« Sacrilège » : la projection New Age de “Fiat Lux, illuminer notre Maison commune” sur la basilique Saint-Pierre

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Un bien grand mot, dira la majorité : pourquoi qualifier de « sacrilège » la projection d’images offerte au soir du 8 décembre au pape François à Rome, pour marquer l’ouverture du Jubilé extraordinaire de la Miséricorde ? Après tout, on pourrait bien dire que la basilique Saint-Pierre, qui a servi de gigantesque écran au spectacle de lumière, était comme une arche de Noé où les espèces en danger ont défilé dans une spectaculaire mise en scène. Et qu’il s’agissait, au fond, d’une célébration de la création ? Le Créateur en était pourtant singulièrement absent. Et le titre donnait le ton de ce rejet : Fiat Lux, illuminer notre Maison commune. Car c’est à l’intérieur de la basilique Saint-Pierre, comme dans toute église possédant un tabernacle renfermant des hosties consacrées, que se trouve la véritable Lumière du monde, la Présence réelle qui éclaire la juste hiérarchie des valeurs et rappelle la véritable fin de l’homme. De nombreux groupes catholiques anglophones ont sévèrement critiqué l’événement, une « fête » New Age.
 
Le mot sacrilège est en réalité parfaitement choisi : il décrit l’usage profane d’un lieu sacré.
 

Fiat Lux : c’est le mot du Verbe, de la seule lumière qui illumine le monde

 
A cela il faut ajouter que parmi le défilé d’images d’animaux en danger, de phénomènes naturels et de saccage de la nature, le rôle de l’homme comme roi de la création, où Dieu le place dans la Genèse, était totalement absent. Il était fugacement représenté comme saccageur, à travers des cheminées d’usine rejetant des fumées noires, des amoncellements de déchets, des empilements d’autoroutes… S’il y a une « espèce » en danger aujourd’hui, c’est bien l’enfant à naître. Plus d’un milliard de petits d’hommes ont été tués depuis la légalisation de l’avortement à travers le monde : des êtres pourvus d’une âme immortelle créés à l’image et à la ressemblance de Dieu. De ce massacre délibéré, inédit dans la magnitude de sa folie meurtrière, pas un mot, pas une image.
 
Puisque le Vatican est un lieu si symbolique et si efficace pour dicter la conduite des hommes, pourquoi ne pas avoir utilisé Saint-Pierre pour un appel similaire, mais au respect de la vie humaine, au nom de l’auteur de toute vie ?
 
Mais si « Fiat Lux » était une célébration de la nature, et peut-être même de la Nature contre Dieu comme l’avancent certains, ce n’en était certes pas une de l’homme.
 
Le spectacle a établi visuellement le lien entre la COP21 et l’Année de la Miséricorde, un lien qui ne relève pas de l’imagination ou de l’extrapolation mais de ce que Mgr Rino Fisichella, du Conseil pontifical pour la nouvelle évangélisation, en a lui-même dit en présentant l’événement à la presse il y a quelques jours. En une phrase : « Ces illuminations présenteront des images inspirées par la Miséricorde, l’humanité, le monde naturel et les changements climatiques. »
 

Mgr Fisichella : un lien entre la COP21 et “Laudato si’”

 
Mgr Fisichella a précisé que le spectacle avait pour but de rattacher l’encyclique Laudato si’ à la COP21 : à la lecture de ce texte du pape, on comprend qu’il s’agit de promouvoir la « justice », la justice climatique, en faveur notamment des plus pauvres, en suscitant dans l’homme la « conscience écologique ». On comprend mieux le sens et les priorités du pape François à travers la réponse qu’il a récemment faite à une question sur le préservatif à son retour d’Afrique :
 
« Ce n’est pas le problème, a-t-il affirmé. Le problème est plus grand. Cela me fait penser à la question posée un jour à Jésus : “Est-il licite de soigner le jour du shabbat ?” Il y a une obligation de soigner. » François a ensuite expliqué pourquoi ce débat est à ses yeux secondaire : « La malnutrition, l’esclavagisme, l’exploitation, le manque d’eau potable, voilà les problèmes ! Ne nous demandons pas si on peut utiliser telle méthode pour guérir une blessure. Le grand problème est l’injustice sociale. Je n’aime pas tomber dans des réflexions casuistiques quand les gens meurent par manque d’eau, de pain, de logement. Est-il licite de soigner le jour du shabbat ? Je ne veux pas me poser ce genre de question quand on continue la fabrication et le trafic d’armes. Les guerres sont des causes de mortalité plus grandes. Je ne veux pas penser en termes de licite. Je dirais à l’humanité : travaillez à instituer la justice. Et quand il n’y aura plus d’injustice dans ce monde, on pourra parler du shabbat. »
 
La moralité ordonnée au bonheur et au bien, la loi, vivre conformément à la volonté de Dieu, et encore la prêcher, passerait-il donc au second plan tant qu’il y a des « injustices » matérielles dans le monde ? C’est un discours inquiétant qui réveille quelques vieux souvenirs du Nouveau Testament…
 

“Illuminer notre Maison commune” : un grand spectacle New Age

 
Dans le cas de la COP21, il faut rappeler également le caractère très contestable des affirmations assenées sans relâche sur le « réchauffement climatique d’origine humaine ». Ordonnée à la mise en place d’un accord supranational qui aboutira à une redistribution des richesses au nom d’une « divinité » à laquelle il faut tout sacrifier et qu’il faut honorer dans chaque acte de la vie, la Conférence des parties repose sur bien des mensonges que le spectacle de lundi soir à diffusé d’une nouvelle manière en prétendant « illuminer » le monde mais aussi l’Eglise.
 
Financé par une organisation de la Banque mondiale, Connect4Climate, le spectacle de lumière a certainement été préparé de longue date et a englouti des millions d’euros : un bien grand cadeau pour un pape qui prétend à la simplicité. Cela ne se justifie donc que par le « message » et sa portée, et il était clair pour quiconque regardait les images sans esprit critique : l’humanité est l’ennemie de la nature, elle pollue, elle salit, elle menace, elle entasse ses immondices et ses déchets. Elle est de trop.
 
Ce n’est pas un hasard si la Banque mondiale fait partie de ces organisations internationales, l’ONU en tête, qui à travers leurs agences et aux côtés des fondations des multi-milliardaires d’aujourd’hui font partout la promotion de la contraception et, plus discrètement, celle de l’avortement dit « sûr et légal ». Ils ont du sang sur les mains. Et ils prétendent nous dire quoi faire.
 

Le sacrilège : détourner l’église sainte pour un usage profane

 
Steve Mosher, du Population Research Institute, s’est dit « écœuré » de voir la basilique Saint-Pierre détourné pour promouvoir cette « tromperie » dont « le but ultime est d’imposer une taxe carbone sur les pays développés ». « Cette taxe ne va pas seulement handicaper la croissance mondiale en sapant la démocratie, mais ses fruits serviront à financer encore davantage de programmes de contrôle de la population dans les pays en voie de développement », a-t-il commenté, amer.
 
John Smeaton, de la plus ancienne organisation provie du Royaume-Uni, SPUC, s’est dit quant à lui « troublé » par la place accordée à des organisations qui promeuvent la contraception et l’avortement par les « actuelles autorités au Vatican ».
 
Troublé, il y a de quoi l’être et à plus d’un titre. Car le spectacle lui même, avec des aspects esthétiquement impressionnants, comportait bien des aspects profondément dérangeants et il émane, en outre, d’une équipe de production qui n’a pas hésité à « signer » ses œuvres par le passé.
 
Sombrement nommée Obscura Digital, la société ne se contente pas de mettre en lumière et en valeur des monuments à travers le monde entier, ce qui peut se faire de manière très heureuse. Non : elle est au service d’un message, celui de l’écologie et de la lutte contre les émissions de CO2, et révèle en passant les éléments inquiétants de ce combat. C’est un message qu’elle a déjà projeté sur l’Empire State Building ou, très récemment, l’UNESCO à Paris, avec le but affiché de conscientiser les masses.
 

La profanation de la basilique Saint-Pierre au nom de la nature

 
Musiques lancinantes de tendance New Age voisinaient, lundi soir sur la place, avec des cris et des hurlements d’animaux et des bruitages inquiétants. Il va de soi que le message chrétien – la Bonne nouvelle – en était totalement absent, mis à part une projection, avant le spectacle, du logo stylisé de l’Année de la miséricorde, avec son symbolisme inédit dans le monde catholique : le Christ portant un « homme égaré », leurs deux visages ne comptant que trois yeux.
 
On y cherchait en vain des chrétiens : l’humanité était représentée le plus souvent par des aborigènes ou encore des femmes en burka grillagée…
 
Plusieurs éléments totalement hors sujet – du moins en apparence – ponctuaient le spectacle. On peut voir ici la retransmission par le Centre de télévision du Vatican, de l’intégralité du spectacle, que l’on retrouve en meilleure qualité mais amputée des dernières séquences pourtant très parlantes, ici sur Russia Today France.
 
De nombreux catholiques, tels Father Z aux Etats-Unis commentant l’affaire sur son blog, disent leur malaise devant les images : celle du lion de taille monstrueuse recouvrant toute la façade de Saint-Pierre et qui fait immanquablement penser à la prière des complies qui nous exhorte à veiller face à l’ennemi, le démon « comme un lion qui rôde cherchant à dévorer sa proie ».
 

Un symbolisme New Age et des relents nazis

 
La vidéo mise en ligne par Russia today permet de faire de bons arrêts sur images et révèle – difficilement analysables en vitesse de défilement normal  – des images de foule surmontées de bannières et de drapeaux : celui d’un groupe de supporters « ultra » du BVB (le club de football du Borussia Dortmund) et un visage d’homme, sans doute celui d’August Lenz, son joueur fétiche de 1936 qui jouait à l’époque dans l’équipe nationale allemande. La bande son fait retentir ce qui ressemble à de stridents « Sieg Heil » qui se poursuivent tandis que l’image se fond dans une nouvelle image de foule, avec des hommes en vert médical se pressant en cercles concentriques autour d’un sujet central. Les statues d’apôtres qui surplombent la basilique sont alors revêtues des mêmes couleurs, semblant s’ajouter au mouvement.
 
Comprendre le symbolisme et les raisons de ce choix, c’est une autre histoire.
 
Les dernières images du spectacle rompent également avec son allure générale. C’est une suite de symboles ressemblant vaguement à des alphabets anciens et des figures en doré et en noir, sur fond de musique cristalline. Pas une apothéose comme on l’aurait attendue d’un feu d’artifice, mais une succession d’images qui ressemblent à des têtes étranges, malfaisantes et symétriques. L’effet est certainement voulu même si l’on ne peut rien identifier ; l’allure générale est celle d’un temple oriental. Si l’« œuvre » comporte une signature c’est certainement là qu’il fallait la chercher. Sa signification ? Obscura ne l’a pas davantage donnée. Mais ces images créent un réel malaise.
 

La déesse Kali mise en scène par Obscura, créateur de “Fiat Lux”

 
En cherchant plus loin dans les productions de cette société, on comprend peut-être un peu mieux. Les séquences projetées en août dernier sur l’Empire State Building de New York comportaient elles aussi des images qui n’ont rien à voir avec la nature : celles de la déesse Kali. On les voit très bien, mais sur un fond musical qui ne fait pas partie de la bande son du spectacle, ici le site Snopes, et on peut vérifier l’exactitude des images par là, mises en ligne par l’Oceanic Preservation Society qui a sponsorisé le spectacle de Rome. Il s’agit là du spectacle intégral avec la bande son d’origine.
 
Faire rayonner le visage de la déesse hindoue Kali, cruelle marâtre qui préside à la préservation, à la transformation et à la destruction, supposée détruire les méchants et préserver les dévots, qui porte dans sa main une tête coupée, peut paraître étrange. Le visage, soumis à un morphing rapide, passe par des phases particulièrement horribles qui font croire que rien n’est laissé au hasard. L’artiste s’appelle Android Jones : sa page Facebook est par là, riche en symboles. Il a collaboré également à la réalisation de « Fiat Lux ».
 
S’agit-il d’effrayer l’humanité avec des images du mal pour mieux faire passer le message ? Dans les milieux holistiques, on s’en accommode pourtant plutôt bien. L’artiste lui-même parle d’un « cœur à cœur époustouflant » avec Kali dont cette « apparition sur Manhattan peut bien être notre dernier avertissement », elle qui « nous invite à plonger dans le noir pour confronter la terrible réalité de la crise écologique globale, et pour que les cœurs brisés soient le terreau qui nous fera naître et depuis lequel nous servirons ».
 
Cette rhétorique infernale est servie par une nommée Vera de Chalembert, Américaine à Paris qui propose des méthodes de guérison par les champs énergétiques selon Barbara Brennan, ancienne spécialiste en sciences physique de la NASA reconvertie dans le New Age ; c’est elle qui rassemble ces « signes des temps » alors que « Kali prend New York ».
 
« Ne sous-estimez jamais la puissance des saintes ténèbres à révéler l’âme de toute chose », tweetait-elle en août
 
Elucubrations de fous ? On aimerait le croire. Mais il se dessine là une logique, une constante qu’on aimerait voir tenue très au loin de Saint-Pierre de Rome. Vraiment.
 

Anne Dolhein