Selon une information de l’Associated Press, la Russie sollicite actuellement un droit de survol des Etats-Unis par ses avions de reconnaissance Tu-214ON dotés d’une technologie d’espionnage dernier cri, auprès de l’Open Skies Consultative Commission (OSCC). La demande inquiète les hauts responsables militaires américains. L’amiral Cecil Haney, commandeur de l’US Strategic Command, vient d’affirmer que le traité « Open Skies » (« cieux ouverts ») « est devenu un élément crucial du dispositif russe de collecte de renseignements dirigé contre les Etats-Unis ».
« Outre qu’ils peuvent survoler les installations militaires, les vols Open Skies peuvent survoler et récupérer des renseignements sur le Département de la Défense et la sécurité nationale, … des infrastructures critiques. Il devient de plus en plus difficile de dire le niveau de vulnérabilité auquel s’exposent (les Etats-Unis) à travers l’exploitation de ces données et le coût de son atténuation », a-t-il écrit.
Au nom d’“Open Skies”, des vols de reconnaissance de la Russie aux Etats-Unis
Le nouvel avion de reconnaissance Tu-214ON permet un espionnage d’une précision inédite au bénéfice des Russes. Vidéo, caméras optiques panoramiques, scanners infrarouge pour la vision de jour comme de nuit, radar à synthèse d’ouverture pour une vision par tous les temps, senseur digital électro-optique : toutes ces techniques sont embarquées, permettant de faire la différence entre un char militaire et un semi-remorque depuis plusieurs kilomètres d’altitude.
Des responsables politiques de l’administration Obama minimisent le risque associé à de telles opérations d’espionnage, assurant que la Russie ne pourra qu’obtenir confirmation de ce qu’elle sait par ailleurs : pour Rose Gosemoeller, sous-secrétaire d’Etat au contrôle de l’armement et à la sécurité internationale, les termes du traité Open Skies permettront au contraire aux Etats-Unis de surveiller les renseignements recueillis puisque toutes les données récoltées doivent lui être transférées.
L’avion de reconnaissance Tu-214ON pour survoler le Pentagone ?
Mais pour le directeur de la Defense Intelligence Agency, Open Skies a été négocié à une époque révolue et ne correspond plus aux possibilités actuelles. D’autres commentateurs soulignent que la Russie ne respecte pas ses obligations dans le cadre du traité : elle refuse à l’OSCC de laisser les autres parties au traité survoler Moscou ou la Tchétchénie, tout comme l’enclave russe de Kaliningrad entre la Pologne et la Lituanie.
Côté russe, l’application du traité Open Skies serait donc « sélective » et conforme avant tout à ses propres intérêts.
L’idée d’une surveillance aérienne mutuelle remonte à 1955, année où le président Dwight Eisenhower en fit part au Premier ministre Nikolaï Boulganine. On n’en fit rien jusqu’à l’arrivée de George H.W. Bush qui proposa de nouveau la signature d’un accord comme moyen d’accroître la confiance entre les pays de l’OTAN et ceux du Pacte de Varsovie ; ce fut fait à Helsinki en mars 1992 pour une entrée en vigueur en janvier 2002. Depuis lors, les vols de reconnaissance se sont succédé régulièrement.
Les conservateurs américains y voient une menace pour la sécurité et la souveraineté des Etats-Unis.