En déplacement à Berlin mercredi, le négociateur en chef de l’UE Michel Barnier a assuré que l’UE souhaitait conclure avec le Royaume-Uni un accord de partenariat sur mesure et d’une ampleur inédite, même s’il ne saurait être question d’un accès « à la carte » au Marché unique. Nombreux étaient ceux en Europe qui commençaient à s’inquiéter de l’éventualité d’un Brexit sans accord. Les Allemands n’étaient pas les derniers, l’Allemagne comptant pour près de 15 % des importations britanniques et ses constructeurs automobiles ayant leurs usines au Royaume-Uni. Pourtant, depuis maintenant deux ans, l’UE ne négociait pas puisqu’elle se contentait de camper sur ses positions, encouragée en cela par les concessions successives de Theresa May, jusqu’à celles annoncées à la fameuse réunion de la résidence de Chequers qui ont provoqué la démission de deux ministres et de plusieurs secrétaires d’État, dont un a dénoncé un sabotage planifié du Brexit par Mme May et son entourage.
Face à la perspective d’un Brexit sans accord, l’UE serait-elle prête à renoncer à sa stratégie de punition des Britanniques ?
La corde était usée et menaçait de rompre : en cédant plus, le gouvernement de Theresa May risque d’être renversé ; en restant intraitable, Bruxelles risque un Brexit « dur » qui coûtera aussi cher aux économies de l’UE qu’à l’économie britannique. Certaines capitales, comme Rome et Budapest, commençaient à critiquer ouvertement l’arrogance et l’inefficacité de la Commission dans ces négociations, la soupçonnant de vouloir à tout prix punir les Britanniques et dissuader les futurs candidats à une sortie de l’UE. Il reste peu de temps pour négocier enfin un divorce à l’amiable, car les parlements de part et d’autre devront encore ratifier un éventuel accord avant la date butoir du Brexit en mars 2019. C’est pourquoi il était question d’avoir convenu des conditions de la sortie du Royaume-Uni pour le sommet européen d’octobre, mais cela semble désormais hors de portée, même si Michel Barnier prétend aujourd’hui, sans donner de détails, que « 85 % du travail » a déjà été fait.
On attend toujours des propositions concrètes, même si Londres et Bruxelles prétendent avoir déjà négocié 80 % du futur accord
On attend toujours les propositions de l’UE, celles de Londres, déjà considérées comme une trahison par les partisans du Brexit au Royaume-Uni, ayant été rejetées en bloc par la Commission européenne. Au Royaume-Uni, on accueille d’ailleurs positivement la nouvelle de la volonté du négociateur européen de faire enfin des propositions constructives, mais avec une certaine dose de scepticisme. Pour le moment, ce ne sont que des paroles, bien tardives, et l’on attend encore les actes. Le député Tory Michael Fabricant, partisan du Brexit, a ainsi déclaré : « Nous attendons tous cette offre avec intérêt. Mais le Royaume-Uni étant le plus gros marché du monde pour les automobiles allemandes et d’autres produits, il a toujours été clair pour moi que nous avions des atouts très forts dans ses négociations ». Le ministre pour la sortie de l’UE Dominic Raab a quant à lui reconnu que la date limite des 18 et 19 octobre pour un accord était désormais peu réaliste. Lui aussi a parlé d’un accord déjà prêt à 80 %, mais sans donner plus de détails que Barnier.
La volte-face du président français Emmanuel Macron
D’après le Times, le président français Emmanuel Macron, qui faisait partie des dirigeants soupçonnés d’être derrière la stratégie de punition du Royaume-Uni et de dissuasion des candidats potentiels à la sortie de l’UE, aurait adouci ses positions et souhaiterait intégrer le Royaume-Uni dans sa vision d’une Europe à cercles concentriques, avec une alliance spéciale entre l’UE et les Britanniques. C’est ce qu’il devrait proposer au prochain Conseil européen de Salzbourg, en Autriche, le 20 septembre prochain.