Le mot agression est un des mots qui donnent le plus de résultats sur Google (63.900.000 en 0,4 secondes). C’est devenu en France une scène de la vie quotidienne. Si l’on n’y joint nul autre mot, le moteur de recherches propose en premier « Bordeaux : une grand-mère et sa petite-fille violemment agressées », l’article de RTL. Elles allaient rentrer chez elles, un homme les a jetées par terre. Pour rien. Si vous tapez Annecy ou Lyon, cela se corse.

L’agression d’Annecy réserve des surprises

Si vous ajoutez par exemple Annecy, vous tombez en premier lieu sur ce titre : « La victime était en fait l’auteur d’une agression au couteau », c’est l’histoire d’un Ghanéen sous OQTF de 28 ans qui se disait victime d’une agression et qui avait en fait menacé un compère de 32 avec un couteau afin de recouvrer une créance impayée. En second lieu, figure l’affaire du massacre au jardin d’enfants, à laquelle est consacrée ce titre : « Attaque au couteau à Annecy : “Il ne faut pas céder à la tentation de la défiance et de la peur, dit le maire” ».

A Lyon, un jeune tué, un prêtre jeté à terre

Si vous tapez maintenant Agression Lyon, cela se complique. En premier paraît : « Métropole de Lyon. Après l’agression mortelle, Meyzieu craint une vendetta. » Un « jeune » a été tué lors d’une « bagarre » en banlieue. En quatrième : « Lyon : un prêtre agressé au sein de sa paroisse. » Une dizaine de jeunes l’ont jeté et maintenu par terre en hurlant des insultes anti-chrétiennes. Légèrement blessé, il n’a pas voulu donner « à cette affaire un caractère religieux, surtout au vu des tensions actuelles ».

Pleins feux sur l’agression raciste de la coupe d’Afrique

Cependant une affaire datant de quatre ans a droit à deux papiers en deuxième et en troisième position. Dans Le Monde : « A Lyon, le récit glaçant des victimes de la violence raciste. » Et 20 Minutes : « Lyon : De la prison avec sursis requis contre des militants d’ultradroite, soupçonnés d’agressions racistes. » Des peines allant jusqu’à cinq ans d’emprisonnement dont deux avec sursis ont été requises vendredi pour deux militants présumés de l’ultradroite, soupçonnés avec cinq autres prévenus d’agressions racistes à Lyon lors de la Coupe d’Afrique des Nations de football en 2019. Armés de battes de base-ball, ils avaient brisé les vitres des voitures de supporters de l’Algérie en criant des insultes racistes. Les prévenus ont nié les faits.

Une « agression » n’a pas le même sens dans la gay pride et en banlieue

En cinquième, datant du 12 juin, « Lyon Il frappe des femmes à coups de poing pendant la gay pride ». On voit sur une vidéo une crevette en tee-shirt bleu clair se battre avec des gens non identifiés, à petits coups de poings. Aucune blessure n’a été constatée. La police n’a été appelée par personne. En neuvième position, datant du 11 juin : Lyon. « Ils se sont déchaînés sur lui. » Frappé à la tête avec des armes en fer, évacué dans le coffre ouvert d’une voiture, un homme de 22 ans est entre la vie et la mort à l’hôpital neurochirurgical de Bron. De nombreux riverains ont assisté à cette agression commise par une bande rivale.

A Bordeaux, Annecy ou Lyon, seule compte l’identité de l’agresseur

Cette petite promenade se passe presque de commentaire. Certaines informations sont montées en épingle, d’autres au contraire mises en retrait et toutes sont commentées selon la même grille d’analyse. La gravité des faits compte peu : le jeune homme entre la vie et la mort ne fait pas la une. La personnalité des victimes et des agresseurs est beaucoup plus importante. L’identité de l’agresseur de Bordeaux n’est pas mise en avant : c’est un jeune noir. Celle des agresseurs de la coupe d’Afrique est dite et répétée avec horreur, il s’agit de jeunes gens « d’extrême-droite », et leur motif présumé, le « racisme », est justement condamné. A l’inverse, le prêtre agressé s’autocensure pour ne pas dire qui sont ses agresseurs ni quelle est leur religion « au vu des tensions actuelles ». Et un grand silence remplace la cause unique de toutes ces agressions : l’immigration. Toutes les agressions citées sauf une viennent d’elle. Dans six cas, l’agresseur est un immigré, dans un cas ce sont les victimes.

Pauline Mille