Voilà une étude du PNAS qui va faire plaisir aux adolescents – et aux autres êtres humains quelque peu demeurés dans cette phase de leur vie – et clouer le bec aux parents trop rigides qui peinent à séparer junior de son écran d’ordinateur : les jeux vidéo, et spécialement les jeux d’actions très rapides, augmenteraient les capacités intellectuelles de leurs habitués. « Les jeux vidéos rendent intelligent », claironne la presse.
Elle ne fait que répéter ce qu’affirme une étude publiée cette semaine par Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS) selon laquelle les joueurs de Call of Duty et Unreal Tournament 2004 font preuve d’une meilleure capacité à apprendre que ceux qui pratiquent des jeux sans action. Les bénéfices seraient durables, en outre : les meilleures performances ont été constatées un an plus tard.
Daphne Bavelier, professeur et chercheur en sciences cognitives de l’université de Rochester, estime que le fait s’explique par le fait que le cerveau humain ne cesse de prédire ce qui va arriver : « Pour affiner ses capacités à prédire, le cerveau ne cesse de construire des modèles, ou templates, du monde. Meilleur est le modèle, meilleure est la performance. Maintenant nous savons que le jeu vidéo d’action améliore effectivement la qualité des modèles. »
Qu’appelle-t-on intelligent au PNAS ?
Est-ce donc acquis ? Faut-il se visser à son écran de jeux pour devenir plus intelligent ? Jouer jusqu’à 50 heures par semaine sur neuf semaines, comme l’ont fait les cobayes de Mme Bavelier pour obtenir une « courbe d’apprentissage accélérée » face aux nouvelles tâches ?
Cela mérite d’être critiqué – et pas seulement parce que les jeux vidéos d’action sont souvent violents, voire hyper-violents.
Les jeux vidéos annihilent la réflexion
Le ressort de ces jeux très rapides est la coordination œil-main : « action-réaction ». Plus elle est rapide, mieux l’on progresse. Mais cela annihile l’analyse et la réflexion. Sans doute permettent-ils d’améliorer le temps de réaction et la réponse réflexe dans une situation donnée – un avantage certain dans un monde pédagogique dominé par les apprentissages globaux fondés sur la coordination œil-main. Mais, n’en déplaise au PNAS, pour ce qui est de penser et de comprendre, l’activation systématique de ces circuits neuronaux est plutôt de nature à l’entraver.