Dans un entretien exclusif accordé au Telegraph de Londres, le PDG d’Apple a fait montre de sa grande confiance dans les gouvernements pour surveiller Internet. Tim Cook les a appelés à lancer des campagnes d’information publique afin de combattre le fléau des fake news ou « fausses nouvelles » dont on parle tant ces jours-ci. Il les accuse de « tuer les intelligences ».
Il faut à tout prix que les pouvoirs publics et les grandes entreprises informatiques – et parmi ces géants, Apple est le premier – prennent à bras-le-corps l’épidémie de fausses informations, « un grand problème dans une grande partie du monde », estime-t-il. Et pour qu’on comprenne bien son intention, Cook propose que cette campagne soit calquée sur celle qui a changé les attitudes vis-à-vis de l’environnement.
Les « fake news » : aux gouvernements d’agir ?
La précision est intéressante, justement parce que les menaces du réchauffement climatique d’origine anthropique ont donné lieu à un grand nombre de fakes, de fausses nouvelles et de falsifications scientifiques. A quoi il faut ajouter l’idée de propagande assumée : une propagande publique, un harcèlement continu au service d’une idée très précise. Il s’agit explicitement « d’éduquer », de formater les gens dans le monde entier pour qu’ils conforment leur pensée au politiquement correct.
« Il faut l’enraciner dans les écoles, il faut l’enraciner dans le public. Il faut une campagne massive. Il faut penser à chaque tranche de la population. Il nous faut mettre en place la version moderne une campagne d’annonce de service public. Cela peut se faire vite, pourvu qu’on en ait la volonté », a déclaré Cook dans un plaidoyer passionné.
On peut le comprendre lorsqu’il affirme : « Nous traversons une période où malheureusement certains de ceux qui gagnent sont ceux qui passent leur temps à vouloir avoir le plus de clics, et non à dire le plus de vérité. D’une certaine façon, cela tue les intelligences. »
Tim Cook d’Apple veut mobiliser les jeunes pour la censure
C’est toute la question du sensationnalisme, filière exploitée depuis que la presse existe : plus gros sont des titres, moins on a besoin que l’article y corresponde et plus on peut se permettre d’écarts par rapport à la réalité. Aujourd’hui, nul besoin d’aller acheter, un peu honteux, la presse à sensation : comme la pornographie, les « nouvelles » destinées à flatter les plus bas instincts sont à portée de tous les écrans, et elles sont plus attirantes qu’un article sérieux ou un rappel de doctrine. Tuer les intelligences ? La remarque est certainement juste en un sens : le zapping sur Internet peut annihiler la culture et la mémoire longue ; encombrer l’esprit de faits invérifiables mais qui flattent est un moyen efficace d’entraver la pensée réfléchie. Ça n’est pas un hasard si les très grands de l’informatique ne donnent pas de tablettes à leurs enfants !
Mais on sait aussi qu’à côté des informations fausses qui existent en effet, il y a des informations manipulées qui vont dans le sens de la pensée dominante, sans jamais être dénoncées comme telles, et pour cause, et des informations vraies balayées comme fakes parce qu’elles sont contraires à cette pensée dominante. Il suffit de reprendre l’exemple de Tim Cook : la propagande sur le réchauffement climatique ne souffre pas de contestation et ses opposants sont présentés comme des menteurs, quand ils ne sont pas chassés de leur emploi.
Aux gouvernements de lancer des campagnes contre les fausses nouvelles !
Pour Apple, le plan d’action est clair : « Nous autres, les entreprises de technologie, devons créer des outils qui puissent contribuer à diminuer le volume des fake news. Nous devons essayer de comprimer tout cela sans piétiner la liberté d’expression ni celle de la presse, mais nous devons aussi aider le lecteur. Trop d’entre nous sommes dans la catégorie de ceux qui se plaignent sans avoir trouvé que faire. »
Il n’y aura que des effets bénéfiques, selon lui : en pourchassant les appâts à clics, « on parviendra à ce que ce que les sources médiatiques véridiques, dignes de confiance, non sensationnelles, profondes emportent la partie ». Notez que s’il ne reste que les gros médias, en phase avec la pensée dominante, il sera facile de dire que l’opération a bien fonctionné…
Cerise sur le gâteau, c’est par les enfants et les écoles que Tim Cook veut remodeler l’approche vis-à-vis d’Internet. « À certains égards, les enfants seront les plus faciles à éduquer. Au moins avant un certain âge, ils sont tout à fait dans le monde “j’écoute, je comprends”, après quoi ils poussent leurs parents à agir. Nous avons vu cela avec les questions de l’environnement : des enfants qui apprennent à l’école, et qui reviennent à la maison en disant : “Pourquoi as-tu cette bouteille en plastique ? Pourquoi tu la jettes ?” »
Au moins, les ficelles de la propagande sont totalement assumées.
Anne Dolhein