Il parle cash, comme on dit en mauvais franglais. Mais c’est là que s’arrête l’attachement de John McTernan à la mode de paiement et aux valeurs de papa : l’ancien Secrétaire politique de Sir Tony Blair, ancien Premier ministre travailliste du Royaume-Uni, vient de proclamer son mépris des fermes familiales actuellement en péril de mort outre-Manche. « C’est une industrie dont nous pouvons nous passer », a-t-il déclaré à la chaîne GBNews.
Les agriculteurs britanniques sont actuellement sous le choc des annonces du chancelier de l’Echiquier, Rachel Reeves, qui a annoncé simultanément une rafale de nouvelles taxes qui vont frapper durement les classes moyennes, y compris leurs cagnottes de retraite par capitalisation, l’arrêt d’aides aux retraités les plus démunis et des hausses de rétribution sans précédent pour les fonctionnaires, sous prétexte de combler le déficit laissé par les Tories. Les agriculteurs, en particulier, sont confrontés à la menace d’un impôt de succession de 20 % sur les exploitations d’une valeur de plus d’un million de livres, sans aucun rapport avec leurs revenus, calculée sur la cote de l’immobilier dont ils ne tirent aucun bénéfice. Jusqu’à présent, les terres agricoles sont exemptées.
Un ancien conseiller de Tony Blair exprime son mépris des exploitations familiales
Pour beaucoup, c’est la fin du rêve de transmettre leur ferme à leurs enfants. Un agriculteur de 78 ans s’est déjà donné la mort de peur que sa ferme et ses terres, évaluées à 2 millions de livres, ne puissent passer à ses fils lorsque le budget Reeves produira ses effets : la mesure est prévue pour avril 2026.
Les agriculteurs britanniques préparent leur riposte, forts des exemples qu’ont donnés leurs homologues néerlandais, allemands ou français ces derniers temps.
Pour John McTernan, il est urgent de ne pas les écouter, voire de les mater.
Il a appelé le Labour Party à « faire aux fermiers ce que Thatcher a fait aux mineurs » s’ils « décident de descendre dans la rue » – ils ont prévu un rassemblement devant le Parlement à Westminster le 19 novembre. « C’est une industrie dont nous pouvons nous passer. Si les gens sont à ce point en colère qu’ils veulent descendre dans les rues et répandre du fumier, alors nous n’avons pas besoin de petits agriculteurs. »
On se souvient de l’« hiver du mécontentement » de 1978-79 où les grèves gigantesques avaient bloqué le pays et laissé le gouvernement travailliste de James Callaghan en lambeaux. Margaret Thatcher attribua le manque de compétitivité du Royaume-Uni au pouvoir des syndicats et engagea notamment un bras de fer avec l’industrie minière du charbon moribonde en 1984-85, refusant de discuter avec ses leaders syndicaux, qui fut contraint à la capitulation au cours d’une grève qui vit de violents affrontements entre les mineurs grévistes qui empêchaient leurs collègues de travailler et la police.
Les agriculteurs britanniques écrasés par un nouvel impôt sur les successions
Mais il y a une différence de taille entre des mines devenues obsolètes et l’agriculture, et le travail des fermiers qui nourrit un pays et lui assure une certaine autonomie d’approvisionnement. Sans compter le rôle culturel éminent de l’agriculture qui est au cœur des identités nationales.
En exprimant aussi brutalement son mépris, l’ancien conseiller de Tony Blair agit comme un révélateur. C’est en tout cas l’avis de Murdo Fraser, membre conservateur du Parlement écossais, qui a tweeté : « Waouh. Le masque tombe alors qu’un ancien conseiller travailliste de haut rang nous dit ce que le parti pense vraiment des petites exploitations. »
Le Premier ministre Keir Starmer s’est rapidement désolidarisé des propos de McTernan, assurant que son gouvernement s’apprête à « investir 5 milliards de livres » au cours des deux années à venir pour l’agriculture et la « production alimentaire durable ».
Il n’empêche. C’est bien son ministre des Finances qui s’en prend aux fermes familiales. Et la « production alimentaire durable » est celle que tous les mondialistes mettent en avant : une agriculture contrôlée, « décarbonée », suspecte parce qu’elle utilise de l’eau, empêche l’ensauvagement des terres et favorise l’élevage de bétail.
McTernan, à cet égard, a du moins le mérite de ne pas manier la langue de bois.