Après la remarquable défense de dominicains des Etats-Unis de la doctrine traditionnelle du mariage, la revue des jésuites américains a pris le contre-pied en venant au secours des propositions du cardinal Kasper qui voudrait voir un assouplissement pastoral en direction des divorcés « remariés ». America Magazine vient de publier un éditorial non signé, et qui par conséquent engage la rédaction dans son ensemble, où l’on souligne que les demandes du cardinal allemand « s’enracinent dans l’impératif de la miséricorde ».
Les auteurs notent que « la tragédie du divorce a d’une façon ou d’une autre touché presque chaque famille dans le monde occidental contemporain ». Ceux qui vivent « la torture des suites du divorce » se demandent s’ils vont encore pouvoir aimer, s’ils « sont encore aimable » : quand ils sont catholiques et qu’ils se remarient sans obtenir un décret de nullité, « ils supportent un fardeau supplémentaire » du fait des « règles en cours de l’Eglise » qui les éloignent de l’absolution et de la communion.
Réévaluer les règles avec le cardinal Kasper
Voilà la manière orientée dont les jésuites posent le problème ; sans surprise, ils s’en prévalent pour présenter la demande de « réévaluation critique des règles en cours » présentée par le cardinal Kasper lors du dernier consistoire.
L’éditorial soutient que cette demande ne porte en rien atteinte à « l’enseignement de l’Eglise sur l’indissolubilité d’un mariage sacramental » qu’aucun être humain « n’a le pouvoir de changer ». Il ne s’agit pas non plus de choisir « entre la loi et l’amour ». Non, assurent les jésuites : « Loin de chercher à saper le caractère juridique du ministère de l’Eglise, le cardinal Kasper cherche au contraire à le préserver, en rendant la discipline de l’Eglise plus efficace et plus crédible à la lumière des défis contemporains ». Il ne s’agit pas de donner « légèrement » aux catholiques divorcés et civilement remariés le droit d’accéder de nouveau aux sacrements.
Il n’empêche, c’est bien ce qu’ils proposent dans le sillage du cardinal Kasper dont ils reprennent les propos sur ces catholiques « remariés » qui, « en se repentant de n’avoir pas su accomplir ce à quoi ils s’étaient engagés devant Dieu », s’efforcent de faire de leur mieux à l’égard de leurs nouvelles obligations.
La pastorale des divorcés remariés
Ce sont aussi bien « l’Evangile » que le « caractère pastoral essentiel de l’Eglise, plus pleinement mis en lumière par le concile Vatican II », qui obligent à ne pas leur refuser indéfiniment le pardon. « Il faut trouver une forme d’arrangement pastoral pour le genre de personnes » que le cardinal décrit, à condition de « tenir compte des hommes et des femmes qui ont tiré un bénéfice spirituel de leur fidélité à la discipline actuelle de l’Eglise », et que chacun « tienne pour acquises les bonnes intentions des autres ». Enfin, « tout changement ne devra pas apparaître comme un geste révolutionnaire de la part du pape actuel, mais comme la réponse de l’Eglise aux signes des temps ».
Tout cela ne veut pas dire grand-chose, on en conviendra, et ne fait qu’habiller de paroles un propos bien précis de changer la pratique en oubliant au passage ceux qui s’efforcent parfois héroïquement de rester fidèles à leurs engagements matrimoniaux, que leur couple existe encore ou qu’il ait éclaté.