En Italie, le parti de Meloni propose une loi pour « sauvegarder » les crèches des écoles

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La crèche, c’est sacré en soi. Mais ça l’est encore plus en Italie, berceau de sa naissance il y exactement 800 ans, lorsque François d’Assise, revenu de voyage en Terre Sainte, imaginait au pied levé une crèche vivante dans le petit village de Greccio… Plus qu’un symbole, c’est un sceau mémoriel : celui qui montre aux non croyants le fondement des racines européennes, de la civilisation judéo-chrétienne, et aux croyants le geste d’Amour par excellence, celui du Dieu fait homme. La représentation figurative de la Nativité ne force rien : elle donne à voir ces deux vérités, elle propose, comme l’a toujours fait le Christ, et les hommes disposent en leur for interne… Elle n’en est pas moins incontestable.

C’est pour cette raison que le parti au pouvoir de Giorgia Meloni a décidé de présenter une loi pour sauvegarder les crèches au sein des écoles publiques, dans ces espaces éducatifs où la transmission de la culture peut et doit se faire, à défaut, pour le moment, de celle de la foi.

 

Giorgia Meloni : « une mère chrétienne » d’Italie

On pouvait le pressentir. A peine arrivée au pouvoir, en décembre de l’année dernière, la Présidente du Conseil italien avait consacré une de ses courtes vidéos intitulées Due minute con Giorgia !, à la crèche de Noël, justement. On l’y voyait, vraisemblablement chez elle, manipulant des santons : « J’ai décidé de faire une crèche alors que plus personne ne la fait, j’ai décidé de la faire alors que les écoles disent que cela ne peut pas être fait sous prétexte d’offenser ceux qui croient en une autre culture. »

En écho à cette déclaration, son parti politique, Frères d’Italie (Fratelli d’Italia, FdI) a proposé, mercredi, un projet de loi visant à réprimer les écoles qui organisent des célébrations générales pendant la période des fêtes, pour reconnaître la diversité croissante des classes italiennes.

« Depuis quelques années, nous assistons à des décisions inacceptables et gênantes de la part de certaines écoles qui interdisent les crèches ou modifient l’essence profonde de Noël en le transformant en d’improbables festivités hivernales pour ne pas offenser les croyants d’autres religions », a déclaré Lavinia Mennuni (FdI), sénateur et principal signataire du projet de loi proposé.

Cette décision « est absolument essentielle pour sauvegarder et protéger les racines culturelles [de l’Italie], illustrées par la crèche ».

 

« Un contexte commémoratif historique et culturel propre à notre nation »

Si elle était adoptée, la nouvelle législation signifierait que les directeurs d’école qui continueraient à retirer les crèches s’exposeraient à des mesures disciplinaires. On imagine sans peine la réaction de la gauche italienne qui d’ailleurs, ne répond pas sur le fond, à savoir sur la question des racines de la culture européenne… Elle se contente du sarcasme en déclarant que Meloni aurait, elle, envoyé la Sainte Famille en fuite en Albanie, là où la Présidente du Conseil compte héberger jusqu’à 3.000 demandeurs d’asile en attendant que leur demande soit traitée.

Si seulement, en France, on pouvait en être à proposer que les crèches soient maintenues dans les écoles publiques… Le laïcisme est plus rude en terre maçonnique des Lumières. L’on s’y bat encore dans les halls des mairies. La polémique sur les crèches de Noël dans les établissements publics renaît en effet chaque année, car certaines municipalités résistent bel et bien comme Salon-de-Provence, Perpignan, Châteauneuf-les-Martigues, Marseille, ou encore Béziers où elle trône depuis dix ans à l’intérieur du patio de l’hôtel de ville, malgré les procès répétés de la Ligue des droits de l’homme.

« On ne demande pas à ceux qui entrent à l’hôtel de région de prier devant la crèche » s’est défendu le président de la Région PACA, Renaud Muselier…

Et puis, pour reprendre les mots de Giorgia Meloni dans sa vidéo précédemment citée : « Comment un enfant né dans une mangeoire peut vous offenser ? Comment une famille qui s’enfuit pour défendre cet Enfant peut-elle offenser ? En quoi ma culture vous offense-t-elle ? (…) Dans ce symbole sont rassemblées les valeurs qui ont fondé ma civilisation. Je crois au respect parce que ce symbole me l’a appris, je crois à la laïcité de l’Etat parce que ce symbole me l’a appris. Je crois au caractère sacré de la vie parce que la naissance de cet enfant me l’a appris. Je crois en la solidarité parce que ce symbole me l’a appris. Ce que je suis se trouve dans ce symbole. »

 

Les crèches dans les écoles… les crèches au cœur de nos vies

Et combien d’autres s’y retrouvent, malgré, bien souvent, la perte de la foi. Selon un sondage IFOP pour La Vie, publié fin novembre, plus de deux Français sur cinq (41 %) installent encore une crèche chez eux : et quand elles ont des enfants, la moitié des familles le font… Ainsi, la « dimension traditionnelle et culturelle » subsiste selon l’institut. Et il est essentiel, fondamental de la maintenir.

Crèches de bois, de céramique ou d’ivoire, crèches en pierre de volcan ou en papier mâché, crèche de fortune dans la chambre d’un enfant, ou crèche de somptueuse de basilique… Il faut goûter le silence magnifique de leur joie, de cette attente qui fut celle de tout l’Ancien Testament.

Dans la pénombre de la nuit, elles demeurent. Pauvrettes ou théâtrales, elles diffusent la même impression de sérénité absolue, irréfragable, contre laquelle personne ne peut rien, et c’est sans doute ce qui rend fous leurs détracteurs : le fils de l’Homme est né, de toute éternité, et de toute éternité, Il veut nous sauver, à nous de l’accepter et de faire nôtre Son chemin d’humilité et d’abandon. Qu’il est plus facile de se dépouiller du « vieil homme » dans cet émerveillement renouvelé…

Défendre la crèche, c’est peut-être préserver le dernier témoignage religieux suffisamment ancré dans l’héritage de notre civilisation pour qu’il touche le plus grand nombre. C’est la raison pour laquelle il est tant attaqué. Car la racine culturelle, acceptée comme telle, conserve un tant soit peu de vie par la souvenance, et peut, un jour, refaire naître.

 

Clémentine Jallais