La démographie de l’Afrique connaît une baisse inédite et rapide

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Voilà des décennies qu’on nous explique que l’Afrique connaît une démographie galopante qui provoquera – « changement climatique » aidant – une pression migratoire inédite sur les pays développés. Mais les prédictions des démographes sont démenties par les faits : la fertilité africaine connaît une baisse inédite et rapide – dans le sillage d’un mouvement mondial de contraction et de vieillissement des populations qui fait que dans la majorité des pays, les naissances ne sont déjà plus à même d’assurer le remplacement des générations.

Face à ce lent suicide, la vitalité africaine constituait une sorte de preuve que la fatalité n’existe pas. N’oublions pas, au passage, que l’une de ses grandes raisons aura été l’œuvre des colonisateurs occidentaux, qui ont apporté les infrastructures, les soins modernes – souvent grâce à l’Eglise catholique –, l’amélioration de l’hygiène, l’amélioration spectaculaire de la santé infantile…

Plus récemment, l’ONU et les grandes institutions internationales publiques et privées ont au contraire tout fait pour diffuser ce qu’elles appellent la « santé reproductive » : en clair, la contraception sous toutes ses formes et la pression pour légaliser l’avortement.

MercatorNet résume ainsi les statistiques à jour en 2021 publiées par la revue scientifique The Lancet : « L’Afrique subsaharienne est la seule région du monde dont l’indice synthétique de fécondité (ISF) est supérieur au taux de remplacement, actuellement estimé entre 4,3 et 4,6. Le taux de fécondité est passé de 8 % des naissances mondiales en 1950 à 30 % en 2021, pour atteindre 54 % à la fin du siècle. Bien que l’ISF de la région diminue rapidement, toute contraction de la population subsaharienne ne se produira pas avant au moins un siècle. »

 

La démographie de l’Afrique annonce une plongée sous le seuil de remplacement

Mais ce scénario ne se confirme pas en l’état. Selon Macrotrends, plateforme de recherche et de prospective pour les investisseurs à long terme, l’indice synthétique de fécondité chute rapidement : il a diminué en moyenne de 1,3 % par an au cours des trois dernières années. Mercator commente : « Si cette tendance persiste, l’Afrique finira par plonger en dessous du seuil de remplacement. Les démographes estiment que la baisse de la fécondité s’accélère plus rapidement que prévu, en particulier en Afrique subsaharienne. Statista, l’agrégateur européen de chiffres, prévoit que l’ISF de l’Afrique en 2030 sera de 3,8. »

Et il faudrait diminuer en conséquence, du fait de cette « transition démographique beaucoup plus rapide que prévue », les chiffres projetés de la population africaine à l’horizon 2100. Un article de The Economist paru en 2023 envisageait un scénario semblable à celui qui se déroule actuellement dans certaines parties d’Asie, puisque le rythme actuel de baisse du taux de fécondité en Afrique ressemble fort à ce que l’on y a connu.

MercatorNet cite l’univesitaire de renom Jose G. Rimon II, ancien de la Johns Hopkins Bloomberg School of Public Health et ancien directeur de l’Institut Bill & Melinda Gates pour la santé de la population et la santé reproductive de cette institution. Ce partisan affirmé de la « planification familiale » dresse un sombre constat : « Nous avons sous-estimé ce qui se passe en termes d’évolution de la fécondité en Afrique. L’Afrique connaîtra probablement le même type de changements rapides que l’Asie de l’Est. » Ce sont ces changements qui ont affecté les « tigres asiatiques » – la Chine, le Japon, Taïwan, la Corée du Sud – en les privant d’une bonne part de leur mordant : tous ont une population en déclin et donc une main d’œuvre en baisse.

 

La baisse rapide de l’indice de fécondité a démenti les prévisions

Toutes les estimations brandies depuis les années 1970, et les prophéties catastrophistes du Club de Rome en particulier, pour « justifier » le discours alarmiste sur la surpopulation ont été contrées par les faits. Le pic de population mondiale n’est plus prévu pour 2100, comme l’annonçait naguère l’ONU, mais pour 2060 : à cette échelle, une erreur de 40 ans, c’est énorme ! Et derrière les chiffres, il faut aussi comprendre qu’une part non négligeable de l’augmentation de la population mondiale est liée à l’allongement de la durée de vie. Il y a de plus en plus de vieux, et pas forcément de plus en plus de jeunes…

L’an dernier, on tablait encore sur un pic de population de 426 millions au Nigeria en 2060, année du début du repli. Les Nations unies prévoient maintenant que le Nigeria comptera 342 millions d’habitants en 2060 (c’est 200 millions de moins que les quelque 540 millions annoncés pour cette date il y a dix ans). Mais même revues drastiquement à la baisse, ces projections se vérifieront-elles ?

Le problème de l’Afrique aujourd’hui n’est pas la surpopulation, mais le manque de développement et d’emplois. Et si le colonialisme a apporté – comme le reconnaît Louis T. March de MercatorNet – d’énormes progrès sociaux et économiques qui sont précisément à l’origine de sa rapide croissance démographique à ce jour, elle est aujourd’hui à la croisée des chemins.

 

La démographie de l’Afrique affectée par l’urbanisation et la contraception

March explique : « L’Afrique s’urbanise rapidement. Les femmes urbaines ont 30 à 40 % d’enfants en moins que leurs homologues rurales. Les ONG omniprésentes promeuvent avec succès la contraception, en particulier auprès des citadins. Lors d’un forum organisé en 2014 sur l’avenir démographique de l’Afrique, Jack Goldstone, du Wilson Center, a déclaré : “Le meilleur contraceptif est la croissance économique.” Un argument valable, semble-t-il, et de nombreux dirigeants africains sont d’accord. Ils sont désireux de faire partie de ce qu’ils considèrent comme un Sud global en pleine expansion ; une fécondité élevée est considérée comme un obstacle. Avec moins de naissances, le pourcentage de la population en âge de travailler augmente, ce qui produit le “dividende démographique” tant vanté, quoique éphémère, qui stimule la croissance économique. »

A l’heure où l’on nous bassine avec le « développement durable », voilà un domaine où les autorités font comme si celui-ci n’avait aucune importance. Ecoutons (pour une fois) le FMI, qui explique au sujet de cette aubaine démographique : « Cette période de dividende [démographique] est assez longue, puisqu’elle dure cinq décennies ou davantage, mais la baisse de la fécondité finit par réduire le taux de croissance de la main-d’œuvre, tandis que les progrès continus en matière de mortalité des personnes âgées accélèrent la croissance de la population âgée. »

Il suffit de se tourner vers l’Asie du Sud-Est pour voir où cela mène : après une période d’abondance de main-d’œuvre, éventuellement esclavagisée, la contraction du nombre de personnes en âge de travailler fait augmenter les salaires pendant que le nombre de personnes âgées augmente pèse lourdement à travers le coût des retraites et des soins.

 

La richesse de l’Afrique attise les convoitises

L’Afrique possède des richesses naturelles inouïes, et attise les convoitises aussi bien du G7 que des BRICS qui prennent actuellement des longueurs d’avance – Chine en tête. L’Afrique du Sud, l’Egypte et l’Ethiopie en sont désormais membres à part entière, et les puissances occidentales se voient éjectés peu à peu.

Mais l’Afrique pourra-t-elle s’en sortir ainsi ? Louis March souligne que le continent a été politiquement découpé par les puissances coloniales sans égard pour les réalités tribales, qui reviennent désormais avec un effet boomerang : « En Occident, les populations sont traditionnellement décrites en fonction de la nationalité, de l’ethnicité et de facteurs socio-économiques. En Afrique, c’est le tribalisme qui compte. Les divisions tribales sont profondes et difficilement compréhensibles pour les étrangers ; elles peuvent déboucher sur des violences. Le tribalisme est la base de l’attribution du patronage gouvernemental et de la distribution des ressources. La discrimination fondée sur le rang est monnaie courante. Cela entrave le développement économique. »

Celui-ci est également fonction de l’aide étrangère, dont de nombreux Etats africains sont devenus dépendants, souligne MercatorNet : « Si cette aide peut être utile, l’argent facile cultive une culture de la dépendance, ce qui dispense les gouvernements d’encourager les initiatives locales visant à améliorer le niveau de vie. Il favorise également la corruption. Comme l’a dit un jour le député Ron Paul, “l’aide étrangère consiste à prendre l’argent des pauvres des pays riches pour le donner aux riches des pays pauvres”. »

 

Baisse rapide de la natalité et « dividende démographique » : un leurre

L’Afrique pourra-t-elle malgré tout profiter de son « dividende démographique » pour devenir à son tour « usine » du monde et se sortir de cette dépendance ? A supposer que cela fût souhaitable (et en fait, ça ne l’est pour personne), elle n’est pas outillée pour cela ni sur le plan économique, ni – assure Louis March en citant une étude de Richard Lynn et Tatu Vanhanen – sur celui du QI national moyen qui est corrélé selon ces auteurs avec le PIB national par habitant.

« Il vaut mieux accorder des micocrédits aux petits entrepreneurs », conclut-il. Et, pourrait-on ajouter, favoriser l’apprentissage et l’enseignement professionnel.

Mais à l’heure des robots, du véritable « grand remplacement » qui se profile, on continue de favoriser le comptage des Africains en « surnombre » comme des bouches inutiles. Le comble du racisme anti-humain.

 

Jeanne Smits