Ce sont ses violences filmées à la Contrescarpe qui ont fait épingler d’abord Alexandre Benalla et lancé l’affaire qui empoisonne Emmanuel Macron. Mais la justice estime que le couple qu’il a molesté a sa part de responsabilités et l’a convoqué au tribunal.
Il était une fois un jeune cuisinier grec appelé Giorgios et une jeune graphiste française nommée Chloé. Ils étaient gentils, ils pensaient bien, ils haïssaient le racisme, les policiers, le patriarcat, ils aimaient le vivre ensemble et l’ouverture au monde, ils vivaient local dans l’un des villages parisiens qu’aime la bourgeoisie bohème, la place de la Contrescarpe, ils pensaient global comme on le leur avait appris.
Premier mai à la contrescarpe : un couple, son bourreau, ses violences
Un jour de mai 2018, le premier exactement, alors que Paris embaumait le muguet que les revendeurs présentaient par brins aux passants, Giorgios et Chloé étaient sortis prendre un verre place de la Contrescarpe quand un mouvement de foule les mit soudain en contact avec des policiers et d’autres personnes. Quelle affaire ! Jamais les deux jeunes gens n’auraient pu deviner qu’il y aurait des manifestations dans Paris ce jour-là, jamais ils n’avaient entendu dire que certaines d’entre elles dégénéraient, et ils n’avaient pas perçu non plus, devant eux, de brouhaha, de mouvement de foule. Surpris dans leur rêverie, Giorgios et Chloé eurent le bon réflexe de jeter une carafe d’eau et un cendrier sur la police. Bientôt ils furent odieusement brutalisés par un grand diable arabe, Benalla, et quelques mois plus tard, la chose s’étant ébruitée, ils purent se plaindre : « Nous sommes des gens normaux. Notre bourreau habite à l’Elysée ». Enfin, plaints par toute la presse, ils se constituèrent partie civile contre le méchant Benalla, qui déshonore la république.
Convoqué au tribunal, le couple a pourtant présenté ses excuses
Las, aujourd’hui, cette belle histoire citoyenne prend l’eau. Placés en garde à vue, interrogés avec une vingtaine de personnes présentes ce jour-là, Giorgios et Chloé ont été convoqués par le tribunal de Paris pour y être jugés. Pour violences commises contre des personnes dépositaires de l’autorité publique. Leur avocat, Me Sahand Saber, en est très choqué : « C’est une mesure excessive, disproportionnée et brutale eu égard au fait qu’il n’y a pas eu de plaintes déposées par les CRS ni de blessés ». Et puis, ses clients ont déjà présenté leurs excuses. C’est très important, les excuses. Je puis refuser d’obtempérer aux forces de l’ordre, leur lancer par erreur un cendrier et une bouteille d’eau : si je présente mes excuses citoyennes, tout s’arrange, il n’y a que demi-mal, faute avouée est à moitié pardonnée.
Les bêtises de l’affaire Benalla
Les plaignants d’hier aujourd’hui poursuivis sont, bizarrement, quoi qu’ils aient été un peu frottés par les hommes de Collomb et leur auxiliaire Benalla, des personnages de Macron, des chéris du président. Ils reconnaissent avoir fait « des bêtises », comme les jeunes musclés de Saint-Martin. Dans le monde de bisoumacrons, on peut faire « des bêtises » sans être puni.
Que signifie toute cette mascarade ? Et l’affaire Benalla en entier ? Elle est partie du Monde, cela veut dire que les puissances qui ont monté Macron ont décidé de le descendre. La répétition de ses « erreurs de communication » le confirme. Et maintenant ? Est-ce une pause ? Une contre- attaque de Macron ? On est dans le bleu, et c’est bien triste. Le joli conte rose de Giorgios et Chloé s’évanouit. C’étaient de petits niais de gauche violents comme les autres. Finalement, ce pauvre Benalla a bien fait de leur donner une petite leçon.