La réglementation européenne des permis d’émission de carbone aura fait la fortune des catégories les plus rapaces de financiers : les fonds spéculatifs et les boursicoteurs haut de gamme. Les contrats carbone de l’UE auront été, cette année à la City de Londres, le secteur le plus couru, avec un plus haut de sept ans à 20,84 euros, cours quintuplé depuis le printemps 2017 et plus forte hausse au monde parmi les « matières premières ». Ces « investissements verts » se sont totalement affranchis des prix de l’énergie et des matériaux de base. Le prétendu souci écologique aura servi le plus certain des vampirismes financiers alors que, relève l’analyste Ambrose Evans-Pritchard dans le Daily Telegraph, les indicateurs avancés trahissent une dégradation de l’économie mondiale. Et de nombreux facteurs risquent de promettre aux cours de ces permis d’émission un avenir erratique sur un marché hautement spéculatif, aux conséquences économiques incalculables.
Les permis d’émission de carbone se sont envolés sur le marché alors que les matériaux de base baissent
Les permis d’émission se sont envolés alors que les matériaux de base chutent. Le cuivre a perdu 17 % depuis juin. Les échanges commerciaux ont calé avant même que Donald Trump ne relève ses droits de douane. En Chine, la croissance des investissements en capital fixe a chuté à des niveaux inconnus depuis les années 1990 sur fond de répression des banques parallèles. La hausse des taux de la Réserve fédérale draine vers les Etats-Unis les liquidités mondiales au détriment des émergents. Si le pétrole s’est mieux comporté, c’est pour des raisons propres, la chute de la production du Venezuela, les nouvelles sanctions contre l’Iran, le manque de pipelines aux Etats-Unis.
Et pourtant les droits d’émission de carbone s’envolent ! Ces contrats européens sont le prix à payer pour que les 11.000 sites industriels, aciéries ou usines, soit 45 % des émissions de gaz à effet de serre supposé en Europe, puissent en rejeter. L’Europe édicte que le CO2 modifie le climat, ce qui est contesté par nombre de scientifiques.
L’UE a adopté un système « bureaucratique » de gestion des permis d’émission de carbone
Ambrose Evans-Pritchard explique : « Ce qui a changé, c’est que Bruxelles a finalement réformé son système de permis d’émission de carbone pour en arriver à un modèle d’incompétence bureaucratique et d’inculture financière. L’UE a d’abord mis sur le marché beaucoup trop de permis carbone, sans possibilité d’ajustement quand la production industrielle s’est effondrée en 2008 puis quand la zone euro est entrée deux fois en récession. Puis changement de cap : un nouveau système approuvé cette année permet d’éponger un surplus de 1,7 milliards de tonnes. « C’est comme si une banque centrale faisait du resserrement quantitatif », explique Mark Lewis, de Carbon Tracker. Le surplus va baisser considérablement d’ici à cinq ans avec 24 % de retraits du stock de droits excédentaires chaque année jusqu’en 2023. La masse globale des permis d’émission, elle, baissera de 1,74 % en 2019 et jusqu’à 2,2 % en 2021. Le cours de ces titres a donc explosé. Et les entreprises qui possèdent des droits inutilisés les stockent en vue de futurs bénéfices.
« Les opérateurs financiers sont derrière tout ça », explique Mark Lewis, qui prévoit un doublement du cours d’ici à 2020, à 40 euros, avec des pics probables à 50 euros cet hiver en raison des pénuries de gaz en Europe. La banque allemande Berenbergs prévoit même 100 euros en 2020. Energy Aspects voit une hausse limitée à 38 euros en 2030 en raison de l’application de lois antipollution mi-2020 qui entraîneront des fermetures de mines de charbon. Mais pour Mark Lewis, « on atteint les limites politiques de la hausse des cours ».
Les permis d’émission de l’UE plus chers que ceux du Royaume-Uni : un atout pour le Brexit
Le cours des permis d’émission de l’UE a dépassé celui des droits britanniques établi à 18 livres la tonne (19,87 euros). Alors que le surcoût britannique, depuis cinq ans, a largement expulsé le charbon du marché local de l’énergie, il a aussi permis à l’industrie d’outre-Manche d’augmenter sa compétitivité face à ses rivaux européens. Aujourd’hui, les chances sont égales. De plus, la livre n’est plus surévaluée. Ces deux facteurs devraient donc avoir un impact positif sur l’industrie britannique dans le cadre du Brexit. Si le Royaume-Uni effectuait une « sortie sèche » de l’UE, c’est l’Europe elle-même qui pourrait subir un désastre. Les permis d’émission britanniques pourraient inonder le marché. Et les cours s’effondrer.
Les droits carbone sont l’arme principale de l’UE pour réduire les émissions de CO2 de 40 % en 2030 par rapport à 1990. Le consensus fixe à 30 euros le prix de la tonne pour imposer un basculement majeur du charbon vers le gaz, qui émet deux fois moins de CO2, ou vers les renouvelables. Au final, il apparaît qu’il faudrait un cours de 50 euros pour satisfaire aux objectifs de l’Accord de Paris sur le climat et sa prétention surréaliste de limiter par ce seul fait à 2°C la hausse des températures globales, ou de ce qui en tient lieu pour les officines météorologiques réchauffistes, par rapport à l’ère préindustrielle.
Une pause après l’envolée des cours des permis d’émission, devenus des titres spéculatifs
Conclusion d’Ambrose Evans-Pritchard : le cours des permis d’émission de carbone européens devrait connaître une pause après son envolée. « Au final, ces permis d’émission sont des hybrides bizarres, ni valeurs purement spéculatives comme le bitcoin mais en rien assises sur de vraies produits », prévient-il. Le développement des nouvelles énergies, du nucléaire et de la recapture du carbone pourrait les rendre inutiles. Leur cours devrait devenir erratique, favorisant la spéculation. « Les investissements verts n’ont plus l’altruisme pour seul motivation d’achat », conclut-il.