A Grenade, colère après des prières musulmanes autorisées dans un jardin public au pied d’une statue de la Vierge

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Des dizaines de musulmans ont prié devant une statue de la vierge Marie.

 
C’est avec l’autorisation du maire socialiste de Grenade, en Andalousie, qu’une communauté musulmane locale a pu fêter la rupture du jeûne du ramadan samedi dernier en organisant une prière publique dans les « Jardines del Triunfo », les « jardins du triomphe » aménagés en 1960 dans le quartier du même nom dans l’ancienne capitale mauresque d’Al Andalus. De nombreux catholiques se sont émus de voir le jardin public utilisé non seulement pour la prière rituelle, avec des centaines d’hommes prosternés en direction de la Mecque, mais encore pour toute une soirée d’événements culturels destinés à soutenir le dialogue inter-religieux avec l’islam. Tout cela s’est déroulé au pied d’une statue de la Vierge Marie, monumentale représentation de l’Immaculée Conception qui domine le jardin du haut d’une colonne.
 
C’est la première fois que la mairie de Grenade a autorisé des prières publiques dans ce jardin, au moyen d’une note qui souhaitait aux musulmans « un heureux ramadan dans les jardins du Triunfo ». Selon des sources municipales, il s’est agi « d’un événement sans précédent qui nous rapproche et nous rend plus égaux ». Il y avait là une claire volonté politico-religieuse et syncrétiste. Le maire, Francisco Cuenca, s’est justifié, d’ailleurs, au nom du multiculturalisme.
 
Côté chrétien, c’est la division.
 

La colère après la provocation de la « rupture du jeûne » au « Jardin del Triunfo » au pied d’une statue de la Vierge

 
Tout est parti d’une demande de l’imam de la Grande mosquée de Grenade, le Cheikh Ahmed Bermejo. Au vu de la polémique déclenchée par la prière publique qui a marqué la rupture du jeûne à 21 h 45, samedi, il a reconnu dans la presse avoir été à l’origine de la demande déposée auprès des autorités municipales. « Jusqu’à aujourd’hui, je ne m’étais pas rendu compte qu’il y avait là une statue de la Vierge, Nous autres, nous ne voulons rien revendiquer », a-t-il protesté.
 
C’est cela… Ahmed Bermejo Mendoza est né à Grenade de parents convertis à l’islam, elle américaine, lui originaire de Galicie. A plus de 40 ans, cet Espagnol de souche ignorerait-t-il à ce point la culture qui l’entoure ? Et ce d’autant moins que la soirée de samedi était également un événement multiculturel. L’imam a souligné que des chrétiens avaient participé à la prière collective : ceux des « Comunidades Populares de Granada ». Ces « communautés populaires », qui se revendiquent de Vatican II et de la théologie de la libération, ont été créées au cours des années 1970 pour « renverser la dictature du général Franco et son national-catholicisme ». Il faut préciser qu’elles ont été expulsées des paroisses catholiques de Grenade au cours des années 1980.
 
L’imam Bermejo insiste : « Nous voulions démontrer que l’islam est convivialité, ouverture et générosité, parce que l’islam vous appelle à cela, à vivre avec vos voisins sans aucune sorte de problème ni de confrontation ».
 
On est donc prié d’oublier que la prière publique musulmane a une signification politique, une signification de conquête et d’appropriation du sol : une terre sur laquelle a prié un musulman doit revenir à l’Oumma. Quand cela se passe au pied d’une statue de Notre Dame, l’affaire se double d’une provocation délibérée.
 

A Grenade, on honore l’Immaculée Conception comme nulle part ailleurs

 
Mais pourquoi avoir choisi ce jardin ? Je cherche en vain l’origine du nom, « El Triunfo ». Mais c’est le nom de ce quartier de Grenade depuis le XVIIe siècle au moins. Au temps des Wisigoths, une basilique chrétienne s’y élevait. Après les invasions musulmanes, elle devait être détruite par l’émir Youssouf ben Texufin, puis remplacée plus tard par un cimetière arabe lors de la conquête musulmane. Après la Reconquête – est-ce elle qui fut à l’origine de ce nom de « Triunfo » ? – on y construisit de nombreuses églises et demeures seigneuriales ainsi qu’un hôpital royal. C’est au début du XVIIe siècle qu’on y éleva une première statue à la Vierge Immaculée, particulièrement honorée à Grenade qui commémorait ainsi le « vœu de sang » de l’université de la ville. Par ce vœu solennel, les professeurs et les étudiants s’engagèrent en 1622 à verser jusqu’à leur dernière goutte de sang pour défendre la réalité de la Conception Immaculée de Marie, libre de la tache du péché originel.
 
Quelle déchéance, aujourd’hui. De nombreux chrétiens espagnols ont participé au faux culte de l’islam avec la bénédiction de la municipalité et le concours de la Fundacion Euroárabe, la Fondation Euro-Arabe des Hautes Etudes qui prône un islam restructuré et le dialogue et la coopération entre l’Europe et le monde arabe. Rien n’était donc fortuit : l’événement avait un objectif évident de rapprochement des religions et d’appel à l’intégration des populations musulmanes dans les villes européennes.
 

Des prières musulmanes autorisées dans un jardin public de Grenade à l’occasion du ramadan

 
L’opposition de droite à Grenade, qui fait partie du Partido Popular, est au nombre de ceux qui n’ont pas été séduits par ce discours relativiste. Les conseillers municipaux du PP ont dénoncé « une nouvelle démonstration de maladresse » de la part du maire Francisco Cuenca. Leur porte-parole, Rocio Diaz, tout en affirmant le devoir de respecter chacun, a souligné que ce respect « passe par le fait de ne pas blesser la sensibilité de quiconque ». Dans ce cas précis, il est clair « qu’on a choqué et insulté des milliers d’habitants de Grenade », a-t-elle déclaré.
 
Même le député centriste Ciudadanos de Grenade, Luis Salvador, a jugé nécessaire de publier un tweet où il dénonce ce maire qui « confond tolérance et respect religieux avec la provocation ».
 
Mais si les politiques de l’opposition, sans doute aussi parce qu’ils connaissent les réactions et les sentiments des autochtones, ont tenu à marquer leur différence, il n’en va pas de même pour l’archevêque du lieu qui s’est désolidarisé de ces critiques politiques et de celles exprimées sur le plan religieux par des catholiques que la presse espagnole qualifie d’« intégristes ». Mgr Francisco Javier Martinez a dénoncé l’initiative d’un groupe de catholiques qui ont convoqué une réunion de prière du rosaire ce mercredi en « réparation » de la prière musulmane. Dans son communiqué officiel, publié par le site de l’archidiocèse, Mgr Martinez écrit : « Nous chrétiens, nous ne faisons pas réparation pour la prière de fidèles d’autres confessions. La liberté religieuse est un bien suprême que l’Eglise défend et protège face à tous les obstacles qui peuvent s’y opposer. L’initiative de convoquer ce rosaire n’est pas d’Eglise de et elle n’est ni autorisée, ni soutenue par l’autorité de l’église à Grenade ».
 
La liberté religieuse, un bien suprême ? Bigre ! C’est pousser les choses bien loin, bien au-delà de cette liberté que les catholiques peuvent légitimement exiger face à n’importe quelle autorité, au nom de la vérité de leur foi. Liberté d’adorer exclusivement le vrai Dieu, tel que nous l’enseigne et l’ordonne le premier et le plus grand des commandements : « Tu n’auras pas d’autre Dieu que Moi ».
 
Notez que c’est la « réparation » qui fait problème aux yeux du prélat. Ou peut-être est-ce le Rosaire, que nous fêtons le 7 octobre pour marquer la victoire historique de Lépante sur les assaillants musulmans en 1561 ?
 

Jeanne Smits