Faillite du transporteur Hanjin : un signe avant-coureur de récession globale ?

Faillite transporteur Hanjin signe récession globale
 
Hanjin Shipping, septième société mondiale de transport maritime, a déclaré faillite la semaine dernière, elle qui transportait jusque-là sur ses 200 cargos, pas moins de 100 millions de tonnes de marchandises vers les importateurs du monde entier. L’événement fait suite à des années de pertes accumulées au rythme du ralentissement de l’économie mondiale. Il n’aurait pas dû surprendre les analystes. Pire : cette faillite en annonce d’autres parmi les gros transporteurs confrontés aux mêmes problèmes, faisant dire à certains qu’il s’agit là d’un signe avant-coureur d’une récession globale.
 

Des tonnes de marchandises bloquées en mer en raison de la faillite de Hanjin

 
La faillite retentissante du transporteur coréen a entraîné le blocage en mer de 90 cargos – et de millions de dollars de marchandises – car les sociétés de déchargement refusent leurs services tant qu’elles ne sont pas sûres d’être payées. Si la compagnie Hanjin a proposé 90 millions de dollars de ce qui reste de ses actifs pour financer les opérations – dont 36 prélevés directement des avoirs de son PDG – cela reste très en-deçà des 543 millions de dollars nécessaires pour payer le déchargement de tous les cargos qui tournent au large des ports du monde entier.
 
C’est d’autant plus préoccupant que le retard risque d’avoir un impact négatif sur les recettes du Vendredi Noir, le « jour fou » où Américains et Canadiens multiplient les achats au lendemain de Thanksgiving, et de la saison des courses de Noël. Et ce même si les importateurs se précipitent pour essayer de s’arranger autrement afin de se procurer des marchandises à temps.
 
Samsung estime ainsi à 40 millions de dollars la valeur des marchandises – des réfrigérateurs aux Smartphones Galaxy – qui attendent d’être déchargées. De plus, le déchargement est compliqué par des financiers de Hanjin, qui ont déjà saisi certains bateaux comme garanties en vue de se faire rembourser des emprunts courant depuis des années.
 

Cinq signes annonçant une récession globale

 
Ce qui est étonnant, c’est que la faillite de Hanjin a créé la surprise au sein de la presse nationale américaine. Le Wall Street Journal a publié mercredi dernier un grand article sur les difficultés de Hanjin – mais sans dire un mot du fait que le cas Hanjin est probablement le premier d’une longue série de banqueroutes à travers toute la chaîne logistique internationale.
 
L’analyste financier Adam Hayes remarquait pourtant dès janvier que toute une série de facteurs conduisent actuellement vers une récession globale :
 
— la situation européenne, constituée par le renflouage répété des PIIGS (Portugal, Italie, Irlande, Grèce, Espagne) par la Banque centrale européenne et le FMI ;
 
— la bulle chinoise qui implose en raison de la construction de villes fantômes, des surcapacités des industries de base de l’acier ou du ciment, et qui se traduit par un ralentissement « officiel » de la croissance chinoise ramenée de 10 % à 7 % – et probablement moins ;
 
— le problème des emprunts étudiants, aux Etats-Unis : 1.160 milliards de dollars cumulés d’emprunts (à la fin 2014) empêchent les étudiants d’investir dans des activités économiques comme l’achat de maisons et de voitures – ou de se marier ;
 
— le problème des banques centrales, incapables de réduire davantage les taux d’intérêts comme l’exige pourtant l’aberrante doctrine keynésienne en vue de stimuler des économies moribondes tout autour du monde, car les taux sont déjà à zéro, voire en-dessous ;
 
— le problème des données économiques : les symptômes ressemblent à s’y méprendre à ceux qui précédaient la grande Dépression : chute des ventes au détail, déclin des commandes industrielles, croissance du PIB à peine positive, ralentissement de la croissance des exportations et baisse des profits des entreprises.
 

Le transporteur Hanjin, première victime de la récession globale

 
En février, la banque Citigroup a conclu, en se fondant notamment sur l’existence de ces facteurs, que la croissance mondiale pourrait ne pas dépasser 2 % sur un an au dernier trimestre 2015, ce qui correspondrait selon ses propres critères à une récession globale, si la tendance se poursuit.
 
En mars, l’OCDE notait que les perspectives globales annonçaient un tassement de la croissance au Royaume-Uni, aux Etats-Unis, au Japon et au Canada, et probablement aussi en Allemagne. Sur les vingt pays de l’OCDE, selon son rapport, seules la France, l’Italie et l’Inde montrent des signes de vie économique.
 
L’index Cass Freigt de juillet – qui mesure le trafic de fret nord-américain – a confirmé le ralentissement global de l’économie, remarquant que celui-ci a commencé il y a plusieurs années. Cela coïncide avec le début d’une série de pertes pour Hanjin, qui ont finalement plongé la compagnie de transport maritime coréenne dans la faillite déclarée la semaine dernière.
 
Cette faillite en annonce probablement d’autres parmi les grands acteurs de la chaîne logistique mondiale, tant que l’économie globale continuera à rétrécir. Comme l’a dit Warren Buffett, « ce n’est qu’à marée basse que l’on voit qui nageait nu ». En avril, Hanjin appelait déjà à l’aide ses bailleurs de fonds afin de pouvoir rester à flot. Lorsque les banques ont finalement refusé de continuer de la renflouer la semaine dernière, la société a dû avouer qu’elle nageait nue depuis au moins 2011.
 
Et elle n’était probablement pas la seule. On peut s’attendre à ce que les médias révèlent d’autres cas dans les mois à venir.
 

Louis Moulin