On parle d’un gisement « semi-infini » : c’est au large de Japon, à l’intérieur de sa Zone économique exclusive et à proximité de l’atoll corallien de Minami-Torishima qu’on a trouvé une véritable mine d’or moderne de terres rares dont la taille et la concentration sont comparables à celles dont dispose actuellement la seule Chine. Pour le monopole chinois, ce serait une déconvenue de taille : voilà des années que la Chine joue de sa domination sur le marché mondial des terres rares et qu’elle s’efforce en outre de racheter les gisements trouvés hors de son territoire, en Afrique par exemple.
Les terres rares sont indispensables pour la fabrication de l’ensemble des dispositifs électroniques tels les batteries, les disques durs, les engins électroniques portables, les microphones, les scanners médicaux… La liste est longue. Grâce à ses réserves de ces minerais, la Chine pouvait prétendre à la domination de ce marché et surtout, menacer de fermer les robinets ce qui lui donnait un pouvoir de pression considérable.
« Donnait » à l’imparfait, puisque la découverte du nouveau gisement dans les fonds marins près de Minami-Torshima (Marcus Island), par 5.600 à 5.800 mètres de fond, offre au Japon la possibilité de concurrencer le puissant voisin chinois. A 1 850 km au sud-est de Tokyo, la zone a été étudiée par l’université Waseda sur une surface d’environ 2.500 km2. Ils estiment possible que le gisement abrite plus de 16 millions de tonnes de terres rares.
La découverte d’un gisement de terres rares au large du Japon menace le monopole Chinois
Selon les estimations des chercheurs, cela pourrait représenter – en fonction des besoins actuels – 780 ans d’approvisionnement en yttrium, et pour 620 ans d’europium, 420 ans de terbium, et 730 ans de dysprosium. L’yttrium sert notamment à la fabrication des Smartphones, des radars, des missiles et des voitures électriques.
Dans le même temps, les chercheurs ont confirmé la pertinence des échantillons prélevés par une autre équipe de l’université de Tokyo dans la même zone : celle-ci avait annoncé la découverte d’une strate boueuse sous le sol marin contenant jusqu’à 0,66 % de terres rares.
La difficulté d’exploiter des gisements aussi profonds reste considérable, et le passage à des opérations commerciales pourrait prendre plusieurs années, puisqu’il reste encore à déterminer le meilleur moyen de procéder à l’extraction des minerais. Mais leur concentration est un puissant facteur d’encouragement puisque ces terres rares sont en général extrêmement dispersées et donc difficiles à trouver dans des dépôts exploitables, quoique très répandues dans la nature. Mais, bonne nouvelle, les terres rares de ce gisement de Minami-Torishima sont faciles à isoler des autres substances par simple filtration.
Les terres rares de Minami-Torishima aussi abondantes que celles de la Chine
Le Japon a en tout cas tout intérêt à passer à l’action. Dans la situation actuelle, la Chine, qui a pu jouir de plusieurs décennies de quasi monopole dans le domaine, a mis en place un cartel d’exploitation des mines appartenant à l’Etat, et c’est le gouvernement communiste de Pékin qui a tout pouvoir pour décréter des limites aux extractions et des quotas d’exportation. Un véritable joker qui a permis à la Chine de soutenir à son gré, ou d’éliminer à l’inverse, ses partenaires commerciaux.
Ainsi, entre 2010 et 2015, Pékin avait imposé une limite de 35.000 tonnes par an à ses exportations de terres rares au nom de la conservation des ressources rares et de la protection de l’environnement – quelle vertu ! Cela avait conduit à une pénurie internationale et à une compétition très profitable à la Chine de la part des acheteurs américains, européens, japonais et sud-coréens.
La Chine avait dû abandonner ces quotas à la suite d’une procédure lancée par les Etats-Unis sous Barack Obama auprès de l’Organisation mondiale du commerce.