Ecoutes américaines de l’Elysée : de qui se moque-t-on ?

Ecoutes américaines de l’Elysée : de qui se moque-t-on ?
 
Le monde politico-médiatique n’en finit plus de réagir après l’annonce, dans divers organes de presse, des écoutes américaines de l’Elysée qui auraient porté, selon les révélations et documents à l’appui provenant de Wikileaks, sur les présidences de Jacques Chirac, de Nicolas Sarkozy et sur l’actuel mandat de François Hollande – et cela depuis 2006 semble-t-il. Le renseignement américain, en l’occurrence la NSA, se tenait – se tient donc – au courant des réflexions de nos présidents successifs. Il ne doit pas toujours être déçu du voyage…
 
Les protestations sont – apparemment du moins – unanimes. Au point qu’un conseil de défense devait se réunir ce mercredi matin à l’Elysée afin d’évoquer cette affaire.
 
On a ainsi pu entendre Anne Hidalgo, le maire de Paris, déclarer : « Ce sont des révélations qui font peur, qui nécessitent des explications de la part des Etats-Unis et puis des garanties sur le fait que ça ne se reproduise plus. »
 

Ecoutes américaines de l’Elysée

 
L’ancien secrétaire général de l’Elysée Claude Guéant, lui aussi visé du temps de la présidence de Nicolas Sarkozy, a jugé cette affaire particulièrement « choquante et regrettable ». « Compte tenu des relations extrêmement proches que nous avons avec les Etats-Unis, compte tenu que nous sommes des alliés extrêmement fidèles, et bien je trouve qu’il y a là une rupture du pacte de confiance », a-t-il affirmé.
 
Quant au ministre du Travail François Rebsamen, il a conclu l’expression de son indignation d’un « Entre amis, on ne fait pas cela ! » Ben voyons !
 
On croirait qu’ils cherchent tous à faire la publicité de Wikileaks, et à justifier la déclaration de son fondateur, Julian Assange, qui a déclaré avec une visible satisfaction : « Le peuple français a le droit de savoir que son gouvernement et ses élus sont sujets à une surveillance hostile provenant d’un allié supposé. Nous sommes fier de notre travail avec des médias français : Libération et Médiapart, en vue de porter cette histoire à la connaissance du public. Les lecteurs français peuvent espérer des révélations régulières plus importantes dans un futur proche. »
 
Des révélations plus importantes ? Est-ce un coup de pub ? Ou nos dirigeants sont-ils décidément traités comme des pions par les Américains ?
 
Qu’importe ! Qu’importe même que les documents produits par Wikileaks soit vrais ou faux. Nos dirigeants, en tout état de cause, les tiennent pour vrais. Et pour une raison bien simple : c’est que tout le monde espionne tout le monde.
 

Une pseudo affaire pour se moquer des gogos ?

 
Les protestations d’indignation de nos politiques ne sont, de fait, que de la poudre aux yeux, destinée à contenter les gogos que nous devons être. Comment imaginer un seul instant que, avec les moyens technologiques dont nous disposons aujourd’hui, il n’en soit pas ainsi, alors que l’on sait bien que l’espionnage est un fait constant de l’histoire. Il est simplement beaucoup plus facile de nos jours, alors qu’il n’est plus nécessaire de décacheter missives et lettres avec le risque, à tout instant, d’être pris…
 
La fumisterie est d’ailleurs double. Car, au-delà des naïves et mensongères protestations d’amitié et d’alliance, en feignant d’être choqués, nos dirigeants veulent nous persuader de leur innocence en la matière. Alors que, clairement, l’espionnage n’est pas une spécialité américaine.
 
En réalité, la seule déclaration politique intelligente sur le sujet est celle émanant du président de la commission des lois à l’Assemblée et rapporteur du projet de loi relatif au renseignement, le député socialiste du Finistère Jean-Jacques Urvoas, qui souligne : « Une nouvelle fois nous redécouvrons que les Etats-Unis n’ont pas d’alliés, ils n’ont que des cibles ou des vassaux. »
 

« Monde réel »

 
Notre ambassadeur à Washington, moins naïf, évoque cette situation en la qualifiant de « monde réel ».
 
Et, puisque que l’on évoque la loi sur le renseignement, on doit dire qu’elle constitue la seconde mystification de cette affaire d’écoutes. Car, somme toute, nos politiques s’indignent de subir ce que Manuel Valls entend réserver à chaque Français…
 
On doit bien rire chez les barbouzes !
 
Et on ne peut que regretter, une fois de plus, la disparition de Michel Audiard – il y aura trente ans le mois prochain. Nul doute qu’il eût tiré de cette ridicule affaire l’un de ces dialogues croustillants dont il avait le secret…
 

François le Luc