Les méchants extrémistes sont là, aux seuils des enceintes politiques, prêts à descendre dans les rues – c’est désormais la plus grande peur qui doit régner dans les têtes et dans les cœurs… Rien à craindre des migrants, bien évidemment. De la charge économique et sociale des familles, de la criminalité potentielle de ces SDF, des viols répétés en Allemagne, de la prostitution forcée et de la maltraitance des enfants dans les camps d’accueil ou encore de l’infiltration avérée des combattants de l’État Islamique… Billevesées que tout cela. La presse européenne, elle, n’a qu’un mot à la bouche : « extrême-droite ». L’Europe a déjà donné gage de toute sa bonne volonté avec le récent « engagement » syrien. La seule terreur qui tienne désormais, c’est celle de ces xénophobes qui utilisent les migrants comme capital de contestation et opportunité politique.
Exit le problème de fond.
L’extrême-droite partout en Europe ?
Nous l’avons déjà rapporté dans ces pages, le vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans, a exprimé, mercredi à la BBC, sa profonde préoccupation au sujet des développements politiques en Europe, en réaction à la crise des migrants : « Si nous ne sommes pas en mesure de trouver des solutions durables à la crise, vous verrez une poussée de l’extrême droite à travers le continent européen »…
Avertissement « prophétique » dont on observe l’avenance dans un certain nombre de pays – la vague populiste est bien là.
Le Nord, si libéral, terre d’accueil entre toutes, n’y échappe pas. Déjà, le 20 août dernier, les Démocrates de Suède (SD) étaient placés en tête d’une enquête d’opinion. Au Danemark, les préoccupations migratoires sont devenues un tel sujet que le Parti libéral national a fait voter, début septembre, une réduction drastique des prestations sociales. Le tenant de cette ligne « dure », le ministre de l’immigration et de l’intégration, est actuellement le politicien le plus populaire du pays.
Même en Norvège, ce thème de l’immigration de masse occasionne tant de débats que l’agence nationale de renseignement a averti elle-même du plus grand danger lié à ce phénomène, selon elle : l’explosion des partis politiques de droite…
En Belgique, le Vlaams Belang a gagné deux points d’intention de vote en Flandre, en moins de six mois. Et 34% des Français, selon un récent sondage, se disent proches des vues de Marine Le Pen sur la question migratoire : on « craindrait » que pour la première fois, le Front national, puisse arriver à la tête de plusieurs régions lors d’élections en décembre…
Mais aussi l’Autriche, l’Allemagne, la Pologne…
En Pologne, le parti Droit et Justice (PiS) va, semble-t-il, s’installer durablement. Parti conservateur, clérical, eurosceptique, défenseur de l’identité nationale et de la souveraineté du pays, il a fait élire son candidat à la présidentielle, Andrzej Duda, en mai dernier. Et les élections législatives d’octobre promettent, selon tous les sondages, une consécration politique de cette victoire.
En Autriche, l’affaire est moindre, néanmoins le FPÖ (Parti autrichien de la liberté) a carrément doublé son score dans une élection régionale en Haute-Autriche : il obtiendrait 30,5% des voix contre 15,3% lors de la précédente élection en 2009, les soutirant aux chrétiens-démocrates ainsi qu’au Parti social-démocrate. Les élections de la ville-État de Vienne, dans deux semaines, vont être l’objet de toutes les attentions.
En Allemagne, pas encore d’élections, mais Angela Merkel qui avait si lyriquement tendu les bras aux migrants et les entasse aujourd’hui dans des camps, incapable de gérer la situation, voit monter les tensions « indigènes ». Plusieurs manifestations hostiles aux réfugiés ont émaillé le week-end, les heurts avec la police se multiplient. Dimanche, le patron des renseignements intérieurs allemands a mis en garde dimanche contre une radicalisation de l’extrême droite.
A noter que le 24 septembre, a été officiellement reçu en Bavière le Premier ministre hongrois Viktor Orbán, par le ministre-président du gouvernement bavarois : ce dernier fait partie de la CSU bavaroise, dont les 56 députés sont, encore, le soutien du CDU de Merkel – jusqu’à quand ?
Migrants : la presse s’attaque au « cœur de métier » des extrémistes
Affabulations : non pas. Il y a une réelle prise de conscience et une réaction dans les urnes et dans les rues. L’autre intérêt réside dans l’exacerbation politique et médiatique qui s’opère : la diabolisation est nettement en vue.
On interroge des analystes, des spécialistes de l’extrême-droite. L’historien Nicolas Lebourg rappelle que l’extrême-droite a prospéré en Europe ces dernières années grâce à la conjonction de la crise géopolitique ouverte par les attentats aux États-Unis du 11 septembre 2001 et de la crise financière de 2009 : « Avec l’ajout d’une troisième crise, migratoire, ils devraient faire des cartons, d’autant que l’immigration reste leur cœur de métier »…
« Leur attitude consiste globalement à mener un combat sémantique pour dire que les gens qui arrivent ne sont ni des réfugiés ni des migrants, mais des envahisseurs », souligne le politologue Jean-Yves Camus, spécialiste de la droite radicale, venus chercher « des prestations sociales » comme a dit Marine Le Pen.
La peur politiquement correcte
On démine le terrain politique. Personne ne se penche sur la stricte réalité des conséquences du phénomène migratoire hors normes à laquelle nous assistons. Il n’y a plus que ce point à l’horizon qui grossit et se rapproche dangereusement, ce magma informe et repoussant de l’extrême-droite, cette hydre politique et sociale qui défigurera l’Europe si « on » n’agit pas (SOS Racisme, fustigeant la Hongrie, a parlé d’ « idéal européen assassiné »).
Magma informe, car toute personne se réclamant du durcissement vis-à-vis des migrants sera désormais qualifiée de xénophobe, d’extrémiste nocif. Le spectre des accusés s’est de lui-même élargi – et grandement si l’on prend le pouls de l’opinion populaire européenne.
Hydre politique, car cette extrême-droite mène, selon les mots de Jean-Yves Camus, une sorte de croisade contre les « traditions chrétiennes » de l’Europe – au passage, il admet que la plupart des migrants sont musulmans. Et que ce n’est pas dans l’esprit européen de chercher à conserver ses racines, blanches, grecques, latines et, devons-nous ajouter, catholiques et chrétiennes…
Avec ces débarquements incessants de migrants qui jettent leurs passeports pour mieux passer pour des réfugiés, les réactions politiques et sociales vont être de plus en plus franches. Maintenant, est-ce vraiment un dégât collatéral imprévu de l’humanisme non raisonné de nos élites… ? Ou une réaction attendue qui permet, par pointage médiatique, de détourner l’attention populaire et de diaboliser plus encore l’opposition ? Il n’y a, en tout cas, qu’une radicalisation : celle de ce brassage imposé, de ce cosmopolitisme maçonnique érigé en système politique.