David Cameron est en campagne. Le Premier ministre britannique prépare activement les élections législatives du 7 mai prochain, qui constituent, à l’horizon politique de l’actuel locataire du 10, Downing Street, l’un des obstacles les plus délicats qu’il ait eu à franchir. Aiguillonné à sa droite par l’UKIP de Nigel Farage, Cameron est houspillé de toutes parts par les tenants de l’orthodoxie européiste qui craignent de le voir, par calcul, engager le Royaume-Uni sur la route d’un « Brexit », une sortie non de la zone euro, puisqu’il n’en fait pas partie, mais, plus définitivement, plus catégoriquement, de l’Union européenne.
Les prophètes de malheur sont donc légion à pronostiquer les pires malheurs si Londres venait à s’engager dans cette voie. Ils assurent que la Grande-Bretagne verrait alors son PIB amputé de 2,2%, et qu’elle serait contrainte d’ouvrir ses frontières à l’immigration.
Effectivement, David Cameron a promis, s’il était reconduit en mai de tenir un grand referendum sur le maintien de son pays dans l’Union européenne. Personnellement, il n’y est guère favorable mais il sait qu’il n’a pas le choix, l’euroscepticisme gagnant chaque jour du terrain au sein de son électoral. A l’heure où la crise semble ne pas pouvoir être jugulée aussi facilement que l’on veut bien le prétendre, les Britanniques ne veulent pas seulement, comme le réclamait Margaret Thatcher, que son argent lui soit rendu ; ils désirent tout simplement qu’il ne soit plus dilapidé par les technocrates de Bruxelles.
« Brexit » : heur ou malheur ?
Aussi le think tank Open Europe s’est-il fendu d’une « étude », pour annoncer les malheurs qui seraient ceux du Royaume-Uni si David Cameron tenait ce qu’il a promis – étant évidemment posé qu’une promesse, et surtout une promesse électorale, n’est pas faite pour être tenue, mais pour remporter l’élection…
A noter que, malgré son a priori européiste, Open Europe estime que la chute de 2,2% du PIB britannique se réaliserait (en 2030…), si Londres, ayant recouvré son entière souveraineté, ne parvenait pas à signer un accord de libre-échange avec ses anciens partenaires européens. Dans le cas contraire, le PIB britannique serait supérieur de 1,55% à ce qu’il demeurait dans l’Union européenne. Comme quoi, le « châtiment » n’est pas aussi évident qu’on veut bien le prétendre !
Quoi qu’il en soit, Londres serait contrainte d’ouvrir ses frontières au reste du monde, et l’immigration exploserait. Comme si ce n’était pas déjà le cas… du fait, effectivement, de certaines de leurs décisions politiques, mais aussi de l’influence impérative de Bruxelles.
Le Royaume-Uni veut rester maître chez lui
David Cameron ne semble pas, en tout état de cause, plus décidé à prêter l’oreille aux oiseaux de mauvais augure qu’aux sirènes qui l’assuraient, il n’y a guère, des bienfaits de l’appartenance à l’Union européenne. Il sait que, s’il venait à perdre sa place, il aurait tout perdu. A tout prendre, et compte tenu du spectacle donné par les pays les plus impliqués dans la politique de Bruxelles, il préfère encore demeurer sur son lopin de terre le premier, que le nième à Bruxelles, bien pâlotte copie de l’antique Rome.
Le Premier ministre britannique n’a d’ailleurs pas hésité à donner quelques exemples flagrants – et cinglants. « Les travaillistes nous rendraient aussi mauvais que la France », écrivait-il lundi dans une tribune publiée par le Sunday Times.
Et de continuer sur sa lancée en rappelant que le leader du Labour, Ed Miliband, s’était « précipité à Paris » au lendemain de la victoire de François Hollande dont il voulait suivre la politique. « Mais où cette voie a-t-elle mené ? », s’interroge-t-il en remarquant que le chômage, dans l’Hexagone, est « presque deux fois plus élevé » qu’au Royaume-Uni, et que l’économie britannique progresse « sept fois plus vite » que celle de la France.
Ne pas s’engager dans la route suivie par la France
Dès lors, suivre la politique de François Hollande aurait conduit à « des destructions d’emplois catastrophiques, à un recul du niveau de vie », et à un endettement public « à faire pleurer ».
Pour être approximatif, ce bilan n’en est pas moins proche de la réalité, et la raillerie britannique ne devrait pas contribuer à renforcer des relations qui n’ont fait que s’altérer depuis l’arrivé de François Hollande à l’Elysée.
Et c’est après tout le droit des Britanniques de tenter leur politique de leur côté, plutôt que de la subir des ordres d’un Léviathan aveugle et sourd. Et boulimique.