L’argument économique en faveur de l’immigration de masse s’est effondré : c’est le titre d’un récent article du Telegraph de Londres. Le Royaume-Uni s’oriente actuellement vers des prélèvements de taxes et d’impôts supplémentaires d’environ 100 milliards de livres (près de 117 milliards d’euros) d’ici à 2030, notamment par le biais du non ajustement des seuils en fonction de l’inflation et la hausse de l’impôt sur les sociétés, faisant passer les prélèvements obligatoires de 33 % du PIB « avant le covid » à 37,7 %. Cela reste bien inférieur au poids des prélèvements en France, mais représente tout de même une hausse spectaculaire. Alors que le poids de l’Etat ne fait que croître par la volonté du Premier ministre « conservateur » Rishi Sunak et son cabinet, les dépenses publiques par habitant, elles, pourraient baisser de 150 livres par personne d’ici à 2028, et ce en raison de l’accélération de l’immigration, qui représentera selon les estimations de l’Office national des statistiques 6,1 millions de personnes supplémentaires d’ici à 2036. Et c’est justement l’immigration qui pèse de plus en plus lourdement sur les services publics, selon l’Institute of Fiscal Studies (IFS). Mais l’idée n’est pas nouvelle : on l’a constaté dans bien d’autres pays.
L’IFS est un institut de recherche britannique privé et indépendant établi en 1969, spécialisé dans l’évaluation des politiques publiques. Qualifié par le Telegraph de « think tank respecté », son dernier rapport montre qu’il n’y a pas de « dividende fiscal » associé à l’arrivée de nouveaux migrants extra-européens, mais au contraire une augmentation des besoins fiscaux significative.
L’immigration de masse entraîne la hausse des dépenses publiques
Le poids des dépenses par habitant lié à la hausse de l’immigration nette créera un « trou noir » de 25 milliards de livres d’ici à la fin de la décennie, assure l’IFS.
Et s’il est vrai que la croissance de la population et des taxes pourrait booster les revenus, l’IFS estime cela représenterait seulement une hausse des dépenses dans le secteur public de 0,2 % par an et par personne : « Les nouvelles projections démographiques à long terme s’appuient principalement sur un solde migratoire plus élevé qui peut aider à accroître la taille de l’économie, mais rendra les plans de dépenses actuels encore plus difficiles à mettre en œuvre en termes de dépenses par habitant. » Ces nouvelles projections indiquent notamment que la population britannique atteindra les 70 millions d’âmes dans le courant de 2025 et non en 2035 comme l’indiquaient des projections réalisées en 2022.
Le directeur délégué de l’IFS, Carl Emmerson, a commenté le rapport en déclarant qu’« une hausse de la migration nette ne correspond pas automatiquement à une amélioration des finances publiques », notamment parce que les contributions des immigrés qui travaillent ne suffisent pas forcément à couvrir les nouvelles demandes liées à l’augmentation de la population que provoque leur arrivée.
Le seul moyen pour que l’opération soit gagnante, a-t-il déclaré, serait que les travailleurs immigrés « viennent sans enfants, travaillent quelque temps puis retournent chez eux, car alors il n’y a pas de coûts liés à la garde d’enfants et aux retraites, et peu de dépenses de santé, alors que s’ils sont comme les gens qui sont déjà ici, cela ne fait pas beaucoup de différence pour les finances publiques ».
Le Royaume-Uni confronté au coût économique de l’immigration
Le rapport vient confirmer les déclarations d’un membre exécutif de l’Office for Budget Responsibility, David Miles, qui a mis en garde le mois dernier contre l’idée que de nouvelles vagues d’immigration ne feraient rien pour résoudre la crise des impôts et des dépenses publiques que traverse actuellement le Royaume-Uni.
Un éditorial publié mardi par le Telegraph à la suite de ces publications accuse le gouvernement conservateur d’avoir cru en la « délicieuse théorie » selon laquelle l’ouverture des frontières britanniques allait permettre l’arrivée d’un « capital humain » qui allait profiter matériellement au pays tout en faisant baisser le poids des impôts et enrichir sa culture.
« En tant que théorie, elle avait l’immense avantage d’être à peu près impossible à démentir à moins de trouver quelqu’un d’assez idiot pour la mettre effectivement en œuvre », écrit Sam Ashworth-Hayes : « Hélas, grâce aux conservateurs, on l’a fait. » Les données et les rapports se succèdent, et ils vont tous dans le même sens, ajoute-t-il : « La migration de masse n’enrichit pas la Grande-Bretagne. »
Une vision tronquée des coûts et des bénéfices de l’immigration
En un mot, les partisans de l’immigration massive ne retiennent que les apports des migrants en termes d’impôts et de taxes (dans le meilleur des cas), mais oublient de tenir compte de la demande accrue de dépenses lorsque la population augmente. Et la situation se complique dès lors que le Royaume-Uni fait face à une grave pénurie de logements (véritable épidémie mondiale, un peu comme le covid !) et que ses infrastructures sont de plus en plus engorgées.
A quoi il faut ajouter « des conflits croissants entre des communautés ayant des visions radicalement différentes de ce que devrait être ce pays », ajoute sobrement l’éditorialiste.
Alors que l’argument économique en faveur à l’immigration tend à fondre comme neige au soleil, observe-t-il pour finir, c’est aujourd’hui la « diversité » qui est présentée comme le bénéfice principal de son accroissement. Et ce en contradiction ouverte avec ce que veulent les Britanniques qui n’ont cessé de voter pour la réduction de l’immigration.
Le non-respect de la volonté du peuple peut être bien pire que sa prise en compte.