Les affres des migrants de Birmanie et du Bangladesh, à la dérive au large de l’Indonésie et victimes d’un « ping-pong » humain alors qu’ils sont renvoyés aussi bien par les autorités indonésiennes que par la marine malaise, révèlent une misère qui n’est pas sans lien avec les programmes nationaux et internationaux du contrôle de la population. Si quelques milliers de ces miséreux ont été secourus, on estime à plus de 8.000 – peut-être à 20.000 – le nombre de ceux qui dérivent toujours dans la mer d’Andaman à bord de navires où tout manque, abandonnés par leurs passeurs : parmi eux, de nombreux Rohingyas, membres d’une minorité musulmane persécutée en Birmanie.
Ces nouveaux « boat-people » birmans risquent la mort. Pour Michael Cook, du site d’information et de réflexion bioéthique Bioedge, l’une des raisons pour lesquelles ils préfèrent prendre la mer plutôt que de rester au pays est la mise en place de lois de contrôle de la population de plus en plus contraignantes par les autorités birmanes. Le parlement birman – ou de l’Union du Myanmar, nom officiel du pays – vient d’adopter une loi qui menace gravement la santé maternelle et le respect de la vie dans ce pays.
Birmanie : une loi sur le contrôle de la population inspirée par les Objectifs du Millénaire de l’ONU
La loi rend obligatoire « l’espacement des naissances », imposant aux femmes un délai de trois ans entre les naissances successives : elle devrait entrer en vigueur prochainement, dès qu’elle aura été signée par le président Thein Sein.
Cette loi sur le contrôle de la population répond au moins en apparence à la mise en œuvre des Objectifs du Millénaire de l’ONU, dont on voit ainsi la nature malthusienne. Mais un objectif peut en cacher un autre : une telle loi peut facilement être utilisée – en outre – pour favoriser l’oppression des minorités ethniques. Et les Rohingyas, au nord de la Birmanie, font partie des minorités ethniques les plus persécutées au monde, en l’occurrence par la population bouddhiste dominante.
Migrants à la dérive en Asie : les Rohingyas birmans fuient la persécution
Aux termes de la nouvelle loi, « les autorités pourront mettre en place des politiques de population coercitives si la croissance de la population, l’accélération des taux de natalité ou l’augmentation du taux de mortalité infantile ou maternelle ont un impact négatif sur le développement de la région », note Michael Cook. Selon le quotidien The Irrawaddy, « le déséquilibre entre la population et les ressources, les mauvais indicateurs socio-économiques et la pénurie de nourriture en raison de migrations internes » pourront également justifier la mainmise du pouvoir sur la fécondité des familles.
Si toute la population birmane est menacée par une telle usurpation des droits des familles, il semble que la loi, sous couleur de répondre aux objectifs onusiens du Millénaire – bien réels et inquiétants – ait pour objectif de réduire la population musulmane. Elle fait en tout cas partie d’une batterie de mesures moins controversées comme l’interdiction de la polygamie et le contrôle des mariages interreligieux par les autorités locales.