Le pape François crée un tribunal pour juger les évêques qui ont « couvert » des prêtres pédophiles

Le Pape François crée un tribunal pour juger les évêques qui ont « couvert » des prêtres pédophiles
 
Le pape François a approuvé mercredi, lors de sa 10e réunion avec son Conseil de cardinaux, la mise en place d’un tribunal chargé de juger pour « manquement à leur devoir professionnel » les évêques accusés d’avoir « couvert » les activités de prêtres pédophiles au sein de leur diocèse. Cette nouvelle instance judiciaire, installée dans le cadre de la Congrégation pour la doctrine de la foi, répond à une revendication de longue date des associations de victimes. Les évêques, qui sont plus de 5.000 dans le monde au total, s’exposeront ainsi à se voir demander des comptes conformément aux dispositions du droit canon.
 

Un tribunal chargé les évêques : une réponse aux exigences de l’ONU ?

 
Le nouveau dispositif bénéficiera de nominations ad hoc et d’embauches nouvelles, et sera soumis à une période d’essai de cinq ans afin que son « efficacité » puisse être vérifiée.
 
Est-ce un début de réponse aux exigences du Comité pour les droits de l’enfant de l’ONU ? Une dépêche de l’agence suisse ATS le laisse entendre. Il s’agit du rapport publié au début de 2014 qui au nom de la protection de l’enfance demandait certes des mesures face aux abus sexuels, mais qui réclamait une rénovation du droit canon afin de l’expurger de ses dispositions discriminatoires et pour assurer l’accès de chaque enfant à l’éducation et à la santé sexuelle, le respect des droits des enfants opposés à ceux de leurs parents, la fin des « stéréotypes de genre »…
 
Des dizaines d’évêques seraient impliqués. Notamment ceux que l’on accuse d’avoir refusé d’écouter les plaintes de victimes, d’avoir protégé les prêtres accusés et soupçonnés, ou de les avoir simplement mutés sans prendre de moyens pour qu’ils ne puissent pas renouveler leurs agressions.
 

Les dispositions approuvées par le pape François

 
Les cinq propositions approuvées par le pape sont les suivantes :
 
1. Que la Congrégation des évêques, de l’Evangélisation des Peuples ou celle des Eglises orientales aient compétence pour recevoir et examiner les plaintes pour « abus d’autorité épiscopale ».
 
2. Que le Saint-Père donne mandat à la Congrégation pour la doctrine de la foi pour juger les évêques dans les cas de délits d’abus de leur office.
 
3. Que le pape autorise l’institution d’une nouvelle section judiciaire au sein de la Congrégation pour la doctrine de la foi et la nomination d’un personnel stable qui prête ses services au Tribunal apostolique. Et ce en concordance avec le préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi.
 
4. Que le Saint-Père nomme un secrétaire responsable de la nouvelle section judiciaire et qui s’occupera également des cas d’abus de clercs sur des mineurs ou des personnes vulnérables. Toujours en consultant le Préfet de la Congrégation (le cardinal Müller).
 
5. Que le pape établisse une période de cinq ans pour évaluer l’efficacité de la nouvelle section judiciaire.
 

Le cardinal George Pell a-t-il « couvert » un prêtre pédophile ?

 
Le cardinal George Pell, qui fait partie du « G9 » du pape, participait à ce titre à la réunion qui s’est tenue de lundi à mercredi à la Domus Mariae. Il est lui-même sous le coup d’accusations d’une ancienne victime d’abus sexuels de la part d’un prêtre, le Britannique Peter Saunders : selon ce dernier, le cardinal australien aurait refusé de prendre sa plainte au sérieux. Le cardinal Pell fait partie des prélats qui ont parlé fermement contre les innovations pastorales – et donc doctrinales – proposées lors du synode sur la famille à l’initiative du cardinal Kasper pour les divorcés remariés, et qui pour finir ont abouti à la présentation favorable de l’« amour homosexuel ».
 
Le cardinal Pell a nié ces accusations en bloc et menacé Saunders de le poursuivre.
 
Si l’on comprend l’importance pour les victimes d’abus de voir punis ceux qui ont abusé d’eux comme ceux qui ont « protégé » les agresseurs, il ne faut pas perdre de vue en effet que le régime particulièrement contraignant progressivement mis en place dans l’Eglise au nom de la « tolérance zéro » peut avoir des effets pervers. Non seulement elle instaure, peu ou prou, une sorte de présomption de culpabilité à l’égard des prêtres, en outre elle peut avoir tendance à faciliter voire encourager les dénonciations calomnieuses.
 

Anne Dolhein