Selon le magazine britannique The Economist, la Chine augmente activement ses capacités militaires et se trouve aujourd’hui seule à pouvoir représenter une menace globale, aux dires des agences de renseignement américaines. Ce qui motive Pékin, selon celles-ci ? « La conviction que l’Armée de libération du peuple doit pouvoir confronter les Etats-Unis dans le cadre d’un conflit durable et à grande échelle ».
Le magazine estime que l’Armée chinoise en est encore loin : la « modernisation » serait pour 2035, la classe mondiale pour 2049. Mais déjà, elle a cessé d’être l’ensemble mal équipé des années 2000 pour devenir une « puissance régionale » : ne préférant plus la quantité à la qualité, certaines de ses armes seraient aujourd’hui au même niveau, voire supérieures aux armes américaines.
Un exemple ? Plus de 70 % des bâtiments de guerre de la flotte chinoise ont été mis à l’eau après 2010 (aux USA, c’est 25 %), s’il faut en croire le think-tank Centre for Strategic and International Studies (CSIS). Et en termes de qualité, ils n’ont rien à envier aux navires américains. La marine militaire chinoise devrait bientôt dépasser leur niveau d’équipement en lanceurs de missiles à système de lancement vertical. Par ailleurs, la Chine a innové en matière de systèmes de propulsion hybride pour ses sous-marins de classe Zhou, et construit actuellement un navire d’assaut amphibie, le Type 076, d’une taille record et capable, en outre, de lancer des drones au moyen d’un catapulte dédié.
La Chine modernise ses armées et commence à dépasser les USA
L’aviation militaire chinoise connaît une même évolution selon The Economist. Sans atteindre la qualité et la discrétion des aéronefs de l’OTAN, ses avions s’en approchent aujourd’hui selon un think-tank de l’armée de l’air américaine spécialisé dans l’étude de l’aérospatiale chinoise. La Chine construit des chasseurs furtifs à tour de bras, selon les agences de renseignement, tandis que les armes aéroportées chinoises s’améliorent fortement en qualité. Et tout l’attirail qui va avec.
Les progrès les plus spectaculaires concernent les missiles hypersoniques capables de voler et de manœuvrer cinq fois plus vite que la vitesse du son – à telle enseigne que plusieurs pays ont dû repenser leur système de défense. La Chine disposerait aujourd’hui de l’arsenal le plus important au monde dans ce domaine.
Pour l’Australian Strategic Policy Institute, la Chine se hisse au premier rang, en 2024, dans six des sept domaines cruciaux liés à la défense : moteurs d’avion avancés, drones et robots collaboratifs, détection et suivi hypersoniques, robotique avancée, systèmes autonomes et systèmes de lancement dans l’espace. L’Amérique n’arrive en tête que pour les petits satellites.
Quel est le sérieux de ces chiffres et de ces classements ? Impossible à dire : les diverses nations ne font pas de publicité sur leurs travaux réels et leurs recherches en cours, et il ne suffit pas d’être bien armé pour remporter une guerre. The Economist cite la corruption endémique en Chine, le manque de coordination entre ses armées de terre, de l’air et sa marine, et une logistique défaillante.
La Chine augmente ses capacités militaires après avoir été boostée par l’Occident
On notera cependant que la Chine, d’après The Economist, a réussi une modernisation assez unique, et ce grâce à une mobilisation somme toute raisonnable de ses moyens : moins de 2 % de son PIB (contre plus de 3 % du PIB pour les dépenses militaires américaines).
A cela différentes raisons que le journal ne cite pas : la main d’œuvre bon marché, mais aussi l’enrichissement rapide qu’a connu le plus grand communiste du monde en se voyant offrir l’entrée dans la danse des échanges planétaires avec la bénédiction de Kissinger au début des années 1980 en bénéficiant de conditions de concurrence des plus favorables par rapport aux pays développés qui ont perdu de nombreuses industries délocalisées sur les terres chinoises. L’honorable partenaire ne prenait pas seulement le pas dans le domaine de la production ; il acquérait les moyens de devenir une grande puissance militaire.
A quoi il faut ajouter la « guerre hybride » que Xi Jinping prépare activement et ouvertement en dotant l’Armée de libération populaire de capacités tirées du monde civil sur lequel le Parti a aussi la main, démultipliant sa force en recourant à l’industrie, au commerce, à la culture, au numérique, ainsi qu’au contrôle de l’information bien plus serré que celui que nous connaissons en Occident. Les « 2 % du PIB » ne racontent qu’une partie de l’histoire…