Notre confrère Geo, comme son nom l’indique, et un magazine qui prétend, par des photos spectaculaires et des reportages surprenants, ouvrir les yeux du grand public sur les merveilles de la terre, avec un petit côté pédagogique et volontiers moralisateur, avec l’idée que ce qu’on y lit est documenté, sérieux au fond malgré une forme attirante. Or il vient de publier un article intitulé « Une start-up annonce le premier sac en cuir de dinosaure, basé sur de l’ADN de T-Rex » (T comme tyrannosaurus). On y apprend que la société créative VML, les innovateurs en génomique The Organoid Company et la société de biotechnologie durable Lab-Grown Leather se sont alliés pour produire le premier cuir de dinosaure au monde. Comment cela ? En récupérant du collagène d’un dinosaure fossilisé et en reconstituant son ADN et en l’introduisant dans des cultures de laboratoire. « “Ce projet illustre remarquablement comment nous pouvons exploiter les technologies de pointe en ingénierie du génome et des protéines pour créer des matériaux entièrement nouveaux. En reconstruisant et en optimisant d’anciennes séquences protéiques, nous pouvons concevoir du cuir de T. Rex, un biomatériau inspiré de la biologie préhistorique, et le cloner dans une lignée cellulaire sur mesure”, explique Thomas Mitchell, P.-D.G. de The Organoid Company. » Un commercial du projet loue « la biologie du passé pour créer les matériaux de luxe du futur ». Cependant, de l’aveu même de Géo, les paléontologues ne prennent pas la chose très au sérieux. Les traces d’ADN de T-Rex ne courent pas les rues, et à elles seules elles ne suffiraient pas à reproduire la peau de la bête. Ils restent donc « hautement sceptiques » devant ce que l’un d’eux nomment un « pur fantasme ». Mais Géo aura fait rêver ses lecteurs un moment d’un monde façon Jurassik Park, et pour la bonne cause. Car, en introduction, il aura débité un petit couplet professoral sur les méfaits du cuir ordinaire, donc la BA que constitue l’usage de la peau de T-Rex. On y lit notamment : « L’impact environnemental de l’industrie du cuir est catastrophique. (…) Pour réduire l’impact écologique de la production de cuir et mettre fin à la maltraitance animale… » C’est clair, le cuir hypothétique du tyrannosaure Rex, comme la viande artificielle, est un moyen louable de nous rappeler que nous péchons contre notre Déesse-Mère Gaïa.