La start-up Savor lancée en 2022 à Batavia dans l’Illinois a pour objectif de produire à partir de carbone des corps gras utilisables dans l’alimentation et les cosmétiques. Dans la mythologie du réchauffement du climat par l’homme, les gaz à effet de serre, dioxyde de carbone, méthane, sont nocifs : or les troupeaux de bovins en émettent, ce sont donc des méchants. Savor produit ses corps gras à partir de méthane et de CO2 qu’il transforme par son processus industriel en acide gras, puis en divers corps gras complexe, par exemple le beurre : elle « pompe » des GES dans l’atmosphère, c’est donc une gentille. C’est pourquoi d’ailleurs, elle a été largement aimée par le fonds Breakthrough Energy Ventures abondé par le milliardaire arc-en-ciel Bill Gates. La communication de Savor est extrêmement bien organisée. Depuis un an la presse internationale et française affirme que le processus technique est maîtrisé, et depuis le printemps que la production a commencé. Les photos que l’on diffuse de ses dirigeants ou associés sont soigneusement choisies, une PDG chic et sérieuse, un délégué de Breakthrough Energy coloré et louangeur : « Savor redéfinit la production alimentaire avec une solution évolutive qui offre un goût exceptionnel tout en améliorant les chaînes d’approvisionnement nationales stables », selon Carmichael Roberts de Breakthrough Energy Ventures. Enfin une « vice présidente de la commercialisation » ravissante qui vante la stabilité « dans la chaîne d’approvisionnement » qu’apportera Savor. On nous assure en même temps que la Food and Drug Administration américaine est conquise, que les multinationales collaborent, et que la haute cuisine s’y est mise : des chefs et maîtres pâtissiers renommés, dont Kyle Connaughton (SingleThread) et Juan Contreras (Atelier Crenn), utilisent le beurre Savor dans des créations culinaires haut de gamme. Des images de l’usine pilote de Batavia, 2.500 mètres carrés au sol, appuient l’idée que le projet pèse lourd. Or, d’après les données fournies par Savor elle-même, la production de beurre pourrait atteindre cent kilos de beurre par semaine. Une bonne laitière moyenne fournit 32 litres par jour, et il faut 20 litres de lait pour faire un kilo de beurre, ce qui donne à peu près dix kilos de beurre par vache et par semaine. On a donc mobilisé les dollars de Bill Gates, de vrais chimistes, des ingénieurs et tout un tas de communicants pour produire ce que font dix vaches. Faire son beurre ainsi a un prix faramineux – qui n’est pas cité. On en rirait s’il ne s’agissait au fond, très sérieusement, d’imposer un nouveau monde sous couleur se sauver la terre.