La Chine en Afrique : un communisme gagnant-gagnant ?

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Les étudiants d’un institut de formation des futures élites des pays de l’Afrique australe ont écrit au président chinois Xi Jinping qui leur a répondu. Le sujet traité cette année par la « Mwalimu Julius Nyerere leadership School » était le suivant : « Nouveau développement dans la nouvelle ère : exploration et échanges entre le parti communiste chinois et les anciens mouvements de libération de l’Afrique australe. » Dans sa réponse, Xi, qui impose toujours à son pays un communisme de fer, a vanté les mérites d’une coopération gagnant-gagnant fondée sur l’apprentissage mutuel entre les peuples, ce qui ne manque pas de sel quand on se penche une seconde sur la réalité.

 

La Chine, c’est d’abord celle de Mao et du communisme

Le nom de Julius Nyerere donné à cet institut de formation de futurs dirigeants est une première indication. Y sont associé les massacres de l’indépendance et la politique socialiste anti-occidentale menée à 1964 par un personnage qui s’inspirait ouvertement de Mao-Tse-Toung, le soutien à toutes les organisations terroristes pro-communistes en Afrique, le tout avec l’aide officielle de Pékin. Autre élément important, l’enthousiasme que montre aujourd’hui la directrice de l’école Julius Nyerere, Marcellina Chijoriga : « Le monde a vu comment la Chine s’est développée en une décennie, comment ses méthodes marchent. Un pouvoir fort est le facteur majeur de ce succès économique (…) Nos cadres observent les pistes choisies par le parti communiste chinois (…) Les participants ont apprécié les 14 principes que la Chine applique pour réussir un développement énorme et rapide (…) Un ami qui soutient la croissance et l’amélioration de votre économie est un bon ami. » Le ton est celui des dithyrambes maoïstes des années mil neuf cent soixante.

 

L’Afrique australe du communisme terroriste

Un troisième élément d’appréciation est la composition du comité de fondation de la Mwalimu Julius Nyerere Leadership School. On y trouve le parti au pouvoir en Tanzanie, l’African National Congress (ANC, fondé par des communistes) en Afrique du Sud, le Frelimo au Mozambique (également communiste), le MPLA (idem) en Angola, du SWAPO en Namibie et le ZANU-PF au Zimbabwe. Tous s’inspirent du communisme et tous ont produit de sanglants dictateurs, la misère, le sous-développement, la corruption.

 

Apprentissage mutuel et développement gagnant-gagnant

Mais le plus intéressant et le plus instructif est que le secrétaire général du Parti communiste de Chine, et président chinois, ait pris sur son emploi du temps pour répondre aux futurs dirigeants de l’Afrique australe révolutionnaire (ils sont 120, ils ont 41 ans en moyenne et pratiquent presque la parité, 55 femmes pour 65 hommes). Bien sûr, on y trouve surtout une rhétorique surannée sur l’amitié sino-africaine, la nécessité de travailler dur, ou sur le fait que le développement, le bonheur des gens, le renouvellement d’une nation demandent des efforts sur plusieurs générations, mais il a aussi insisté sur « l’apprentissage mutuel » entre les peuples. Et parmi les 14 principes de développement du PCC on trouve le destin commun futur de l’humanité, la protection de l’environnement et la discipline dans le Parti.

 

La colonisation de l’Afrique par la Chine communiste

En somme, ce que prépare la Mwalimu Julius Nyerere Leadership School, c’est la colonisation de l’Afrique australe sur le modèle du communisme chinois. Les enthousiastes d’aujourd’hui, telle Mme Chijoriga, pensent à une opération gagnant gagnant, comme les enthousiastes d’hier, Nyerere ou Mugabe, mais la mise en coupe réglée de l’Afrique par la Chine les détrompera vite. Lorsque Xi écrit pompeusement que « la Chine et l’Afrique appartiennent à une communauté qui va partager l’avenir à travers leurs bonheurs et malheurs », cela veut dire que la Chine s’invite sur le continent noir pour longtemps, avec des objectifs et des méthodes qui feront regretter aux autochtones non seulement les anciens colonisateurs, mais les méthodes américaines.

 

Pour l’Afrique, la Chine vaut mieux que l’Europe et l’Amérique

Pour l’instant, ils sont séduits. Le South China Morning Post publiait en juillet 2022 une étude de l’IREN (Inter Région Economic Network), think tank situé au Kenya, qui monte un avantage significatif de la Chine sur l’Union européenne en termes de décisions et de réalisations de projets d’infrastructures en Afrique. 1.000 décideurs de 25 pays d’Afrique ont été interrogés. Une majorité pense que la Chine est meilleure sur les projets tangibles, routes, ponts, chemins de fer ou barrages hydro-électriques alors que les points forts européens se limitent à l’abstrait, le pouvoir d’influence, les normes, la conscience climatique.

 

Les perdants du gagnant-gagnant

La Chine représente aussi la puissance étrangère qui a la plus grande influence bénéfique, devant les Etats Unis, aux yeux des plus jeunes. Parmi les bonnes choses venues de Chine, ils citent des produits, les investissements, et l’aide au développement. Ils pensent aussi que la Chine va apporter de l’emploi dans leurs pays respectifs. En janvier, le ministre chinois des affaires étrangères, Qin Gang, a utilisé exactement la même rhétorique que Xi Jinping , parlant de « développement commun et travailler ensemble pour construire la communauté Chine/Afrique pour un avenir partagé dans la nouvelle ère ». Partenaire, entrepreneur ou colonisateur, le communisme chinois gagnant-gagnant parle le langage du comité central, et il est surtout gagnant pour la Chine (et perdant pour l’Europe).

 

Pauline Mille