L’Assemblée nationale a lancé une consultation citoyenne sur la dénatalité

Assemblée nationale consultation dénatalité
 

J’ai testé pour vous…

Le monde commence à découvrir le fléau de la dénatalité que de grands démographes comme Alfred Sauvy dénonçaient déjà il y a des décennies. Curieusement (ou non, d’ailleurs), cela se produit précisément au moment où l’homme est en passe de devenir obsolète. C’est en tout cas ce qui arrivera si les promoteurs de l’automatisation à coups de robots et d’intelligence artificielle parviennent à s’imposer. La France n’est pas en reste, qui connaît un taux de natalité très bas, d’1,59 enfant par femme en Métropole en 2024, selon les chiffres officiels de l’INSEE. L’Assemblée nationale a même décidé de lancer une grande enquête en ligne à ce sujet depuis le 23 octobre. Elle sera en ligne jusqu’au 4 décembre, et les citoyens peuvent librement y répondre à la simple condition de fournir une adresse mail, avec une garantie affichée d’anonymat.

Cette consultation citoyenne veut interroger les Français sur « les déterminants de la natalité, leurs expériences et attentes en matière de parentalité, ainsi que leur perception des politiques publiques qui y sont associées », affirme le communiqué de l’Assemblée. Inutile de dire qu’elle passe d’emblée à côté de l’essentiel, la dimension spirituelle. A quoi sert en effet de mettre des enfants au monde si c’est pour une destinée purement terrestre ? Avoir des enfants exige des sacrifices, même si cela répond aussi à un des instincts légitimes les plus profonds de l’homme. Pourquoi les consentir dans les temps difficiles qui sont les nôtres, si on n’attend pas pour eux une forme d’heureuse éternité ?

Il n’empêche que le problème est réel et dramatique. D’autres pays sont déjà au bord du suicide consommé, comme l’Espagne avec son 1,12 enfant par femme, le Japon ou la Corée du Sud.

 

L’Assemblée nationale, sa consultation citoyenne sur la dénatalité et son train de retard

On sait par ailleurs l’extrême difficulté à inverser une telle tendance, car moins il y a d’enfants, moins il y a de fécondité potentielle par la suite, faute de femmes capables de procréer dans la génération qui vient. Le « réarmement démographique » évoqué par Macron aurait décidément besoin d’autre chose que des mesurettes politiques, dans un contexte qui est aussi profondément hostile à la famille que le nôtre.

J’ai testé pour vous le questionnaire et j’ai eu une première surprise. On doit donner sa tranche d’âge, ce qui est logique. La mienne ne me permet pas d’espérer avoir d’autres enfants. Pourtant, tout le questionnaire qui suit ma réponse à ce sujet est formulé comme si j’étais en âge de procréer…

A cette surprise faisait suite à une première indignation au vu à la question « Quel est votre sexe ? » On peut répondre « Femme », « Homme » ou « Je préfère ne pas répondre ». Elle est pourtant cruciale, car jusqu’à preuve du contraire, ou réussite de recherches infernales, il faut une femme pour mettre un enfant au monde.

Le questionnaire va certainement permettre de savoir si le désir d’enfants des personnes ayant répondu au questionnaire est plus important que le nombre qu’elles ont déjà. En effet, c’est une constante de ce type d’enquête dans différents pays : les femmes disent en général qu’elles aimeraient avoir un enfant de plus.

 

Freins à la dénatalité : la consultation « oublie » le mariage

Au chapitre des freins à la natalité, le questionnaire évoque la difficulté d’interrompre des études ou une carrière, les difficultés économiques, le logement, les questions de garde, la santé, le coût d’un enfant sur le long terme, la réduction du temps de vie pour soi, l’absence de soutien familial, l’âge, ou encore les inquiétudes liées au climat, à la politique, à l’insécurité, à la situation économique du pays, à quoi s’ajoute s’il s’agit d’avoir un enfant supplémentaire, « une expérience difficile de la parentalité, dépression post-partum, burn-out parental, enfant difficile… ».

Il n’est jamais question du mariage ou de son absence, du manque de stabilité du couple ; la consultation évoque certes la valorisation du « rôle parental » mais dans les faits, la maternité et la paternité sont, pour ainsi dire, gommées jusque dans la prétendue éducation sexuelle et affective, qui repose sur la formation à l’évitement des grossesses.

Ce n’est pas un hasard si les mots « mariage », « divorce », « contraception », « IVG » sont totalement absents de la consultation. Le mot « famille » n’apparaît que trois fois.

En revanche, les participants sont invités à dire s’ils pensent que la répartition des tâches domestiques et parentales entre femmes et hommes influencent la décision d’avoir des enfants. Et ce, alors même qu’on vous regarde de travers si vous dites qu’il faut un homme et une femme pour faire un enfant. En fait, on les voit venir : c’est toujours l’homme qui est montré du doigt au sujet des tâches domestiques. C’est à travers l’opprobre qu’il finit par revenir dans le circuit…

A aucun moment, il n’est question de méthodes naturelles pour favoriser la fertilité. En revanche, les « parcours de PMA accessibles et équitables » sont l’unique thème du chapitre « Parcours de procréation et santé ».

Que peut faire l’Etat pour promouvoir la natalité ? Tel est l’autre grand sujet abordé par la consultation. Il énumère des aides ou des dispositifs existants déjà, les aides possibles, les aides proposées, leur facilité d’accès, leur adaptation aux besoins des gens, et d’autres.

 

L’Assemblée nationale reste à la marge du problème

Il n’y a rien de bien innovant dans les réponses suggérées aux sondés dans ce domaine. Places en crèche, modes de garde, répartition des congés parentaux entre les deux parents, aide financière directe, aménagement du temps de travail ou télétravail ne sont que des variantes sur ce qui existe déjà. Il est certes question des congés parentaux mieux rémunérés et plus longs, mais rien sur les besoins spécifiques de la femme ; rien non plus sur le crève-cœur que représente l’obligation pratique pour beaucoup de confier leurs enfants à des tiers alors qu’elles aimeraient tant garder leurs enfants à la maison pendant leurs premières années.

On n’allait certes pas espérer qu’une consultation publique de cette nature dénonce le fait que, de ponctions fiscales en charges sociales surgonflées, on ait quasiment rendu impossible le fait de faire vivre une famille avec un seul salaire. Mais de nombreuses études sérieuses montrent déjà que si les femmes pouvaient avoir des enfants plus tôt que d’être obligées de terminer leurs études ou de se lancer dans la vie professionnelle, elles pourraient plus facilement avoir des enfants pendant leurs années les plus fécondes, être plus en forme pour les élever et se lancer ensuite – fortes de cette expérience – dans l’achèvement de leurs études ou le monde du travail.

Il y a une question à laquelle bien des familles nombreuses répondront certainement par la négative : « Au regard de votre expérience personnelle, les aides que vous percevez (RSA, APL, prime d’activité, allocations familiales…) prennent-elles suffisamment en compte la taille des familles ? » Sachant que l’augmentation du nombre d’enfants dans une famille est un des facteurs majeurs de la baisse du niveau de vie, cette question aurait mérité d’être développée, mais aussi réfléchie davantage. Car faire de l’Etat l’acteur majeur dans ce domaine s’accompagne d’un double danger : l’excès de pouvoir de l’Etat et la charge sur les dépenses publiques.

 

La consultation citoyenne dénatalité permet les suggestions individuelles

Heureusement, la consultation comporte plusieurs possibilités de réponses ouvertes où l’on peut faire des propositions ou faire part d’expériences personnelles en la matière. Ou d’expériences nationales : l’exemple hongrois, qui facilite l’accès au logement pour les couples mariés et qui prévoit des exemptions d’impôts à vie pour les mères de plusieurs enfants est intéressant… Faire cesser la propagande sur l’« empreinte carbone » et abroger les contraintes « vertes » sur le logement, en finir avec les obligations « écologiques » en matière de transports et d’énergie sont d’autres pistes que l’enquête néglige. Il y en a bien d’autres – école, liberté éducative, liberté médicale n’en sont que quelques-unes.

On aimerait signaler aux parlementaires le livre du démographe britannique Paul MorlandNo One Left – Why the World Needs More Children (« Plus personne – Pourquoi le monde a besoin de davantage d’enfants ») : il s’intéresse à bien des aspects de la question, y compris la dimension religieuse et le besoin pour les jeunes mères d’être davantage entourées et soutenues dans des sociétés fragmentées. Où tout conspire contre la vie… Il y a une forme de malhonnêteté à parler de tout sauf de cela.

 

Jeanne Smits