Ce sont, pour la plupart, de petites gens. Agriculteurs, retraités, chômeurs, ils ont fait confiance à leur banquier, et investi dans Banco Espirito Santo l’épargne de toute une vie. Las ! au Portugal, comme ailleurs, la gestion européenne de la crise a sauvé les Etats et les institutions bancaires, mais ruiné les pauvres gens.
« Mon conseiller bancaire m’a assuré que c’était un placement sans risque, à rendement garanti. Maintenant, je n’ai quasiment plus rien ! », souligne, désemparé, l’un d’eux qui n’a plus, pour vivre, qu’une retraite de quelques centaines d’euros. Mais leur histoire est systématiquement la même. A leur insu, quelque 5.000 clients de Banco Espirito Santo ont troqué leur épargne contre des créances de Rioforte et Espirito Santo International, deux sociétés luxembourgeoises appartenant au groupe. Celles-ci n’ont pas tardé à faire faillite. Et le pactole – plus de 500 millions d’euros tout de même – s’est évaporé.
Dans la foulée, Banco Espirito Santo a disparu elle aussi. Parmi les ruines, les actifs sains ont permis de créer une nouvelle banque : Novo Banco.
La faillite de Banco Espirito Santo
Mais ces petits actionnaires ne récupéreront sans doute jamais leurs billes. Comme à Chypre, comme en Autriche, comme bientôt partout ailleurs, ils ont fais les frais du nouveau système de sauvetage des banques adopté par l’Union européenne, et qui consiste à faire payer les actionnaires et créanciers non prioritaires, pour éviter aux contribuables de mettre la main à la poche.
Oubliée, pour la plupart d’entre eux, la garantie de remboursement par l’Etat de 100.000 euros : elle n’est pas valable pour les produits financiers à haut risque. Et celui qu’ils ont pris, sans même le savoir puisqu’ils ont cru en la garantie verbale qui leur a été donnée, est de taille.
Quant à la Banque du Portugal, qui avait obligé l’an dernier Banco Espirito Santo à provisionner 1,25 milliard d’euros pour protéger les petits détenteurs de titres, elle assure désormais que cette réserve « ne constitue pas une garantie de remboursement »…
Au Portugal, la ruine des petites gens
Eduardo Stock da Cunha, le patron de Novo Banco, estime ne pas être concerné. « Il ne revient pas à Novo Banco de payer », affirme-t-il ; mais « on travaille à une solution », ajoute-t-il pour consoler ces interlocuteurs.
Mais ceux-ci n’y croient plus : trop, c’est trop… Regroupés en association, ils manifestent régulièrement aux cris de « Voleurs ! », « Rendez-nous notre argent ! »
Et l’un d’eux pointe la nouvelle directive européenne : « Nous sommes les cobayes du nouveau système européen de sauvetage des banques. Le Portugal est un pays pauvre, ils nous méprisent. »
Un cynisme que dénonce l’un de leurs avocats, Carlos Lucena : « Malheureusement, les ratios de capital d’une banque sont jugés plus importants que la détresse des êtres humains. »
Allo ! Bruxelles ?