réponse classique : augmenter les taux d’intérêt

 
Tout n’est pas rose pour autant : l’endettement à la consommation atteint les 4.000 milliards de dollars, les prix du brut n’ont pas été aussi hauts depuis quatre ans, le prix des actions est surévalué et la dette nationale ne cesse de croître : elle devrait atteindre selon les estimations quelque 40.000 milliards de dollars d’ici à 2030.
 
Mais le danger immédiat ne vient pas du tout de là. Il est lié à la capacité de la banque centrale américaine, la Réserve fédérale, irresponsable vis-à-vis du pouvoir et gérée de manière privée, de tout modifier d’un simple trait de plume. Un ancien président de la Fed, William McChesney Martin, déclarait jadis sans ambages : « Notre objectif est de contrer les vents de la déflation ou de l’inflation, quel que soit le sens où ils soufflent. » Ou encore : « La Réserve fédérale… est dans la situation du chaperon qui fait débarrasser le bol de punch au moment où la fête commence vraiment à prendre. »
 

Aux Etats-Unis comme ailleurs, les Banques centrales traquent l’inflation… corollaire de la croissance

 
C’est certainement avec cela à l’esprit que les investisseurs ont réagi au flot de bonnes nouvelles sur l’économie réelle américaine : ils sont persuadés que cela ne saurait durer parce que la Fed saura y mettre fin au nom de sa traque de l’inflation. Traque qui permet de passer sous silence des motivations nettement moins avouables, et qui tiennent à la volonté de soutenir telle économie nationale ou régionale plutôt que telle autre depuis des perspectives mondialistes.
 
Quoi qu’il en soit, l’Investor’s Business Daily a commenté après la chute boursière de vendredi soir, à propos des investisseurs en actions et en obligations : « Ils savaient que la Fed, hostile à la croissance, va presque certainement augmenter les taux en décembre. » Avant le flot soudain de bonnes nouvelles, « cela était seulement envisagé comme possibilité ».
 
Les marchés américains sont fermés ce lundi, jour de Christophe Colomb. On en saura davantage à partir de mardi sur l’état d’esprit des acteurs en bourse et sur la réussite du torpillage par la Fed, à un mois des élections américaines, des résultats économique de Trump.
 

Anne Dolhein