La Chine communiste a appris une leçon des économistes les plus libéraux : la disruption technologique et la destruction créatrice sont les deux mamelles de la modernité techno-marchande. Hier sous le prétexte du progrès émancipateur. Aujourd’hui sous celui de la protection d’une planète que le régime de Pékin aura auparavant allègrement piétinée en polluant comme aucun autre, et sous celui du secours aux pauvres que la dictature communiste aura auparavant multipliés à l’infini. Le ministre chinois des Affaires étrangères Wang Yi a magnifiquement illustré ce jeu de bonneteau quand il a appelé mardi le G20 réuni à Bonn à « passer à l’action » en appliquant le programme 2030 de l’ONU d’Objectifs du développement durable et « d’éradication de la pauvreté » de la surface du globe. Un discours cauteleux à la manière d’un notable radical et maçonnique de la IIIe République au tournant du XXe siècle, qui cache mal l’arrogance consubstantielle du régime rouge qui vise à prendre une place dominante dans le processus de globalisation.
Les enjeux évoqués par le ministre ont été fixés par le sommet de Hangzhou l’année dernière, durant lequel les dirigeants des pays du G20 ont élaboré un plan d’actions concrètes pour cet Agenda 2030. Wang aujourd’hui presse les puissances d’appliquer ces mesures dans leurs stratégies techno-politiques. L’hôpital se moque de la charité, la Chine communiste ayant sans nul doute le plus de chemin à parcourir pour sortir d’un productivisme pollueur, si l’on en juge par l’état dramatique de l’atmosphère à Pékin. Et, bien que le CO2 en particulier ne soit un polluant que pour les doctrinaires du réchauffement climatique anthropique, « l’atelier de la planète » est le pays qui en émet le plus, et de très loin. De 1990 à 2015, la Chine a vu ses émissions de CO2 exploser de 347 %, atteignant 10,9 milliards de tonnes en 2015, plus forte hausse de tous les pays du monde. Derrière, les Etats-Unis restent stables (+3 %) à 5,21 milliards de tonnes sur l’année. Les pays de l’Union européenne ont vu les leurs baisser sur la même période de 21 %, à 3,4 milliards de tonnes.
Wang veut que les Objectifs du développement durable restent moins contraignant pour la Chine que pour les autres
Au demeurant, Wang s’est permis d’insister sur la façon d’appliquer le traité de Paris sur le changement climatique et les ruptures technologiques qu’il prône en matière énergétique, en insistant sur le fait « que le principe de responsabilité commune mais différenciée doit être respecté ». En sabir diplomatico-communiste, cela signifie que, la Chine étant un pays qui est supposé rester « émergent », les contraintes de restriction d’émissions de polluants ne doivent pas s’appliquer à elle avec autant de sévérité qu’elles doivent l’être aux pays « développés », Europe et Amérique du Nord principalement. La lutte différenciée contre le CO2 comme avantage concurrentiel, il fallait y penser. Pékin, en proie à l’essoufflement de son anti-modèle de dumping social, sort celui du dumping environnemental.
Nonobstant, et ces conditions étant soigneusement énumérées, Wang a assuré à Bonn que la Chine avait « déjà intégré les éléments de l’Agenda onusien pour un développement durable dans son propre programme de développement national ». Concernant la pauvreté, le très officiel Global Times assure que « le gouvernement chinois a fait de sa réduction sa priorité absolue et, en 2016, a sorti du besoin une nouvelle tranche de 10 millions de ses citoyens ».
La Chine, plus gros pollueur, champion des plans globalistes de l’ONU
Fort de ce brevet de bonne conduite auto-décerné, le ministre des Affaires étrangères a embrayé sur les projets fous que nourrit Pékin pour prendre la tête du processus de globalisation économique. Ces objectifs sont principalement contenus dans le programme « One Belt, One Road », qui vise à la fois à améliorer les moyens de communication internes à l’Eurasie avec connexions vers l’Afrique, mais aussi à coordonner les politiques de développement afin que « les pays concernés travaillent de concert avec pour objectif un bénéfice mutuel et une sécurité commune ». Une semi-mondialisation sous gouvernance chinoise, en quelque sorte. Notons que les liaisons de fret ferroviaire entre la Chine et la péninsule européenne se sont récemment intensifiées, en France vers Lyon en particulier. L’Europe comme hinterland commercial de la Chine, en quelque sorte.
Pour bien marquer l’empreinte chinoise sur cette globalisation portée par la « gouvernance » onusienne, Wang Yi a insisté à Bonn sur la création à l’initiative de Pékin d’un « Fonds Chine-Nations unies pour la paix et le développement », incluant « un compte spécifique pour l’application effective de l’Agenda 2030 de l’ONU ».