Le portefeuille d’identité numérique européen (eID) arrive : tout est prêt pour la surveillance et le contrôle institués

identité numérique européen surveillance
 

Les représentants du Parlement européen et des Etats membres se sont mis d’accord, le mercredi 8 novembre, sur la mise en place du système d’identification numérique sécurisé, la fameuse eID ou Digital ID Wallet. Et à cette heure, on ne peut toujours pas accéder au texte juridique qui doit être voté dans moins de deux semaines, au sein de la Commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie du Parlement, le 28 novembre prochain. Impossible donc de détailler ces propositions qui n’ont pas été débattues par l’ensemble des parlementaires, parce que soumises (bizarrement) à un processus d’adoption accéléré, et au sujet desquelles des centaines d’experts du monde de la cybersécurité ont exprimé de nombreuses craintes.

L’opacité de la procédure n’a d’équivalent que la satisfaction des promoteurs de ce portefeuille d’identité numérique dans la droite ligne du Pass Covid qui n’a pas vraiment laissé de bons souvenirs : c’est la porte ouverte à une surveillance et un contrôle accrus, institués, qui n’auront rien à envier à la Chine communiste.

 

Adoption du règlement eID pour une ère de surveillance accrue

Quand on lit les promesses avenantes sur le site Internet de la Commission européenne, on est presque touché de tant de préoccupations à l’égard des petits Européens englués dans l’administratif à tout crin qui les submerge aujourd’hui… On en rêverait presque de ce portefeuille d’identité numérique. Vous aurez tout dedans. Il pourra contenir les éléments vérifiés de votre carte d’identité nationale biométrique, mais aussi des attributs personnels authentifiés, pour une utilisation aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé. Tout, on vous dit. C’est peut-être ça le problème…

Montrer des actes de naissance, ouvrir un compte bancaire, remplir des déclarations de revenus, postuler à une université, donner accès à son revenu d’imposition, son permis de conduire, ses fiches de paye, conserver une prescription médicale, louer une voiture, payer un billet d’avion ou encore s’enregistrer dans un hôtel… En 2024, tous les pays européens devront mettre à la disposition de leurs citoyens ce Digital ID Wallet qui les placera au centre du contrôle de leurs données personnelles et leur garantira soi-disant « le plus haut niveau de sécurité et de confidentialité » selon les mots d’un de ses architectes, notre commissaire au marché intérieur, Thierry Breton.

Voilà. Ça, c’est pour la vitrine dorée. Mais leur « ambition » confiante n’est pas forcément la nôtre. Une solution qui « protège les droits et les valeurs démocratiques » ? Le souci de la vie privée n’a jamais été l’apanage de nos gouvernements friands de ces données, de ces data qui sont le nouvel eldorado contemporain. Et cette crainte est à doubler du fait que ce qu’on brandit comme totalement « optionnel » pourrait se voir bientôt imposé ou impliquant tellement de contraintes pour le non utilisateur qu’il se pliera de facto

 

Le portefeuille d’identité numérique européen, dans la même veine que le Pass Covid

Ce bébé tant attendu grandissait depuis longtemps dans le sein de la matrice européenne. La Commission avait présenté le projet du « Portefeuille d’identité numérique européen » en mars 2021, projet piloté par le consortium européen nommé POTENTIAL. « Notre ambition commune est qu’à partir de juin 2025, le portefeuille d’identité numérique devienne le compagnon d’identité des citoyens français et européens », assure Gérald Darmanin.

C’est « une très mauvais nouvelle » pour l’eurodéputé néerlandais Rob Roos, qui a rappelé sur X l’ignorance totale par les autorités européennes des avertissements de plus de 500 experts. Pire : elles les ont qualifiés de « malentendus »… !

Pourtant, selon ces derniers, « la proposition actuelle élargit radicalement la capacité des gouvernements à surveiller à la fois leurs propres citoyens et les résidents de l’UE en leur fournissant les moyens techniques d’intercepter le trafic web crypté, ainsi qu’en sapant les mécanismes de contrôle existants sur lesquels comptent les citoyens européens. Concrètement, le règlement permet à chaque Etat membre de l’UE (et aux pays tiers reconnus) de désigner des clés cryptographiques pour lesquelles la confiance est obligatoire ; cette confiance ne peut être retirée qu’avec l’autorisation du gouvernement (article 45 bis, paragraphe 4) ».

« Cela signifie que n’importe quel Etat membre de l’UE ou pays tiers, agissant seul, est en mesure d’intercepter le trafic web de n’importe quel citoyen de l’UE et qu’il n’y a pas de recours efficace. » Ainsi, tout ce qui sera contenu dans le portefeuille d’identité numérique sera potentiellement visible et consultable par les autorités des pays européens.

 

Un système judicieusement exploitable pour un contrôle dictatorial tous azimuts

Et qu’a voulu dire notre commissaire européen Thierry Breton, en avouant que maintenant qu’il existe un portefeuille d’identification numérique, « nous devons y mettre quelque chose » ? Pour Rob Roos, c’est certain, il évoquait la monnaie numérique de la banque centrale, ou MNBC, forme numérique de l’argent fiduciaire. Le patrimoine financier des particuliers pourrait ainsi se voir intégralement transformé en numériques euros…

Rappelons que ce format permet à l’émetteur, comme nous l’expliquait Anne Dolhein, d’identifier et de tracer l’utilisation de chaque unité, et donc la possibilité de tout surveiller de vos transactions, de leurs montants et de leurs destinataires.

Décidément l’eID a tout d’un outil autocratique fabuleux. Les pouvoirs auront ainsi un moyen de contrôle sur votre vie, sur votre santé, sur vos finances, en passant par vos idées. Il sera même en leur pouvoir d’empêcher certaines personnes d’accéder à des services publics, à des remboursements, à des moyens de transport, à des crédits bancaires, sous prétexte de pénuries, de pandémies, de mauvais comportements ou de mauvaises opinions.

Le tri des citoyens va pouvoir commencer à s’opérer. On se dirige droit vers le modèle du crédit social à la chinoise. Bientôt l’Europe « libérale », nouvelle « smart city » à grande échelle, n’aura rien à envier au communisme de Xi Jinping.

 

Clémentine Jallais