Les Etats-Unis menacent de bloquer la vente d’avions F-35 à la Turquie si Ankara achète le système antimissile russe S-400

Etats Unis Turquie F 35
 
Lockheed Martin a livré son premier F-35 à des officiels turcs au Texas la semaine dernière, mais un haut fonctionnaire du Département d’Etat prévient que la vente de ces avions à la Turquie, qui devrait concerner plus de cent appareils, peut encore être bloquée par les États-Unis si Ankara s’obstine à vouloir acquérir le système anti-missile russe S-400. Tant que dure le programme de formation des pilotes turcs sur une base de l’Arizona, les premiers F-35 livrés resteront en effet sur le sol américain, ce qui donne encore à Washington du temps pour prendre sa décision, a expliqué Wess Mitchell devant les sénateurs. Le sénat américain avait voté à une large majorité il y a dix jours en faveur du blocage de la vente à Ankara de l’avion multirôle de cinquième génération.
 

Les premiers F-35 livrés à la Turquie par les Etats-Unis resteront sur le territoire américain pour encore un an ou deux

 
Les sénateurs américains, Républicains et Démocrates confondus, ont considéré que le transfert des technologies sensibles du F-35 à la Turquie faisait courir un risque croissant en raison de la dérive autoritaire du président Erdoğan et également de l’acquisition par la Turquie du système de défense anti-aérienne et antimissile russe S-400. Le maintien du pasteur américain Andrew Brunson dans les geôles turques a également été avancé comme un motif supplémentaire pour le blocage de la vente des F-35. Dans sa version votée par le Sénat, le projet de loi de défense censé bloquer la vente enjoint également le Secrétaire à la Défense James Mattis de soumettre au Congrès « un plan pour mettre fin à la participation du gouvernement de la République de Turquie au programme du F-35 ». Mais Mattis est hostile à un tel blocage, la Turquie étant un allié de l’OTAN et participant à ce programme depuis 2002. Le projet de loi de défense doit encore repasser devant la Chambre des Représentants puisque les sénateurs y ont apporté des modifications, et il faudra aussi la signature du président Donald Trump pour que le texte devienne loi.
 

Le déploiement par la Russie de son système S-400 en Turquie pourrait lui permettre d’obtenir les secrets du F-35

 
La livraison du premier exemplaire a donc bien eu lieu mais les Etats-Unis conserveront la garde des F-35 turcs pendant encore un an ou deux, puisque c’est le temps prévu pour préparer les pilotes turcs sur le sol américain. Pour le ministre des Affaires étrangères turc, Mevlüt Çavuşoğlu, l’achat du système russe S-400 et la participation au programme de l’avion américain F-35 sont deux dossiers complètement différents. Le Premier ministre turc a quant à lui adopté un ton plus menaçant, prévenant que la Turquie disposait d’alternatives face au F-35.
 
Certains experts militaires des Etats-Unis et de l’OTAN craignent que le déploiement en Turquie de son système anti-aérien et antimissile S-400 ne donne à la Russie l’occasion d’obtenir des informations et des codes confidentiels du F-35.
 
Plus globalement, les hésitations américaines sur l’avion de cinquième génération sont la conséquence logique du double jeu de la Turquie en Syrie, de sa dérive autoritaire et islamiste et de son rapprochement avec la Russie. Les autres pays qui participent à ce programme, outre les États-Unis, sont l’Australie, le Canada, la Corée du Sud, le Danemark, Israël, l’Italie, le Japon, la Norvège, les Pays-Bas et le Royaume-Uni.
 

Olivier Bault