François Hollande décore de la Légion d’honneur le ministre de l’Intérieur saoudien

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Cette remise par François Hollande de la Légion d’honneur au prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed ben Nayef, a été vertement critiquée par plusieurs responsables politiques.

 
Riyad multiplie les visites à Paris. Coup sur coup le ministre de l’Intérieur saoudien et son homologue des Affaires étrangères ont été reçus dans la capitale. Le premier, Mohammed ben Nayef, a même été décoré vendredi de la Légion d’honneur par François Hollande. Le motif importe peu, car la décision a, en elle-même, enflammé les réseaux sociaux qui dénoncent la pratique habituelle de la peine de mort dans le royaume wahhabite. De fait, depuis le début de l’année, il a été procédé à soixante-dix exécutions en Arabie saoudite. Mais, au-delà de cette question d’éthique, on ne peut que s’interroger au développement de la politique étrangère actuellement menée par la France…
 
Oh ! bien sûr, on ne s’étonne plus de rien en ce qui concerne la Légion d’honneur. Sans compter que, depuis des décennies, on la remet aussi bien à ceux pour qui l’empereur Napoléon l’avait créée qu’aux artistes, sportifs et autres potiches dont le mérite « éminent » semble suivre la courbe de leur présence dans les media. Le fait de l’avoir décernée récemment aux morts de la tuerie Charlie, et la colère que cela a provoqué chez certains récipiendaires qui refusent désormais de s’en prévaloir, rabaissent décidément cette distinction au niveau des hochets dont on amuse habituellement le peuple.
 

La France décore de la Légion d’honneur le ministre de l’Intérieur saoudien

 
La bronca a été telle, que le gouvernement l’a prise au sérieux, puisque son tout nouveau ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, a pris soin d’expliquer qu’une telle remise de décoration relevait d’une tradition « diplomatique », et que, au surplus, il n’y avait eu, à cette occasion, « rien de solennel ».
 
On notera que, en s’exprimant ainsi, le ministre confirme le sentiment populaire premier selon lequel la Légion d’honneur n’est plus qu’une vague breloque, presque une verroterie sans valeur.
 
D’ailleurs, Jean-Marc Ayrault aurait pu préciser qu’il s’agissait d’une tradition diplomatique et commerciale. Car, somme toute, c’est un peu des deux que le ministre saoudien des Affaires étrangères est venu discuter à l’Elysée : le prix du pétrole, l’arrêt de l’aide à l’armée libanaise, à côté de la lutte contre l’Etat islamique, et, bien sûr, du nécessaire départ du président syrien de ses responsabilités. François Hollande a dû en être tellement heureux que, pour le coup, il aurait bien donné la Légion d’honneur pour ce seul motif… sans s’inquiéter de ce que, en agissant ainsi sur ces divers dossiers, l’Arabie saoudite marque clairement sa volonté de reprendre la main, économique et politique sur la région, et force donc la main de la France dans son opposition à l’Iran. On ne sait trop comment, après cela, François Hollande pourra reprendre les discussions menées par Laurent Fabius (ah oui ! c’est vrai, il est parti…) avec Téhéran.
 

François Hollande et une géopolitique à courte vue

 
Tout cela est peut-être un peu compliqué pour François Hollande, qui a toujours manifesté un défaut de vision à long terme. Et puis il est vrai que, lorsque l’on confond si aisément l’Egypte et l’Inde, les Boliviens et les Péruviens, etc. on ne doit pas faire grande différence entre Iraniens et Saoudiens…
 
Mais, au fait, pourquoi décorer le ministre saoudien de l’Intérieur (dont on peut même se demander ce qu’il faisait là…) plutôt que celui des Affaires étrangères ? C’est que le premier a l’immense avantage d’être également prince héritier…
 

François le Luc