« Les prêtres travaillant au Kazakhstan sont comme les apôtres du Christ décrits dans les Actes des Apôtres, et ils supportent tous les fardeaux pour l’Évangile. Telle est mon expérience de deux semaines de voyage à travers le Kazakhstan ». C’est ainsi que décrivait en 2013 la situation de l’Église au Kazakhstan la Polonaise Krystyna Czuba, venue interviewer pour l’hebdomadaire catholique Niedziela Mgr Tomasz Peta, également polonais. L’archevêque d’Astana Tomasz Peta est, avec son compatriote Mgr Jan Paweł Lenga, évêque émérite du diocèse de Karaganda, et Mgr Athanasius Schneider, un Allemand qui est évêque auxiliaire de l’archidiocèse d’Astana, l’un des trois cosignataires d’une déclaration publiée pour le dimanche de la Sainte Famille le 31 décembre dernier. « Nous sommes conscients de cette grave responsabilité et de notre devoir face aux fidèles qui attendent de nous une profession publique et sans équivoque de la vérité et de la discipline immuable de l’Église sur l’indissolubilité du mariage. Pour cette raison, il ne nous est pas permis de nous taire », ont expliqué ces trois apôtres du Christ pour justifier leur déclaration dénonçant l’interprétation approuvée par le pape François d’Amoris laetitia sur l’accès aux sacrements des personnes divorcées vivant dans une nouvelle union. Le texte intégral de la déclaration des trois évêques peut être lu sur le site Riposte catholique.
En France, ce texte dénonçant le glissement vers une acceptation des divorces par l’Église catholique est repris essentiellement par des médias alternatifs. En Pologne, d’où proviennent une grande partie des prêtres exerçant au Kazakhstan, pays de 18 millions d’habitants comptant environ 30 % de chrétiens mais moins de deux cent mille catholiques, la déclaration des trois évêques a été reprise par plusieurs grands médias conservateurs et chrétiens et par le grand quotidien catholique Nasz Dziennik. L’Église de Pologne a d’ailleurs elle-même choisi une interprétation de l’exhortation apostolique Amoris laetitia conforme à l’enseignement catholique traditionnel sur le mariage. Cette interprétation locale que l’actuel évêque de Rome avait dit souhaiter n’est donc pas celle des évêques argentins qu’il a ensuite élevée au rang d’enseignement officiel de l’Église. Contrairement à ce qu’affirmait récemment le cardinal allemand Walter Casper, la controverse a propos d’Amoris laetitia est loin d’être terminée ! Après les Dubia auxquelles François n’a pas daigné répondre autrement qu’en fustigeant publiquement ses auteurs, puis l’appel adressé à François pour qu’il corrige les hérésies contenues dans son exhortation apostolique, la déclaration des évêques du Kazakhstan met en évidence une profonde fracture au sein de l’Église catholique.
Des évêques du Kazakhstan très critiques depuis le début à propos du déroulement du synode sur la Famille et de l’exhortation apostolique Amoris laetitia
Déjà en janvier 2017, ces mêmes évêques avaient appelé les catholiques à prier pour le pape François pour qu’il confirme la doctrine immuable de l’Église sur l’indissolubilité du mariage et son lien étroit avec l’Eucharistie. En octobre 2015, au synode sur la Famille, Mgr Peta avait cité le Bienheureux Paul VI en évoquant « les fumées de Satan qui, par une fente, étaient entrées dans l’Église ». Aujourd’hui, les trois apôtres du Christ au Kazakhstan concluent leur déclaration du 31 décembre dernier avec ces mots à propos d’Amoris laetitia :
« Il n’est pas permis (non licet) de justifier, d’approuver ou de légitimer, ni directement, ni indirectement, le divorce et une relation sexuelle stable non conjugale en admettant les soi-disant « divorcés-remariés » à la Sainte Communion, puisqu’il s’agit en ce cas d’une discipline autre que celle conforme à la Tradition de la foi catholique et apostolique.
En faisant cette profession publique devant notre conscience et devant Dieu qui nous jugera, nous sommes sincèrement convaincus d’avoir ainsi rendu un service de charité dans la vérité à l’Église actuelle et au Souverain Pontife, Successeur de Pierre et Vicaire du Christ sur la terre. »
En effet, expliquent-ils plus haut, « L’admission des fidèles dits ‘divorcés-remariés’ à la Sainte-Communion, qui est l’expression la plus haute de l’unité du Christ-Époux avec Son Église, signifie dans la pratique l’approbation ou la légitimation du divorce. En ce sens, elle introduit en quelque sorte le divorce dans la vie de l’Église. » Cette admission peut désormais varier d’un diocèse à l’autre et d’un pays à l’autre. Or, continuent les évêques du Kazakhstan, « Au vu de l’importance vitale que constituent tant la doctrine que la discipline du mariage et de l’Eucharistie, l’Église est obligée de parler d’une seule voix. Les normes pastorales sur l’indissolubilité du mariage ne doivent donc pas se contredire d’un diocèse à l’autre, d’un pays à l’autre. »