Le Congrès des députés espagnols, dominé par le Partido Popular, vient de donner son feu vert à la célébration des mariages et à l’enregistrement des divorces devant un notaire ou un greffier. Il s’agit d’une simplification majeure, destinée à désengorger les tribunaux submergés par les affaires matrimoniales. Les nouvelles dispositions, si elles sont adoptées par le Sénat, augmenteront encore la facilité avec laquelle les mariages se rompent en Espagne, tout en dévalorisant l’acte du mariage. Et c’est sous une législature supposée « conservatrice » – le PP étant au pouvoir – que ces choses sont décidées, alors que l’Espagne souffre déjà si profondément de la dislocation de l’institution familiale sous le gouvernement socialiste de Zapatero.
Le projet de loi, fortement amendé, vient d’être adopté par la commission de la justice des Cortès par 23 voix (toutes du PP) contre 15, et 2 abstentions. C’est par le jeu d’un amendement du PP que la compétence du greffier pour « célébrer » mariages et divorces a été ajoutée au projet de loi, offrant aux futurs époux ou divorcés le choix d’une procédure gratuite et rapide : devant notaire, ces actes seront payants. Notaires et greffiers rejoignent donc les maires, les chargés du Registre civil et les agents consulaires compétents à l’étranger.
L’Espagne affiche déjà des statistiques désastreuses pour le mariage et le divorce
Quelques maigres garde-fous sont prévus pour le divorce : il ne pourra être enregistré sous ces formes simplifiées dans les cas où il y a des enfants mineurs à charge ou si l’une des parties est frappée d’une incapacité quelconque, et se fera sous le régime du « consentement mutuel ».
L’Espagne est actuellement l’un des pays qui affiche les statistiques de divorce les plus désastreuses du monde : elle tient la cinquième place, avec 61% des mariages qui se terminent par un divorce (derrière la Belgique, 71%, et le Portugal, la Hongrie et la République tchèque, tous au-dessus de 65%). Dans ce triste palmarès les pays européens représentent 9 des 10 nations « championnes » du divorce. La Russie et les Etats-Unis les suivent de près, frôlant les 50%.
En cherchant à banaliser encore davantage l’accès au mariage, en facilitant le divorce, l’Espagne ne fait qu’accentuer les conditions qui sont à la racine de ces tendances mortifères : mortifères parce que la natalité est meilleure parmi les couples mariés et parce que les conséquences néfastes du divorce se paient toujours au niveau de la société.
Se marier ou divorcer devant le notaire ou le greffier banalise et privatise ces actes
Mais c’est de fait la société qui est exclue du processus : si le mariage se fait devant notaire, il devient plus encore qu’à ce jour un acte, un contrat privé entre deux personnes que celles-ci peuvent rompre à volonté. La dimension sociale du mariage est ainsi passée sous silence.
La nouvelle loi prévoit également de faire passer l’âge minimal pour le mariage de 14 à 16 ans.
Elle vise aussi à donner des effets civils aux mariages religieux à quatre religions supplémentaires (c’est déjà le cas pour les catholiques, les juifs et les musulmans) : bouddhistes, orthodoxes, mormons et témoins de Jéhovah pourront désormais bénéficier de cette dispositions, malgré des régimes matrimoniaux forts différents pour certains. Il est vrai que les catholiques, qui s’engagent à la fidélité, à l’accueil des enfants et à la monogamie pour la vie sont loin d’être exemplaires, comme le démontrent les statistiques du divorce…
Peut-il en être autrement dans notre monde contemporain ? Le taux du divorce en Amérique latine reste l’un des plus bas du monde, et au Chili, pays resté catholique, il n’est que de 3%.