GUERRE  Fury Cinéma ♥♥♥♥

Fury film
 
Fury relève de la catégorie rare des excellents films de guerre. Il brille par la qualité de la reconstitution, des matériels, ou de l’atmosphère. La narration se tient aussi. Ce qu’elle comporte de discutable sur le plan du réalisme relève de la logique des personnages du film, qui possèdent leur existence propre. Des acteurs très connus savent disparaitre dans leurs rôles. A quoi s’ajoute la logique du contexte, par exemple lorsque les conducteurs d’un très beau Tiger I suivent une tactique incongrue, elle n’étonne pas de la part de recrues formées dans l’urgence. Il n’y a qu’une séquence délirante d’héroïsme hollywoodien d’usage, sur la fin, qui ne gâche pas l’excellence d’ensemble.
 
Il y avait tout à craindre d’un énième film sur la deuxième guerre mondiale, centré sur un affrontement entre Américains et Allemands. On pouvait craindre un navet en noir et blanc moral, avec l’héroïsme d’un côté, et grandeur morale, face à des « nazis », qui incarnaient le mal absolu de la propagande de guerre américaine de 1941-45, ce que l’on peut comprendre, et qui le restent à notre époque, ce qui étonne davantage.
 

Fury : les Allemands défendent leur pays

 
L’ambiance de l’invasion du Nord-Ouest de l’Allemagne par l’armée américaine, au début d’avril 1945, est très bien rendue. A posteriori, la guerre paraît finie ou presque, à la seule exception de Berlin, attaquée par l’armée soviétique. Les Alliés à l’Ouest faisant des courses tranquilles sur des centaines de kilomètres d’autoroutes. La vision est juste à partir du 15 avril, qui a vu la fin de la résistance organisée allemande à l’Ouest, alors que de durs combats avaient eu lieu jusqu’alors. Les officiers américains sur le terrain, très en avant, craignirent jusqu’au milieu du mois de se faire couper de leur ligne de départ. Ils devaient conserver des tactiques relativement prudentes lors de leur progression. Comme ils ne savaient pas vraiment ce qu’il restait de puissance à la Wehrmacht, ils se méfiaient encore. Trop, pour l’observateur qui connaît le dessous des cartes, pour nous. Mais l’incertitude de la guerre, précisément, est fort bien rendue. Tout ceci est fort bon.
 
Mieux, et encore plus inattendu, sont rappelés des évidences, indicibles ou quasiment en France actuelle. Ainsi, les Allemands défendent leur pays, tout simplement. L’armée américaine ne tient pas de l’association de gentils philanthropes libérateurs. Sans en rajouter dans le sadisme, et avec un minimum de prudence formelle pour ménager le spectateur américain, les exécutions sommaires de prisonniers allemands, et les viols opérés par l’US-Army, dont les soldats se croient tout permis, ne sont pas cachés. Les soldats américains sont possédés par la haine des « nazis », suivant l’endoctrinement d’époque, et ne se réfèrent pas à un discours construit. Fury est donc un film excellent, à voir absolument pour les amateurs du genre, mais certainement pas les cœurs sensibles ou les enfants, du fait même de détails réalistes justes.